heure?
L'abandon de ces oiseaux ��trangers, objets de luxe dans la demeure princi��re, ��tait, du reste, tr��s en harmonie avec celui qui se faisait sentir dans le parc. La m��me malpropret�� que dans les rues de Rome, les m��mes souillures sur les fleurs que sur les pav��s de la ville ��ternelle. Cela sent le d��go?t de la vie. Je crois qu'un spleen profond d��vore ici les grandes existences. Je ne sais si elles se l'avouent, mais cela est ��crit sur les pierres de leurs maisons �� formes coquettes et sur les riantes perspectives de leurs all��es abandonn��es. Est-ce la saison encore pluvieuse et incertaine qui fait ce d��sert dans des lieux si beaux? est-ce la d��votion ou l'ennui, ou la tristesse qui retiennent �� Rome ces h?tes ingrats envers le printemps? On dit que toutes les villas sont d��laiss��es ou n��glig��es et que celle-ci est encore une des mieux entretenues. J'ai peine �� le croire.
En quittant le parc pour voir les jardins, je fus frapp�� pourtant de l'activit�� d��ploy��e par un vieux jardinier pour la r��paration d'un singulier objet de go?t horticole. Je n'ai jamais vu rien de semblable. On me dit que c'est usit�� dans plusieurs villas et que cela date de la renaissance. J'aurai de la peine �� vous expliquer ce que c'est. Figurez-vous un tapis �� dessins gigantesques et �� couleurs voyantes, ��tendu sur une terrasse qui tient tout le flanc d'une colline sous les fen��tres du palais. Les dessins sont jolis: ce sont des armoiries de famille, entour��es de guirlandes, de noeuds entrelac��s, de palmes, de chiffres, de couronnes, de croix et de bouquets. L'ensemble en est riche et les couleurs en sont vives. Mais qu'est-ce que cette mosa?que colossale, ou ce tapis fantastique ��tal��, en plein air, sur une si vaste esplanade? Il faut en approcher pour le comprendre. C'est un parterre de plantes basses, entrecoup�� de petits sentiers de marbre, de fa?ence, d'ardoise ou de brique, le tout cass�� en menus morceaux et sem�� comme des drag��es sur un surtout de table du temps de Louis XV; mais on ne marche pas dans ces sentiers, je pense, car ils sont trop durement caillout��s pour des pieds aristocratiques et trop ��troits pour des personnes d'importance. Cela ne sert uniquement qu'�� r��jouir la vue et absorbe toute la vie d'un jardinier ��m��rite. Les compartiments de chaque ��cusson ou rosace sont en fleurs faisant touffe basse et drue. Les plantes de la campagne y sont admises, pourvu qu'elles donnent le ton dont on a besoin. Une petite bordure de buis nain ou de myrte, taill��e bien court, serpente autour de chaque d��tail: c'est d'un effet bizarre et minutieux; c'est un ouvrage de patience, et toute la sym��trie, toute la recherche, toute la propret�� dont les Romains de nos jours sont susceptibles, paraissent s'��tre r��fugi��es et concentr��es dans l'entretien de cette ornementation v��g��tale et gymnoplastique.
II
LES CHANSONS DES BOIS
ET DES RUES
A VICTOR HUGO
Dans une de ses chansons, le po?te dit:
George Sand a la Gargilesse Comme Horace avait l'Anio.
O po��sie! Horace avait beaucoup de choses, et George Sand n'a rien, pas m��me l'eau courante et rieuse de la Gargilesse, c'est-��-dire le don de la chanter dignement; car ces choses qui appartiennent �� Dieu, les flots limpides, les for��ts sombres, les fleurs, les ��toiles, tout le beau domaine de la po��sie, sont conc��d��es par la loi divine a qui sait les voir et les aimer. C'est comme cela que le po?te est riche. Mais, moi, je suis devenu pauvre, et je n'ai plus �� moi qu'une chose inf��conde, le chagrin, champ aride, domaine du silence. J'ai perdu en un an trois ��tres qui remplissaient ma vie d'esp��rance et de force. L'esp��rance, c'��tait un petit enfant qui me repr��sentait l'avenir; la force, c'��taient deux amiti��s, soeurs l'une de l'autre, qui, en se d��vouant �� moi, ravivaient en moi la croyance au d��vouement utile.
Il me reste beaucoup pourtant: des enfants ador��s, des amis parfaits. Mais, quand la mort vient de frapper autour de nous ce qui devait si naturellement et si l��gitimement nous survivre, on se sent pris d'effroi et comme d��nu�� de tout bonheur, parce qu'on tremble pour ce qui est rest�� debout, parce que le n��ant de la vie vous appara?t terrible, parce qu'on en vient �� se dire: ?Pourquoi aimer, s'il faut se quitter tout �� l'heure? Qu'est-ce que le d��vouement, la tendresse, les soins, s'ils ne peuvent retenir pr��s de nous ceux que nous ch��rissons? Pourquoi lutter contre cette implacable loi qui brise toute association et ruine toute f��licit��? A quoi bon vivre, puisque les vrais biens de la vie, les joies du coeur et de la pens��e, sont aussi fragiles que la propri��t�� des choses mat��rielles??
O ma?tre po?te! comme je me sentais, comme je me croyais encore riche, quand, il y a un an et demi, je vous lisais
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