par la distinction des personnes qui la fréquentaient,
Christine de Pisan y développa par une instruction soignée, par une
éducation empreinte du meilleur ton et des sentiments les plus
recherchés, les précieuses dispositions dont la nature avait si
heureusement doté son intelligence supérieure. A peine fut-elle
parvenue à sa quinzième année (1378) que les charmes de son esprit et
de sa personne la firent rechercher d'un grand nombre de
gentilshommes, mais son père fixa son choix sur un jeune homme d'une
bonne maison de Picardie, Etienne du Castel, dont les qualités et le
mérite tenaient lieu des avantages de la fortune.
L'avenir qui semblait s'ouvrir plein de promesses heureuses pour ces
jeunes époux, réservait cependant à Christine de dures épreuves; les
premières années de son mariage furent le point de départ de ses
infortunes et de ses malheurs. Le roi mourut le 16 septembre 1380.
Thomas de Pisan, déchu de son crédit et éloigné de la Cour, ne survécut
que quelques années à son maître et à son bienfaiteur. Étienne du Castel,
par sa valeur personnelle et par l'influence que lui donnait sa charge de
secrétaire du roi, continuait encore les traditions de la famille de son
beau-père, lorsqu'il fut emporté lui-même par une maladie contagieuse
à l'âge de 34 ans (1389). Christine qui n'avait que 25 ans reste veuve
avec trois enfants. Plongée dans sa profonde douleur elle est encore
attristée par de nombreux procès avec des débiteurs de mauvaise foi et
par des pertes d'argent qui en furent la conséquence; c'est alors qu'elle
demande au travail, à la poésie, à la littérature, la consolation et l'oubli
de ses peines. Elle commence une vie nouvelle, entièrement consacrée
à l'étude, mais plus heureuse en douces satisfactions. Son talent se
révélera d'abord dans des poésies légères, pleines de charme et de
saveur, jusqu'au jour où l'essor de son génie l'élèvera à la hauteur des
grandes compositions qui ont immortalisé son nom.
DESCRIPTION DES MANUSCRITS
Christine de Pisan, que sa situation précaire avait engagée à tirer parti
de son instruction et de son remarquable talent, devait rechercher avec
empressement toute occasion destinée à lui procurer quelques
ressources. Aussi fit-elle exécuter un grand nombre de copies de ses
oeuvres, afin de les offrir aux princes et aux riches seigneurs auxquels
leur amour pour les lettres et la réputation de l'auteur faisaient un
devoir d'apprécier ces gracieux hommages à leur juste valeur. Cette
multiplicité de manuscrits rend aujourd'hui plus lourde et plus difficile
la tâche que doit s'imposer tout éditeur consciencieux. En raison de
cette considération nous avons cru préférable de préparer pour chaque
tome une préface donnant la liste et l'appréciation des manuscrits
renfermant les oeuvres que nous devons publier.
Notre riche Bibliothèque nationale possède plusieurs recueils contenant
les poésies dont nous offrons le texte dans ce premier volume.
_A¹_.--(Bibl. Nat. F. français 835, 606, 836 et 605). Ces quatre
volumes forment le ms. qui doit servir de base à cette édition,
l'exécution en fut préparée et surveillée par Christine elle-même qui le
destinait au duc de Berry; il est ainsi décrit dans les Inventaires publiés
par M. L. Delisle[1].
[Note 1: _Le Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque nationale_, III,
p. 193.]
«Un livre compilé de plusieurs balades et ditiés, fait et composé par
damoiselle Cristine de Pisan, escript de lettre de court, bien historié et
enluminé, lequel Monseigneur a acheté de la dite damoiselle 200
escus.--Tous mes bons jours.--50 liv. (Évaluation faite à la requête des
exécuteurs testamentaires du duc
de Berry).--_Inventaire de l'année
1413, Arch. nat. KK
258._--_Inventaire de l'année 1416, Bibl.
Sainte-Geneviève, mss. L. 54 f._--Baillé à la Duchesse de
Bourbonnais».
M. L. Delisle n'a pas rapporté cette mention au ms. de la Bibl. nat. qui
porte actuellement le n° 835 du fonds français parce qu'une interversion
de feuillets l'a empêché d'établir la concordance du premier vers du
second feuillet, «Tous mes bons jours.»
Cette identification reconnue, nous devons en outre faire remarquer que
le ms. de la bibliothèque du duc de Berry est aujourd'hui divisé en
quatre fragments portant les numéros 835, 606, 836 et 605. Les oeuvres
que renferment ces quatre tomes offrent une numérotation continue,
ainsi qu'il suit:
Le ms. 835 contient les articles 1 à 13:
1 Cent Ballades.
2 Virelais.
3 Ballades «d'estrange façon».
4 Lais.
5 Rondeaux.
6 Jeux à vendre.
7 Ballades de divers propos.
8
Épitre au dieu d'Amours.
9 Complainte amoureuse.
10 Le Débat de
deux Amants.
11 Le Dit des trois jugements amoureux.
12 Le Dit
de Poissy.
13 Les Épitres sur le Roman de la Rose.
Le ms. 606 renferme l'art. 14:
14 L'Épitre d'Othéa.
Le ms. 836 comprend les art. 15 à 21:
15 Le Chemin de long estude.
16 Les Enseignements moraux.
17
Oraison Notre Dame.
18 Les quinze joies Notre Dame.
19 Le Dit de
la «Pastoure».
20 Oraison Notre Seigneur.
21 Le duc des vrais
amants.
Enfin le ms. 605 complète le vol. par les art. 22
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