Paris nouveau et Paris futur | Page 9

Victor Fournel
degr��s. Il y a des maisons, sur les flancs du boulevard Malesherbes, qui sont perch��es dans la nue, et aux extr��mit��s de la rue de Rivoli, qui sont juch��es sur des trottoirs de huit �� dix marches; il y en a eu longtemps, de chaque c?t�� du boulevard de S��bastopol (il en reste quelques-unes) qui semblaient baties sous terre et extraites des fouilles d'un nouveau Pomp��i: le sol ��tait �� la hauteur du deuxi��me ��tage. Au coin de la rue Monsieur-le-Prince et de la place Saint-Michel, il faut escalader une dizaine de degr��s pour arriver aux rez-de-chauss��e de droite, et en descendre presque autant pour arriver �� ceux de gauche. �� la jonction de la rue Victor-Cousin avec la rue Soufflot, on trouve d'un c?t�� des ravins, de l'autre des montagnes, qui communiquent ensemble par un syst��me de talus et d'escaliers compliqu��s. En face du Panth��on, on montait au Luxembourg comme �� un grenier, et l'on y monte encore comme �� un entresol; ailleurs, on descend comme dans une cave. Le quai de la M��gisserie et certaines ruelles adjacentes, les rues du March��-Saint-Jean et de la Verrerie, le confluent de la rue de la Harpe avec le boulevard de S��bastopol, sur beaucoup de points les abords du boulevard Saint-Germain et de la rue des ��coles, offrent le spectacle de quartiers pris d'assaut. La rue Baillif n'arrive �� joindre le Palais-Royal que par un escalier de quinze marches. Les maisons de la rue Bellefonds sont camp��es sur des escarpements sauvages et dominent de dix m��tres le square Montholon, o�� l'on descend comme dans un entonnoir. La rue Marbeuf est divis��e dans sa longueur en deux parties parall��les, dont l'une surplombe de quinze pieds et forme cul-de-sac. Les alentours du rond-point de l'��toile, l'avenue de Saint-Cloud, le quartier Beaujon, d��fient toute description: il est prudent de faire son testament avant de s'aventurer dans cet inextricable d��dale tout h��riss�� de ravins, de contre-forts, d'��chelles et d'escaliers �� pic[4]. La travers��e de la B��r��sina n'est qu'une plaisanterie pr��s de la travers��e de la rue du Bel-Air, et Dieu sait ce qui sortira de ce provisoire et combien de temps il doit durer. C'est la fr��n��sie, l'ivresse, la folie furieuse de la ligne droite; c'est le chaos math��matique. Sur plus d'un point, M. le pr��fet de la Seine a trouv�� moyen d'arriver �� la confusion par l'exc��s et l'abus de la g��om��trie. Au rebours de Caussidi��re, il lui est arriv�� de faire du d��sordre avec de l'ordre.
[Note 4: Voir, �� d��faut des quartiers eux-m��mes, la s��rie d'articles extr��mement curieux publi��s par M. de Co?tlogon, dans la Gazette de France, en 1864 et 1865.]
Dans la partie sup��rieure du boulevard Saint-Denis, les tranch��es entreprises pour le passage du boulevard Magenta et les travaux qui en ont ��t�� la suite avaient produit les r��sultats les plus inou?s. Ce quartier semblait avoir ��t�� boulevers�� par un cataclysme dont on a cherch�� �� r��gulariser les traces sans pouvoir les faire enti��rement dispara?tre. Ici, c'��tait un trottoir bord�� de balustrades qu'on avait m��nag�� devant quelques boutiques, et qui filait en terrasse �� hauteur de premier ��tage, absolument comme un balcon; l��, c'��taient des maisons ��tag��es de haut en bas, et qu'on reprenait en sous-oeuvre pour faire des boutiques �� la place des caves; ailleurs, un pont suspendu traversant la rue et servant de voie d'acc��s au bureau d'une fonderie, qui anciennement ��tait au rez-de-chauss��e et se trouvait maintenant au premier, sans avoir chang�� de place; ailleurs, des portes coch��res qui s'ouvraient �� deux battants �� hauteur d'entresol. Le boulevard Bonne-Nouvelle, pr��s la porte Saint-Denis, et surtout le boulevard Saint-Martin, font l'effet d'une gorge sombre entre deux montagnes. En s'accoudant aux garde-fous et en se penchant au-dessus du puits de l'ab?me, on a le vertige �� voir tourbillonner sous ses pieds cette flotte de fiacres et d'omnibus dans une mer de macadam. En Suisse, sur le mont Blanc, ce serait pittoresque; �� Paris, devant le th��atre de M. M��lingue, c'est fort laid, et de plus c'est une contradiction. Comment se fait-il qu'on n'ait point abattu, afin de niveler le sol, ces quelques douzaines de maisons juch��es en observatoire �� droite et �� gauche de la chauss��e, comme pour faire la nique �� l'architecture ��galitaire du nouveau Paris? Est-ce respect humain?--Bah!--Est-ce ��conomie?--Fi donc!--C'est tout simplement que M. Haussmann n'��tait pas encore pr��fet de la Seine.

III
L'EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILIT�� PUBLIQUE.
LA VILLE DES NOMADES
En ce temps-l��, l'expropriation pour cause d'utilit�� publique avait d��j�� fait son chemin; elle r��gnait, mais n'��tait point arriv��e pourtant �� la pleine possession de la redoutable dictature qu'elle exerce aujourd'hui. Les auteurs de cette loi ne pr��voyaient gu��re le cruel abus qu'on en ferait un jour. Elle est devenue entre les mains de l'autorit�� sp��ciale une sorte de b��lier aveugle, qui frappe comme un sourd; une catapulte inflexible et sauvage, pouss��e
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