par suite nécessaire des passions & de la foiblesse
humaine, il y a encore, après ce parti pris, des fréquentations de Blancs
avec des Négresses, les cas deviendront beaucoup plus rares, les enfans
qui en proviendront, devenant par leur état de bâtards libres, les enfans
de l'État, seront instruits & élevés par les soins de l'Administration, à
défaut de ceux de leurs pères naturels: ils donneront pour la plupart des
sujets aux divers métiers & talens utiles, à la Culture, à la Navigation;
on les verra s'établir convenablement avec des femmes de même espèce,
dont l'éducation auroit été plus soignée dans ces vues.
Cette proposition étant le produit de mes propres réflexions, j'ai trouvé
qu'un ancien Administrateur des Colonies dont la mémoire est
considérée avoit eu cette même idée: je l'ai trouvée encore dans un
excellent Auteur Anglois, dont je rapporterai ici un passage.
«Je ne vois pas qu'il puisse résulter aucun inconvénient de
l'affranchissement de tout enfant mulâtre: on peut objecter à cette
proposition, qu'elle tendroit à encourager le commerce illégitime des
Blancs avec les Négresses, dont je viens de montrer les mauvais effets.
Je réponds que l'affranchissement des Mulâtres feroit bien plutôt dans
le cas de réprimer cette fréquentation, par la raison que, dans la position
actuelle, les Habitans voient avec indifférence naître des Mulâtres sur
leurs habitations, bien assurés que ce seront pour eux des esclaves de
plus pour leurs travaux, ou qu'ils en retireront un bon prix, en les
vendant à leurs pères naturels, qui le plus souvent cherchent à les
racheter. J'ajouterai qu'au contraire ces habitans chercheront le plus
qu'ils pourront à décourager les fréquentations des Blancs avec leurs
Négresses, dès qu'ils verront que leur intérêt ne s'y trouve pas; &
qu'alors ils emploieront tous leurs efforts pour multiplier sur leurs
possessions, la race noire sans mélange».
QUATRIEME MOYEN.
_Établissement d'une Régie humaine & uniforme dans les Habitations._
L'adoption des trois Moyens précédens, tendant évidemment au bon
ordre des Colonies, à leur sûreté & à l'augmentation de leur population,
ne fera rien perdre à aucun de leurs propriétaires.
Laissant subsister toutes les habitations dans leurs travaux &
Manufactures actuelles, avec la police qui convient aux divers Atteliers
qui les composent; il faudroit que l'on s'occupât sérieusement d'y établir
par-tout avec uniformité, une législation bien réglée & bien raisonnée
qui n'auroit plus rien d'arbitraire, & par laquelle on assureroit l'ordre
des travaux & l'exactitude de la discipline.
On demandera par qui sera établie cette législation? Si les Colons
(affranchis des entraves dont ils se plaignent, jouissant des droits de
Citoyens & de propriétaires) avoient des Assemblées Coloniales bien
composées, le choix de chaque Colonie; si l'Administration qui est à
leur tête avoit toujours une marche assurée constante & éclairée, il n'est
point chimérique de penser que ces Assemblées elles-mêmes
proposeroient ces Règlemens de police & cette législation humaine &
uniforme qui conviendroit à toutes les habitations, & auxquels chacun
seroit tenu de se conformer; d'où résulteroit le plus grand bien de
chacun en particulier, & celui de chaque Colonie en général.
Avant nous, les Anglois ont agité ces projets de Règlement dans leurs
Colonies: dès l'année dernière, un de leurs respectables habitans a dit à
la Jamaïque sur ce sujet, ces paroles mémorables: «Nous avons le
pouvoir d'augmenter le bonheur de 250 mille hommes dont le travail
nous procure notre subsistance journalière; nous avons la faculté de
former pour ainsi dire une nouvelle création: quel objet plus noble
pourra jamais échauffer notre zèle, & l'inclination naturelle qui nous
porte vers la bienfaisance? En considérant même les choses
relativement à notre intérêt personnel, il est bien certain que l'homme
humain est encore le meilleur politique: ainsi en cédant à l'impulsion de
notre coeur, nous ajouterons à la prospérité de nos possessions,
l'approbation des hommes, & les bénédictions du Ciel».
C'est aussi l'année dernière que les Habitans de la Grenade ont établi
dans leur Assemblée Coloniale, des Règlemens de police intérieure, &
une législation en faveur des Esclaves, avec ce préambule bien sage de
leur acte du 4 Novembre 1788. «Que la nécessité de l'importation des
Nègres cessera du moment où ils seront traités avec humanité, où ils ne
seront plus accablés par les travaux excessifs, & où on aura égard aux
loix de la nature dans l'union des sexes.
«Comme les loix qui ont été jusqu'à présent promulguées pour la
protection des Esclaves, ont été trouvées insuffisantes; & comme
l'humanité, ainsi que l'intérêt de la Colonie, exigent de rendre
l'esclavage supportable, autant qu'il sera possible; afin de contribuer à
la population des Nègres, seul moyen de supprimer avec le tems la
nécessité de leur importation des côtes d'Afrique.
«Et vu qu'on ne sauroit atteindre un but aussi désirable qu'en fixant des
bornes raisonnables au pouvoir des Maîtres, & des personnes chargées
de surveiller les esclaves, soit en les
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