Observations Geologiques sur les Iles Volcaniques | Page 6

Charles Darwin
à l'examen des roches
et des minéraux qu'il avait réunis. Il fut puissamment secondé dans
cette étude par le professeur William Hallows Miller, l'éminent
cristallographe et minéralogiste.
Darwin ne commença réellement à écrire son livre sur les îles
volcaniques qu'en 1843, après s'être établi dans la maison qu'il habita le
reste de sa vie, sa célèbre résidence de Down dans le Kent. Dans une
lettre du 28 mars 1843 à son ami M. Fox, il dit: «J'avance très
lentement dans la rédaction d'un livre, ou plutôt d'une brochure sur les
îles volcaniques que nous avons explorées; je n'y consacre qu'une
couple d'heures chaque jour, et encore d'une manière assez peu
régulière. C'est une besogne ingrate que d'écrire des livres dont la
publication coûte de l'argent et que personne ne lit, pas même les
géologues.»
Cette étude occupa Darwin pendant toute l'année 1843, et le livre fut
publié au printemps de l'année suivante. D'après une note de son
journal, le temps réellement consacré à la préparation de cet ouvrage
s'étendit de l'été de 1842 jusqu'en janvier 1844. Lorsqu'il fut achevé,
Darwin ne parut nullement satisfait du résultat obtenu. Il écrivait à
Lyell: «Vous m'avez fait un grand plaisir en disant que vous aviez
l'intention de parcourir mes _Iles volcaniques_; ce livre m'a coûté
dix-huit mois de travail! Et à ma connaissance, rares sont les gens qui
l'ont lu. Je sens cependant que le peu que renferme cet ouvrage, et c'est
peu de chose en effet, aura son utilité en confirmant des hypothèses
anciennes ou nouvelles, et que mon travail ne sera pas perdu.» Il
écrivait à Sir Joseph Hooker: «Je viens de terminer un petit volume sur
les îles volcaniques que nous avons explorées. J'ignore jusqu'à quel
point la géologie pure et simple vous intéresse, mais j'espère que vous

m'autoriserez à vous envoyer un exemplaire de mon ouvrage.»
Tout géologue sait combien ce livre de Darwin sur les îles volcaniques
est intéressant et suggestif. La satisfaction médiocre qu'il semble
inspirer à son auteur doit être probablement attribuée au contraste que
Darwin sentait exister entre le souvenir des vives jouissances qu'il
éprouvait lorsque, le marteau à la main, il errait dans des contrées
nouvelles et intéressantes, et la tâche lente, laborieuse et moins
conforme à ses goûts que lui imposaient la transcription et
l'arrangement de ses notes sous forme de livre.
Lorsqu'en 1874 je décrivais les anciens volcans des îles Hébrides, j'eus
fréquemment l'occasion de rappeler les observations de M. Darwin sur
les volcans de l'Atlantique, pour expliquer les faits que nous montrent,
dans nos propres îles, les restes de volcans anciens. Darwin, écrivant à
son fidèle ami Sir Charles Lyell au sujet de mon travail, lui dit: «J'ai
éprouvé une satisfaction bien vive en voyant citer mon livre sur les
volcans, je le croyais mort et oublié.»
Deux ans plus tard, en 1876, on proposa à Darwin de publier une
nouvelle édition des _Observations sur les îles volcaniques et sur
l'Amérique du Sud_. Il hésita d'abord, car il lui semblait que ces
ouvrages n'offraient plus actuellement qu'un intérêt médiocre; il me
consulta sur ce point au cours d'une des conversations que nous avions
souvent ensemble à cette époque, et j'insistai fortement auprès de lui
pour la réédition de ces livres. J'éprouvai une vive satisfaction lorsque,
se rendant à mes instances, il consentit à ce qu'ils fussent publiés sans
aucune modification du texte. Il écrit dans la préface de cette nouvelle
édition: «Par suite des progrès récents de la géologie, mes idées sur
quelques points pourront paraître un peu vieillies, mais j'ai cru
préférable de les laisser telles qu'elles ont été publiées originairement.»
Peut-être ne sera-t-il pas sans intérêt d'indiquer brièvement les
principaux problèmes géologiques sur lesquels le livre de Darwin les
Iles volcaniques a jeté une nouvelle et vive lumière. Le principal mérite
de ces recherches est d'avoir fourni des observations qui, non seulement,
présentent un haut intérêt scientifique, mais dont quelques-unes ont
permis de faire rejeter des erreurs couramment admises; d'appeler
l'attention sur des phénomènes et des considérations qui avaient été
complètement négligés par les géologues, mais qui ont exercé depuis
lors une grande influence sur la genèse des théories géologiques; et,

enfin, de faire ressortir l'importance qui s'attache à des causes faibles et
insignifiantes en apparence, mais dont quelques-unes donnent la clef de
problèmes géologiques du plus haut intérêt.
En visitant des contrées où von Buch et d'autres géologues avaient cru
trouver la preuve de la théorie des «cratères de soulèvement», Darwin
fut amené à démontrer que les faits pouvaient recevoir une
interprétation tout à fait différente. Les idées émises d'abord par le
célèbre géologue et explorateur allemand, et presque universellement
admises par ses compatriotes, avaient été soutenues par Élie de
Beaumont et par Dufrénoy, les chefs du mouvement géologique en
France. Elles étaient pourtant vigoureusement combattues par Scrope et
par
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