patron lui-m��me de l'��tablissement qui nous servit.
Pour dire quelque chose:
--Alors, on peut apporter son manger? dis-je.
--Parfaitement, monsieur, le monde sont libre d'apporter leur manger.
--Et leur boire?
--Ah! ?a non, par exemple! Si le monde apportaient leur manger et leur boire, alors, moi, avec quoi que je me les calerais? Avec des briques?
--C'est trop juste.
--Il y a bien, parbleu, des gens qui ont le culot d'apporter leur vin, leur saint-galmier, leur cognac et tout le tremblement. Mais, moi, je n'entends pas de cette oreille-l��; je leur fais payer un droit de bouchon de dix sous par bouteille introduite dans mon ��tablissement.
--C'est un peu cher.
--Si ils ne sont pas contents, ils n'ont qu'�� ne pas revenir.
�� ce moment, un homme et une femme, cette derni��re charg��e d'un b��b��, s'install��rent �� une table du Rendez-vous des Rigolos.
L'homme demanda une chopine �� cinquante et deux verres.
Pendant qu'ils buvaient, la femme allaita l'enfant.
--Patron, cria l'homme d��salt��r��, payez-vous!
Et il jeta une pi��ce d'un franc sur la table.
--?a fait le compte, r��pondit le patron.
--Comment, ?a fait le compte? Mais je vous donne vingt sous!
--Eh bien! justement, une chopine cinquante, plus cinquante pour le bouchon de votre petit jeune homme!
Le prol��taire fit une t��te!
UNE ��TRANGE COMPLEXION
PROLOGUE
Ayant perdu, fort jeune, son p��re et sa m��re, Georges vivait avec sa vieille grand'-maman dont il ��tait la derni��re consolation, l'unique souci, la seule joie.
I
Or, un matin, Georges rencontra dans la rue le type m��me du charme f��minin et de l'irr��sistible s��duction.
Georges ne songea m��me pas �� r��sister: abandonnant son itin��raire, il suivit la jeune personne jusqu'au moment o�� elle s'engouffra dans un ��tablissement dit de bouillon.
Une minute ne s'��coula certainement point avant que Georges ne p��n��trat lui-m��me dans le restaurant.
D��j��, la jeune personne ne s'y trouvait plus mais, bient?t, elle r��apparaissait, affubl��e d'un joli petit bonnet blanc et d'un tablier de m��me couleur.
Georges (qui n'est pas une b��te) conclut que la jeune femme servait comme bonne dans la maison.
S'asseyant �� l'une des tables dont le service semblait d��volu �� la petite, il commanda, quoi donc! un bouillon, naturellement.
... Abr��geons.
D��s lors, le coeur de notre pauvre Georges fut pris dans le pire des engrenages.
Vingt fois par jour, il revenait s'asseoir �� l'une des tables d'Eug��nie (car vous avez devin��, n'est-ce pas, qu'elle s'appelait Eug��nie) pour absorber mille aliments divers qu'il s'appliquait �� choisir aussi l��gers que possible, mais dont l'ensemble ne laissait point que de le gaver tout de m��me, et solidement.
Ce qu'on peut appeler se nourrir de pr��textes.
Aussi, c'��tait, �� chaque repas familial, des d��solations sans tr��ve:
--Tu ne manges pas, mon pauvre petit!
--Je n'ai pas faim, bonne maman.
--Il faut se forcer, mon ch��ri.
--?a me ferait mal.
--Le plus dr?le, c'est que tu ne maigris pas, depuis le temps que tu ne manges plus... Tu n'as pas mal quelque part?
--Mais non, bonne maman.
--Tu dors bien?
--Comme le peintre Luigi Loir lui-m��me.
--Ah! tu as une ��trange complexion!
Et comme, en somme, Georges conservait sa bonne mine et sa belle humeur, la vieille grand'maman ne s'inqui��tait pas outre mesure de cet inexplicable manque d'app��tit.
II
Un jour, la petite bonne du restaurant dit �� Georges:
--Il y a du nouveau.
--Ah!
--Je quitte la bo?te.
--Ah!
--Oui, on m'a offert une place dans un magasin du boulevard o�� l'on vend un ap��ritif grec, le Kina Passonrigolo. C'est moi qui tiendrai le comptoir de d��gustation. Vous me viendrez voir?
Le reste, vous le devinez! (Vous avez bien devin�� que la petite s'appelait Eug��nie.)
Georges rempla?a son absorption d'aliments solides par une ��gale consommation d'ap��ritif breuvage.
Et sa bonne vieille grand'm��re fut radieuse de lui voir tant d'app��tit revenu!
Oui, mais voil��!
(Ou plut?t voici:)
Eug��nie, en changeant de fonction, ��galement changea d'ame. De vertueuse qu'elle ��tait, elle devint la plus lubrique des ma?tresses, et le pauvre Georges en vit de dures!
(Eug��nie aussi, comme de juste, mais n'insistons pas, rapport �� notre client��le de jeunes filles.)
Georges maigrit, maigrit, maigrit!
Et la bonne vieille maman disait tout ��plor��e:
--Je n'y comprends rien, mon pauvre Georges! Tant que tu ne mangeais pas, tu avais une mine superbe, et maintenant que tu d��vores, tu as l'air d'un d��terr��! Quelle dr?le de complexion!
��PILOGUE
(Pour rassurer les familles)
Un beau jour, Georges s'aper?ut qu'Eug��nie le trompait avec le Grec commanditaire du Kina Passonrigolo. Il plaqua froidement l'infame et se maria avec une jeune fille qui ne le poussa ni �� la suralimentation, ni �� l'extr��me ap��ritivit��, ni �� autre chose itou, comme disent les villageois.
Et la pauvre vieille grand'maman fut joliment contente.
Maintenant, elle peut mourir en paix, dit-elle.
Sans empressement, d'ailleurs.
SCEPTIQUE ENFANCE
--Eh bien! mon vieux Georges?
--Eh bien! mon vieux Fifi?
L'appellation de ?vieux Georges? d��signe un jeune gentleman, mon filleul, lequel cingle all��grement vers son huiti��me printemps.
Le ?vieux Fifi? n'est autre que l'honorable signataire de ces propres lignes.
--Et le niveau des ��tudes?
--?a se maintient �� peu pr��s... ?a ne casse rien, mais ?a se maintient.
--�� quelle branche de la science te voues-tu plus particuli��rement?
--Je n'ai pas de pr��f��rence, tu sais. C'est bien le m��me
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