une merluche ou morue sèche dessalée, bouillie pendant trois jours dans une eau de cendre mêlée de chaux vive, et farcie ensuite avec du poivre, de la moutarde et du raifort: voilà le lustsfisk? [1]. Les vins d'Espagne fortement alcoolisés peuvent seuls faire digérer un si plantureux repas.
[Note 1: M. Bitard, No?l.]
Le soir de la veille de No?l, vers onze heures, dans les hameaux, tout le monde monte en tra?neau et se rend à l'office. Mille étoiles scintillent dans le silence de la nuit, troublée seulement par les grelots des chevaux qui font craquer la neige sous leurs pieds. Ordinairement, auprès de l'église du village un vaste hangar offre un abri: des bancs pour les paysans et des rateliers pour leurs chevaux. Aussit?t l'office terminé, chacun regagne son logis au plus vite.
?Ce moment donne lieu, en Finlande, à une scène des plus divertissantes. Une vieille croyance promet la meilleure récolte de l'année à celui qui rentrera le premier dans sa maison, après l'office de No?l. C'est alors toute une conspiration contre les équipages. Les jeunes gar?ons sortent furtivement de l'église pendant l'office, détellent les chevaux, lient les tra?neaux les uns avec les autres, changent les colliers, embrouillent les harnais, etc. On con?oit le désordre qui s'en suit, des cris, parfois des coups; la place de l'église se change en véritable champ de bataille. Enfin, les tra?neaux sont retrouvés, chacun répare son attelage et part au galop: le combat finit par une course au clocher?[2].
[Note 2: Desclées, No?l.]
Dans la plupart des campagnes, les ménagères veillent à ce que, pendant les fêtes de No?l, l'ordre et la propreté règnent dans toute leur demeure. Il est d'usage de joncher les dalles de paille fra?che, ce qui donne à la chambre de famille l'aspect d'une grange où l'on a étendu les gerbes avant le battage. Est-ce en souvenir de la paille et de la pauvreté de la crèche? Nous serions portés à le croire. Quoi qu'il en soit, cette paille de No?l a, dit-on, une vertu merveilleuse: les animaux qui en mangent sont préservés de toute maladie pendant l'année.
En Suède, les paysans veulent que tous les animaux prennent part à la solennité de No?l: ?Ce jour-là, dit M. Léouzon le Duc, ils donnent la liberté aux chiens de garde, ils servent à leurs bestiaux un fourrage d'élite?[3].
[Note 3: La fête de No?l en Suède et en Finlande.]
C'est un usage assez répandu, en Suède et en Norwège, d'offrir, le jour de No?l, un repas aux oiseaux. La dernière gerbe de la moisson est soigneusement conservée, chez les pauvres comme chez les riches, jusqu'à la veille de la grande solennité. Le vingt-cinq Décembre, au matin, on la fixe au bout d'une perche et on en décore le pignon de la maison. C'est un charmant et étourdissant concert que celui de la gent granivore faisant tapage autour de ce mat pour picorer les épis de blé. Tous les petits habitants de l'air prennent, eux aussi, leur joyeux festin et rendent graces à la Providence qui, dans un jour si heureux, a voulu les combler d'allégresse. Cette ravissante coutume suédoise nous rappelle ces deux vers si connus:
Aux petits des oiseaux il donne leur pature Et sa bonté s'étend sur toute la nature[4].
[Note 4: Racine, Athalie, acte II, scène VII.]
Un de nos meilleurs po?tes a gracieusement chanté ce Réveillon des petits oiseaux:
Et les oiseaux des champs? Ne feront-ils la fête?... Eux que l'hiver cruel décime tous les jours, Eux que le froid transit, que la famine guette Sur l'arbre dépouillé du nid de leurs amours!
Oh, non! Pour eux, l'on cherche une gerbe emmêlée Où des milliers d'épis se courbent sous le grain, On l'étend sur la neige: ?--Accourez gent ailée, ?Car votre nappe est mise, et prêt est le festin!?
Et vous voyez d'ici le pinson, la fauvette, Le menu roitelet voleter à l'appel..... Tout en mangeant le grain, ils relèvent la tête, Pour lancer une gamme, un cri de joie au ciel![5]
[Note 5: Comtesse O'Mahony.]
ANGLETERRE
Le peuple anglais célèbre la solennité de No?l avec une telle joie, une telle unanimité et de telles dépenses qu'on peut regarder le Christmas[6] comme sa fête nationale.
[Note 6: La vieille désinence, mas signifie fête; Christmas, fête du Christ.]
Autrefois, à l'occasion de No?l, avait lieu une fête carnavalesque. Des carols (chansons) anglaises nous font conna?tre les personnages mis en scène dans ces mascarades: le roi de la Bombance, la reine de la Folie, la princesse Déraison y paraissent au milieu d'un bruyant cortège.
A la Cour, chez les princes, un officier était chargé de présider aux réjouissances. Il s'appelait Lord of Misrule (le Seigneur du Désordre). En écosse, on le nommait Abbot of Unreason (l'Abbé de la Déraison). Ces fonctions ont été abolies par ?act of Parliament? en 1515. Les prêtres durent plusieurs fois s'interposer contre les frivolités de ces amusements.
Dans les recueils de Folk-Lore, on
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