la verité, & leur reputation, de propos si deliberé, que de dire qu'ils ont veu ce qu'ils n'ont pas veu. Quoy qu'il en soit, je feray comme Saluste; & diray, soit de Blefkenius, soit d'Angrimus Jonas, soit du Docteur Vormius, soit de tous ceux dont je vous alegueray ce que j'ay leu, & oüy dire; car je n'en puis parler que pour avoir leu, & oüy dire: Fides penes auctores sit.
II. L'Islande est une Isle de l'Ocean Deucaledonien, a 13. degrez, 30. minutes de longitude, & a 65. degrez 44. minutes de latitude. Cete situation est prise, sur l'Evesché Septàntrional de l'Isle, nommé, Hole, qu'Angrimus Jonas raporte dans sa Crimogée Islandique; où il dit, qu'il la tient de l'Evesque mesme de Hole, Gundebrand de Thorlac, son compatriote, & intime amy, auditeur de Ticho-Brahé, & grand Astrologue. Les limites de l'Islande sont; du Levant, la mer Hyperborée; du Midy, l'Ocean Deucaledonien; le Couchant regarde le Groenland, vers le cap Farvel; & le Nort est exposé à la mer glacée du mesme Groenland. La longueur de l'Isle, s'estànd du Levant au Couchant, en autant de chemin qu'un homme en peut faire en vint jours. Et sa largeur du Midy au Nort, à l'endroit le plus large, en autant de pa?s, qu'un homme en peut traverser en quatre jours. Le mesme Angrimus de qui je tiens cete mesure, ne sait, si ces journées sont d'un homme à cheval, ou à pied.
III. Pour bien juger de l'estàndu? de l'Islande; on croit qu'elle est deux fois plus grande que la Sicile. On conno?tra aussi par la Sfere, & par l'elevation que j'ay raportée de cete Isle, que ce que l'on en dit est veritable: Qu'au Solstice d'Esté, & tant que le Soleil est dans les signes de Gemini, & de l'Escrevice; c'est à dire, deux mois durant; le Soleil ne se couche pas tout entier sous l'horison de l'Islande Septàntrionale; Que l'on en voit toujours quelque peu, & la moitié aux jours les plus longs depuis les dix heures du soir, jusques à deux heures du matin, qu'il se leve tout a fait. D'où, il s'ensuit, qu'au Solstice d'hyver, & tant que le Soleil est dans les signes du Sagittaire, & du Capricorne; c'est à dire, deux mois durant; le Soleil ne se leve pas tout entier sur le mesme horison; & qu'il n'en paro?t que la moitié, aux jours les plus courts, depuis les dix heures du matin, jusques à deux heures apres midy, qu'il se couche tout à fait.
IV. Cete Isle est nommée Islande, à cause de la blancheur de ses glaces. On dit qu'elle a esté fertile autrefois; qu'elle a porté de beaux bleds, & qu'elle a esté couverte de grans bois, dont les Islandois batissoient de beaux, & grans navires; & dont il se trouve ancore aujourd'huy de grandes & profondes racines, aux mesmes lieux où estoient jadis leurs forests, mais brulées & noires comme de l'ebene. L'Islande est maintenant si infertile, que le bled n'y sauroit na?tre. Et il n'y croist pas un arbre, quel qu'il soit, que du petit & meschant bouleau. Si bien que l'on y mourroit de faim & de froit, si l'on n'y aportoit des farines des provinces voisines: Et si les glaces qui se destachent au mois de May des terres qui sont ancore plus proches du Pole, ne leur portoient une si grande quantité de bois, qu'ils en ont sufisamment pour se chaufer, & pour se faire des maisons, à la mode des autres peuples du Nort. Ils se servent outre cela, pour l'un & pour l'autre, d'os de balene, & d'autres grans poissons. Comme aussi de deux sortes de tourbes pour se chaufer; l'une, faite de gazons, qui est le Cespes bituminosus; & l'autre, que l'on tire de la terre, comme d'une carriere, qu'Angrimus Jonas apele Glebam fossilem; que l'on fait cuire au Soleil, & qui br?le, quand elle est seche, comme le gazon. L'une & l'autre espece de tourbe, tesmoigne assez le vice de la terre, qui la rànd incapable de porter ni bled, ni arbre. Ces glaces qui abordent en Islande des terres Septàntrionales, sont quelques fois chargées d'arbres prodigieusement grans. Et les Annales Islandiques font màntion d'un entr'autres, qui avoit soixante-trois coudées de longueur, & sept de grosseur.
V. Lors que ces glaces destachées du Nort, sont jointes à celes de l'Islande, les habitans de l'Isle courent à la queste du bois, & à la chasse de quantité de bestes, qui s'estant trop avant engagées dans la mer glacée, voguent dessus, & abordent où les glaces les portent: comme des Renards, roux & blancs; des Lo?s Cerviers; des Ours blancs & noirs; & des Licornes. La grande & precieuse corne que le Roy de Danemark garde à Frederisbourg, qui est son Fontaine-bleau, est d'une Licorne (à ce que l'on ma dit)

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