où se
manifeste sa royauté. Les Grecs modernes, pour exprimer le fait que le
soleil se couche, disent d'un seul mot qu'il «règne»[19], expression
superbe qu'ils ne semblent pas devoir à l'antiquité classique. La
représentation gravée sur notre cylindre éveille une idée toute
semblable.
[Note 19: le mot grec correspondant, donné dans le texte de l'auteur, n'a
pu être reproduit ici.]
[Illustration: Fig. 7.]
Avec les scènes successives qui viennent d'être décrites, nous aurions
toute l'évolution diurne de l'astre. Cependant, avant de clore cette
énumération, Je voudrais signaler encore deux variantes intéressantes,
également tirées de nos cylindres chaldéens. Dans l'une d'elles, le dieu,
au lieu de trôner sur la montagne, est assis sur un siège ordinaire. La
porte, comme il arrive quelquefois, est indiquée par un seul battant, que
tient un des deux génies, tandis que l'autre introduit un adorant. On
remarquera ce curieux détail que le présentateur déploie et agite une
grande draperie, sorte de voile ou de rideau, qui pouvait bien être
l'offrande faite au dieu; mais l'idée qui s'y attachait était évidemment de
masquer, d'atténuer pour les yeux mortels le dangereux rayonnement de
la face solaire.
La représentation suivante (fig. 8) rappelle de très près celle par où
nous avons commencé, l'image du dieu paraissant à demi derrière la
montagne; mais elle est d'un style particulier et elle offre des détails qui
ne sont pas ordinaires.
[Illustration: Fig. 8.]
On remarquera surtout que les six lignes ondulées figurant les ailes de
flamme se terminent par autant d'étoiles. Si, contrairement à l'opinion
opposée plus haut, la scène pouvait se rapporter, dans certains cas, au
soleil descendant derrière l'horizon, aucune variante ne s'y prêterait
mieux que celle-ci. Comme dans un exemple précédent, les battants de
la porte sont surmontés de deux lions. Les deux gardiens n'ont pas cette
fois la coiffure munie de cornes; en revanche, ils sont armés de bâtons
recourbés.
Ces armes ne leur sont point inutiles; car ils ont à contenir un horrible
démon, aux pieds d'aigle, à la tête décharnée, assez semblable à celui
qui figure le Vent du sud-ouest dans plusieurs représentations connues.
Des traits presque effacés semblent indiquer des ailes et même
quelques flammes qui entourent le monstre. Ne serait-ce, sous une
forme plus accentuée, que le démon du feu? Je préférerais y reconnaître
un de ces esprits mauvais que la montée du jour met en fuite et qui
recommencent à rôder sur la terre à l'approche du soir. Si réellement il
y a des flammes autour de lui, on peut supposer qu'il paie ainsi sa
témérité à braver les feux du soleil.
A côté des compositions précédentes, qui apportent un développement
notable à l'iconographie des mythes solaires dans l'ancienne Chaldée, je
ne résiste pas au désir de faire connaître, pour terminer, un remarquable
cylindre qui n'appartient plus à la même série et dont les figures nous
conduisent dans un domaine mythologique différent.
L'idée de représenter les dieux sur des animaux réels ou imaginaires est
une des formes les plus originales du symbolisme chaldéo-assyrien.
Cependant les groupes de ce genre, assez fréquents à l'époque
assyrienne et aussi chez les populations de l'Asie Mineure, sont tout à
fait rares sur les monuments de la haute antiquité chaldéenne. En voici
pourtant un exemple, d'autant plus intéressant que le procédé n'est pas
encore devenu banal et commun à toutes les divinités.
[Illustration: Fig. 9.]
Du même pas s'avancent l'un derrière l'autre deux monstres exactement
pareils, que l'on pourrait, par anticipation, appeler apocalyptiques.
Lions par le corps, par leurs membres antérieurs et par leurs têtes
abaissées, dont les terribles mâchoires, ouvertes en cisailles, vomissent
des torrents d'eau ou de feu, ils sont aigles par leurs puissantes ailes
étendues, par les serres de leurs pattes postérieures et par leur queue de
plumes en éventail. C'est en somme une des formes que la démonologie
chaldéo-assyrienne prête le plus souvent aux puissances destructives,
aux esprits du mal. Seulement l'art chaldéen y ajoute une grandeur
étrange, surtout par la petitesse relative des figures divines que ces
monstres portent à travers l'espace, non pas simplement, comme plus
tard, posées sur leur dos, mais dressés en avant sur le garrot de la bête,
vers la naissance des ailes déployées, qui semblent les soulever.
Sur le premier vient un dieu qui tient dans sa main droite l'arme coudée
des rois chaldéens[20] et lève le bras gauche d'un geste menaçant,
comme s'il poussait un cri de guerre. La petite figure qui suit sur l'autre
monstre est plus difficile à déterminer, à cause de son exiguïté même;
pourtant les formes générales et la robe serrée aux jambes[21] sont bien
d'une femme[22]; de ses mains étendues elle tient deux traits brisés, qui
font penser à des éclairs. Une figure virile, de proportions beaucoup
plus grandes, marche entre les deux animaux; comme elle est à pied, on
a pu lui laisser
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