Réflexions sur le sort des Noirs dans nos colonies | Page 7

Daniel Lescallier
à la Culture, à la Navigation; on les verra s'établir convenablement avec des femmes de même espèce, dont l'éducation auroit été plus soignée dans ces vues.
Cette proposition étant le produit de mes propres réflexions, j'ai trouvé qu'un ancien Administrateur des Colonies dont la mémoire est considérée avoit eu cette même idée: je l'ai trouvée encore dans un excellent Auteur Anglois, dont je rapporterai ici un passage.
?Je ne vois pas qu'il puisse résulter aucun inconvénient de l'affranchissement de tout enfant mulatre: on peut objecter à cette proposition, qu'elle tendroit à encourager le commerce illégitime des Blancs avec les Négresses, dont je viens de montrer les mauvais effets. Je réponds que l'affranchissement des Mulatres feroit bien plut?t dans le cas de réprimer cette fréquentation, par la raison que, dans la position actuelle, les Habitans voient avec indifférence na?tre des Mulatres sur leurs habitations, bien assurés que ce seront pour eux des esclaves de plus pour leurs travaux, ou qu'ils en retireront un bon prix, en les vendant à leurs pères naturels, qui le plus souvent cherchent à les racheter. J'ajouterai qu'au contraire ces habitans chercheront le plus qu'ils pourront à décourager les fréquentations des Blancs avec leurs Négresses, dès qu'ils verront que leur intérêt ne s'y trouve pas; & qu'alors ils emploieront tous leurs efforts pour multiplier sur leurs possessions, la race noire sans mélange?.

QUATRIEME MOYEN.
_établissement d'une Régie humaine & uniforme dans les Habitations._
L'adoption des trois Moyens précédens, tendant évidemment au bon ordre des Colonies, à leur s?reté & à l'augmentation de leur population, ne fera rien perdre à aucun de leurs propriétaires.
Laissant subsister toutes les habitations dans leurs travaux & Manufactures actuelles, avec la police qui convient aux divers Atteliers qui les composent; il faudroit que l'on s'occupat sérieusement d'y établir par-tout avec uniformité, une législation bien réglée & bien raisonnée qui n'auroit plus rien d'arbitraire, & par laquelle on assureroit l'ordre des travaux & l'exactitude de la discipline.
On demandera par qui sera établie cette législation? Si les Colons (affranchis des entraves dont ils se plaignent, jouissant des droits de Citoyens & de propriétaires) avoient des Assemblées Coloniales bien composées, le choix de chaque Colonie; si l'Administration qui est à leur tête avoit toujours une marche assurée constante & éclairée, il n'est point chimérique de penser que ces Assemblées elles-mêmes proposeroient ces Règlemens de police & cette législation humaine & uniforme qui conviendroit à toutes les habitations, & auxquels chacun seroit tenu de se conformer; d'où résulteroit le plus grand bien de chacun en particulier, & celui de chaque Colonie en général.
Avant nous, les Anglois ont agité ces projets de Règlement dans leurs Colonies: dès l'année dernière, un de leurs respectables habitans a dit à la Jama?que sur ce sujet, ces paroles mémorables: ?Nous avons le pouvoir d'augmenter le bonheur de 250 mille hommes dont le travail nous procure notre subsistance journalière; nous avons la faculté de former pour ainsi dire une nouvelle création: quel objet plus noble pourra jamais échauffer notre zèle, & l'inclination naturelle qui nous porte vers la bienfaisance? En considérant même les choses relativement à notre intérêt personnel, il est bien certain que l'homme humain est encore le meilleur politique: ainsi en cédant à l'impulsion de notre coeur, nous ajouterons à la prospérité de nos possessions, l'approbation des hommes, & les bénédictions du Ciel?.
C'est aussi l'année dernière que les Habitans de la Grenade ont établi dans leur Assemblée Coloniale, des Règlemens de police intérieure, & une législation en faveur des Esclaves, avec ce préambule bien sage de leur acte du 4 Novembre 1788. ?Que la nécessité de l'importation des Nègres cessera du moment où ils seront traités avec humanité, où ils ne seront plus accablés par les travaux excessifs, & où on aura égard aux loix de la nature dans l'union des sexes.
?Comme les loix qui ont été jusqu'à présent promulguées pour la protection des Esclaves, ont été trouvées insuffisantes; & comme l'humanité, ainsi que l'intérêt de la Colonie, exigent de rendre l'esclavage supportable, autant qu'il sera possible; afin de contribuer à la population des Nègres, seul moyen de supprimer avec le tems la nécessité de leur importation des c?tes d'Afrique.
?Et vu qu'on ne sauroit atteindre un but aussi désirable qu'en fixant des bornes raisonnables au pouvoir des Ma?tres, & des personnes chargées de surveiller les esclaves, soit en les obligeant à leur fournir le logement, la nourriture & le vêtement d'une maniere convenable, soit en leur procurant la connoissance & l'instruction de la Religion Chrétienne, en s'occupant essentiellement de la perfection des moeurs, en les engageant à contracter des mariages légitimes, & en les y protégeant, & en respectant les droits de cet Etat. Pour les raisons ci-dessus spécifiées, etc.?
Sans donner le détail des Règlemens, qui sont la suite de cet acte colonial, ni exposer ici de ce qu'on pourroit faire de mieux à cet égard,
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