petit homme et sa proie. Cette aubaine, tomb��e des nues, sentait le vol d'une demi-lieue. Mais, quand la faim parle, adieu les scrupules! L��gitime ou non, le mouton fut d��vor�� �� belles dents.
D��s ce jour, l'abondance r��gna dans la demeure du paysan. Les moutons succ��daient aux moutons, et le bonhomme, plus cr��dule que jamais, se demandait s'il n'avait pas gagn�� au change, quand, au lieu des cent vaches qu'il attendait, le ciel lui avait envoy�� un pourvoyeur aussi habile que le petit homme gris.
Toute m��daille a son revers. Tandis que les moutons se multipliaient dans la maison du vieillard, ils diminuaient �� vue d'oeil dans le troupeau royal, qui paissait aux environs. Le ma?tre berger, fort inquiet, pr��vint le roi que, depuis quelque temps, quoiqu'on redoublat de surveillance, les plus belles t��tes du troupeau disparaissaient l'une apr��s l'autre. Assur��ment quelque habile voleur ��tait venu se loger dans le voisinage. Il ne fallut pas longtemps pour savoir qu'il y avait dans la cabanne du paysan un nouveau venu, tomb�� on ne sait d'o�� et que personne ne connaissait. Le roi ordonna aussit?t qu'on lui amenat l'��tranger. Le petit homme gris partit sans sourciller; mais le paysan et sa femme commenc��rent �� sentir quelques remords en songeant qu'on pendait �� la m��me potence les receleurs et les voleurs.
Quand le petit homme gris parut �� la cour, le roi lui demanda si par hasard il n'avait pas entendu dire qu'on avait vol�� cinq gros moutons au troupeau royal.
--Oui, Majest��, r��pondit le petit homme, c'est moi qui les ai pris.
--Et de quel droit? dit le prince.
--Majest��, r��pondit le petit homme, je les ai pris parce qu'un vieillard et sa femme souffraient de la faim, tandis que vous, roi, vous nagez dans l'abondance et ne pouvez m��me pas consommer la d?me de vos revenus. Il m'a sembl�� juste que ces bonnes gens v��cussent de votre superflu plut?t que de mourir de mis��re, tandis que vous ne savez que faire de votre richesse.
Le roi resta stup��fait de tant de hardiesse; puis, regardant le petit homme d'une fa?on qui n'annon?ait rien de bon:
--A ce que je vois, lui dit-il, ton principal talent, c'est le vol.
Le petit homme s'inclina avec une orgueilleuse modestie.
--Fort bien, dit le roi. Tu m��riterais d'��tre pendu, mais je te pardonne, �� la condition que demain, �� pareille heure, tu auras pris �� mes patres mon taureau noir, que je leur fais soigneusement garder.
--Majest��, r��pondit le petit homme gris, ce que vous me demandez est chose impossible. Comment voulez-vous que je trompe une pareille vigilance?
--Si tu ne le fais, reprit le roi, tu seras pendu.
Et, d'un signe de main, il cong��dia notre voleur, �� qui chacun r��p��tait tout bas: Pendu! pendu! pendu!
Le petit homme gris retourna dans la cabane, o�� il fut tendrement re?u par le vieillard et sa femme. Mais il ne leur dit rien, sinon qu'il avait besoin d'une corde et qu'il partirait le lendemain au point du jour. On lui donna l'ancien licou de la vache; sur quoi il alla se coucher et dormit en paix.
Aux premi��res lueurs de l'aurore, le petit homme gris partit avec sa corde. Il alla dans la for��t, sur le chemin o�� devaient passer les patres du roi, et, choisissant un gros ch��ne bien en vue, il se pendit par le cou �� la plus grosse branche. Il avait eu grand soin de ne pas faire un noeud coulant.
Bient?t apr��s, deux patres arriv��rent, escortant le taureau noir.
--Ah! dit l'un d'eux, voil�� notre fripon qui a re?u sa r��compense. Cette fois, du moins, il n'a pas vol�� son licou. Adieu, mon dr?le, ce n'est pas toi qui prendras le taureau du roi.
D��s que les patres furent hors de vue, le petit homme gris descendit de l'arbre, prit un chemin de traverse et s'accrocha de nouveau �� un gros ch��ne pr��s duquel passait la route. Qui fut surpris �� l'aspect de ce pendu? ce furent les patres du roi.
--Qu'est-ce l��? dit l'un d'eux; ai-je la berlue? Voil�� le pendu de l��-bas qui se trouve ici!
--Que tu es b��te! dit l'autre. Comment veux-tu qu'un homme soit pendu en deux places �� la fois? C'est un second voleur, voil�� tout.
--Je te dis que c'est le m��me, reprit le premier berger; je le reconnais �� son habit et �� sa grimace.
--Et moi, reprit le second, qui ��tait un esprit fort, je te parie que c'en est un autre.
La gageure accept��e, les deux patres attach��rent le taureau du roi �� un arbre et coururent au premier ch��ne. Mais, tandis qu'ils couraient, le petit homme gris sauta �� bas de son gibet et mena tout doucement le taureau chez le paysan. Grande joie dans la maison; on mit la b��te �� l'��table en attendant qu'on la vend?t.
Quand les deux patres rentr��rent, le soir, au chateau, ils avaient l'oreille si basse et l'air si
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