Souvenirs entomologiques - Livre I | Page 2

Jean-Henri Fabre
�� qui est d��volue la haute mission d'expurger le sol de ses immondices. On ne se lasserait pas d'admirer la vari��t�� d'outils dont ils sont munis, soit pour remuer la mati��re stercorale, la d��pecer, la fa?onner, soit pour creuser de profondes retraites o�� ils doivent s'enfermer avec leur butin. Cet outillage est comme un mus��e technologique, o�� tous les instruments de fouille seraient repr��sent��s. Il y a l�� des pi��ces qui semblent imit��es de celles de l'industrie humaine; il y en a d'autres d'un type original, o�� nous pourrions nous- m��mes prendre mod��le pour de nouvelles combinaisons.
Le Copris espagnol porte sur le front une vigoureuse corne, pointue et recourb��e en arri��re, pareille �� la longue branche d'un pic. �� semblable corne, le Copris lunaire adjoint deux fortes pointes taill��es en soc de charrue, issues du thorax; et entre les deux, une protub��rance �� ar��te vive faisant office de large racloir. Le Bubas Bubale et le Bubas Bison, tous les deux confin��s aux bords de la M��diterran��e, sont arm��s sur le front de deux robustes cornes divergentes, entre lesquelles s'avance un soc horizontal fourni par le corselet. Le Minotaure Typh��e porte sur le devant du thorax, trois pointes d'araire, parall��les et dirig��es en avant, les lat��rales plus longues, la m��diane plus courte. L'Onthophage taureau a pour outil deux pi��ces longues et courbes qui rappellent les cornes d'un taureau; l'Onthophage fourchu a pour sa part une fourche �� deux branches, dress��es d'aplomb sur sa t��te aplatie. Le moins avantag�� est dou��, tant?t sur la t��te, tant?t sur le corselet, de tubercules durs, outils obtus que la patience de l'insecte sait toutefois tr��s-bien utiliser. Tous sont arm��s de la pelle, c'est-��-dire qu'ils ont la t��te large, plate et �� bord tranchant; tous font usage du rateau, c'est-��-dire qu'ils recueillent avec leurs pattes ant��rieures dentel��es.
Comme d��dommagement �� sa besogne orduri��re, plus d'un exhale l'odeur forte du musc, et brille sous le ventre du reflet des m��taux polis. Le G��otrupe hypocrite a par dessous l'��clat du cuivre et de l'or; le G��otrupe stercoraire a le ventre d'un violet am��thyste. Mais, en g��n��ral, leur coloration est le noir. C'est aux r��gions tropicales qu'appartiennent les bousiers splendidement costum��s, v��ritables bijoux vivants. Sous les bouses de chameau, la Haute-��gypte nous pr��senterait tel Scarab��e qui rivalise avec le vert ��clatant de l'��meraude; la Guyane, le Br��sil, le S��n��gal, nous montreraient tels Copris d'un rouge m��tallique, aussi riche que celui du cuivre, aussi vif que celui du rubis. Si cet ��crin de l'ordure nous manque, les bousiers de nos pays ne sont pas moins remarquables par leurs moeurs.
Quel empressement autour d'une m��me bouse! Jamais aventuriers accourus des quatre coins du monde n'ont mis telle ferveur �� l'exploitation d'un placer californien. Avant que le soleil soit devenu trop chaud, ils sont l�� par centaines, grands et petits, p��le-m��le, de toute esp��ce, de toute forme, de toute taille, se hatant de se tailler une part dans le gateau commun. Il y en a qui travaillent �� ciel ouvert, et ratissent la surface; il y en a qui s'ouvrent des galeries dans l'��paisseur m��me du monceau, �� la recherche des filons de choix; d'autres exploitent la couche inf��rieure pour enfouir sans d��lai leur butin dans le sol sous- jacent; d'autres, les plus petits, ��miettent �� l'��cart un lopin ��boul�� des grandes fouilles de leurs forts collaborateurs. Quelques-uns, les nouveaux venus et les plus affam��s sans doute, consomment sur place; mais le plus grand nombre songe �� se faire un avoir qui lui permette de couler de longs jours dans l'abondance, au fond d'une s?re retraite. Une bouse, fra?che �� point, ne se trouve pas quand on veut au milieu des plaines st��riles du thym; telle aubaine est une vraie b��n��diction du ciel; les favoris��s du sort ont seuls un pareil lot. Aussi les richesses d'aujourd'hui sont-elles prudemment mises en magasin. Le fumet stercoraire a port�� l'heureuse nouvelle �� un kilom��tre �� la ronde, et tous sont accourus s'amasser des provisions. Quelques retardataires arrivent encore, au vol ou p��destrement.
Quel est celui-ci qui trottine vers le monceau, craignant d'arriver trop tard? Ses longues pattes se meuvent avec une brusque gaucherie, comme pouss��es par une m��canique que l'insecte aurait dans le ventre; ses petites antennes rousses ��panouissent leur ��ventail, signe d'inqui��te convoitise. Il arrive, il est arriv��, non sans culbuter quelques convives. C'est le Scarab��e sacr��, tout de noir habill��, le plus gros et le plus c��l��bre de nos bousiers. Le voil�� attabl��, c?te �� c?te avec ses confr��res, qui, du plat de leurs larges pattes ant��rieures, donnent �� petits coups la derni��re fa?on �� leur boule, ou bien l'enrichissent d'une derni��re couche avant de se retirer et d'aller jouir en paix du fruit de leur travail. Suivons dans toutes ses phases la confection de la fameuse boule.
Le chaperon, c'est-��-dire le bord de la t��te, large
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