aucune ��poque n'a ��t�� plus religieuse, en ce sens que les esprits ��lev��s luttent contre le pass��, et aspirent vers l'avenir. Mais le pr��sent ne peut s'abriter sous aucun temple. Pourquoi m'avez-vous fait entrer dans celui-ci?
--N'allez-vous pas �� la messe le dimanche?
--C'est une affaire de convenance, et pour ne pas jouer le r?le d'esprit fort. Le dimanche est d'obligation religieuse, par cons��quent d'usage mondain.
--H��las! vous ��tes hypocrite.
--De religion? Non pas. Je ne cache �� personne que j'ob��is �� une coutume.
--Vous vous ��tes fait un dieu de ce monde profane, et vous le trouvez plus facile �� servir.
--L��once, seriez-vous d��vot? dit-elle en le regardant.
--Je suis artiste, r��pondit-il; je sens partout la pr��sence de Dieu, m��me devant ces grossi��res images du moyen age, qui font ressembler le lieu o�� nous sommes �� quelque pagode barbare.
--Vous ��tes plus impie que moi: ces f��tiches affreux, ces _ex-voto_ cyniques me font peur.
--Je vois, le pass�� est votre effroi; il vous gate le pr��sent. Que ne comprenez-vous l'avenir? Vous seriez dans l'id��al.
--Tenez, artiste, regardez! lui dit Sabina en attirant son attention sur une figure agenouill��e sur le pav��, dans la profondeur sombre d'une chapelle fun��raire.
C'��tait une jeune fille, presque un enfant, pauvrement v��tue, quoique avec propret��. Elle n'��tait pas jolie, mais sa figure avait une expression saisissante, et son attitude une noblesse singuli��re. Un rayon de soleil, ��gar�� dans cette cave humide o�� elle priait, tombait sur sa nuque ros��e et sur une magnifique tresse de cheveux d'un blond pale, presque blanchatre, roul��e et serr��e autour d'un petit b��guin de velours rouge brod�� d'or fan��, et garni de dentelle noire, �� la mode du pays. Elle ��tait haute en couleur, malgr�� le ton fade de sa chevelure. Le bleu tranch�� de ses yeux paraissait plus brillant sous ses longs cils d'or mat tirant sur l'argent. Son profil trop court avait des courbes d'une finesse et d'une ��nergie extraordinaires.
--Allons, L��once, ne vous oubliez pas trop �� la regarder, dit Sabina �� son compagnon, qui ��tait comme p��trifi�� devant la villageoise, c'est de moi seule qu'il faut ��tre occup�� aujourd'hui; si vous avez une distraction, je suis perdue, je m'ennuie.
--Je ne pense qu'�� vous en la regardant. Regardez-la aussi. Il faut que vous compreniez cela.
--Cela? c'est la foi aveugle et stupide, c'est le pass�� qui vit encore, c'est le peuple. C'est curieux pour l'artiste, mais moi je suis po?te, et il me faut plus que l'��trange, il me faut le beau... Cette petite est laide.
--C'est que vous n'y comprenez rien. Elle est belle selon le type rare auquel elle appartient.
--Type d'Albinos.
--Non! c'est la couleur de Rubens, avec l'expression aust��re des vierges du Bas-Empire. Et l'attitude?
--Est raide comme le dessin des ma?tres primitifs. Vous aimez cela?
--Cela a sa grace, parce que c'est na?f et impr��vu. La Madeleine de Canova pose, les vierges de la Renaissance savent qu'elles sont belles; les mod��les primitifs sont tout d'un jet, tout d'une pi��ce, on pourrait dire tout d'une venue, comme la pens��e qui les fit ��clore.
--Et qui les p��trifia... Tenez, elle a fini sa pri��re; parlez-lui, vous verrez qu'elle est b��te malgr�� l'expression de ses traits.
--Mon enfant, dit L��once �� la jeune fille, vous paraissez tr��s-pieuse. Y a-t-il quelque d��votion particuli��re attach��e �� cette chapelle?
--Non, Monseigneur, r��pondit la jeune fille en faisant la r��v��rence; mais je me cache ici pour prier, afin que M. le cur�� ne me voie point.
--Et que craignez-vous des regards de M. le cur��? demanda lady G...
--Je crains qu'il ne me chasse, reprit la montagnarde; il ne veut plus que je rentre dans l'��glise, sous pr��texte que je suis en ��tat de p��ch�� mortel.
Elle fit cette r��ponse avec tant d'aplomb et d'un air �� la fois si ing��nu et si d��cid��, que Sabina ne put s'emp��cher de rire.
--Est-ce que cela est vrai? lui demanda-t-elle.
--Je crois que M. le cur�� se trompe, r��pondit la jeune fille, et que Dieu voit plus clair que lui dans mon coeur.
L��-dessus elle fit une nouvelle r��v��rence et s'��loigna rapidement, car le cur��, qui avait fini de se d��pouiller de ses habits sacerdotaux, paraissait au fond de la nef.
Interrog�� par nos deux voyageurs, le cur�� jeta un regard sur la p��cheresse qui fuyait, haussa les ��paules, et dit d'un ton courrouc��:
--Ne faites pas attention �� cette vagabonde, c'est une ame perdue.
--Cela est fort ��trange, dit Sabina; sa figure n'annonce rien de semblable.
--Maintenant, dit le cur��, je suis aux ordres de Vos Seigneuries.
On remonta en voiture, et apr��s quelques mots de conversation g��n��rale, le cur�� demanda la permission de lire son br��viaire, et bient?t il fut si absorb�� par cette d��votion, que L��once et Sabina se retrouv��rent comme en t��te-��-t��te. Par ��gard pour le bonhomme, qui ne paraissait pas entendre l'anglais, ils caus��rent dans cette langue afin de ne lui point donner de distractions.
--Ce pr��tre intol��rant, esclave de ses paten?tres, ne nous promet pas grand plaisir,
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