Monsieur Parent | Page 4

Guy de Maupassant
lu face:
--Monsieur peut me battre s'il veut, moi qui l'ai ��lev��; ?a n'emp��chera pas que sa femme le trompe et que son enfant n'est pas de lui!...
Il s'arr��ta tout net, laissa retomber ses bras; et il restait en face d'elle tellement ��perdu qu'il ne comprenait plus rien.
Elle ajouta:--Il suff?t de regarder le petit pour reconna?tre le p��re, pardi! c'est tout le portrait de M. Limousin. Il n'y a qu'�� regarder ses yeux et son front. Un aveugle ne s'y tromperait pas....
Mais il l'avait saisie par les ��paules et il la secouait de toute sa force, b��gayant: ?Vip��re... vip��re! Hors d'ici, vip��re!... Va-t'en ou je te tuerais!... Va-t'en! Va-t'en!...
Et d'un effort d��sesp��r�� il la lan?a dans la pi��ce voisine. Elle tomba sur la table servie dont les verres s'abattirent et se cass��rent; puis, s'��tant relev��e, elle mit la table entre elle et son ma?tre, et, tandis qu'il la poursuivait pour la ressaisir, elle lui crachait au visage des paroles terribles:
--Monsieur n'a qu'�� sortir... ce soir... apr��s d?ner... et qu'�� rentrer tout de suite... il verra!... il verra si j'ai menti!... Que Monsieur essaye... il verra.
Elle avait gagn�� la porte de la cuisine et elle s'enfuit. Il courut derri��re elle, monta l'escalier de service jusqu'�� sa chambre de bonne o�� elle s'��tait enferm��e, et heurtant la porte:
--Tu vas quitter la maison �� l'instant m��me.
Elle r��pondit �� travers la planche:
--Monsieur peut y compter. Dans une heure je ne serai plus ici.
Alors il redescendit lentement, en se cramponnant �� la rampe pour ne point tomber; et il rentra dans son salon o�� Georges pleurait, assis par terre.
Parent s'affaissa sur un si��ge et regarda l'enfant d'un oeil h��b��t��. Il ne comprenait plus rien; il ne savait plus rien; il se sentait ��tourdi, abruti, fou, comme s'il venait de choir sur la t��te; �� peine se souvenait-il des choses horribles que lui avait dites sa bonne. Puis, peu a peu, sa raison, comme une eau troubl��e, se calma et s'��clairait; et l'abominable r��v��lation commen?a �� travailler son coeur.
Julie avait parl�� si net, avec une telle force, une telle assurance, une telle sinc��rit��, qu'il ne douta pas de sa bonne foi, mais il s'obstinait �� douter de sa clairvoyance. Elle pouvait s'��tre tromp��e, aveugl��e par son d��vouement pour lui, entra?n��e par une haine inconsciente contre Henriette. Cependant, �� mesure qu'il tachait de se rassurer et de se convaincre, mille petits faits se r��veillaient en son souvenir, des paroles de sa femme, des regards de Limousin, un tas de riens inobserv��s, presque inaper?us, des sorties tardives, des absences simultan��es, et m��me des gestes presque insignifiants, mais bizarres qu'il n'avait pas su voir, pas su comprendre, et qui, maintenant, prenaient pour lui une importance extr��me, ��tablissaient une connivence entre eux. Tout ce qui s'��tait pass�� depuis ses fian?ailles surgissait brusquement en sa m��moire surexcit��e par l'angoisse. Il retrouvait tout, des intonations singuli��res, des attitudes suspectes; et son pauvre esprit d'homme calme et bon, harcel�� par le doute, lui montrait maintenant, comme des certitudes, ce qui aurait pu n'��tre encore que des soup?ons.
Il fouillait avec une obstination acharn��e dans ces cinq ann��es de mariage, cherchant �� retrouver tout, mois par mois, jour par jour; et chaque chose inqui��tante qu'il d��couvrait le piquait au coeur comme un aiguillon de gu��pe.
Il ne pensait plus �� Georges, qui se taisait maintenant, le derri��re sur le tapis. Mais, voyant qu'on ne s'occupait pas de lui, le gamin se remit �� pleurer.
Son p��re s'��lan?a, le saisit dans ses bras, et lui couvrit la t��te de baisers. Son enfant lui demeurait au moins! Qu'importait le reste?
Il le tenait, le serrait, la bouche dans ses cheveux blonds, soulag��, consol��, balbutiant: ?Georges..... mon petit Georges, mon cher petit Georges.....? Mais il se rappela brusquement ce qu'avait dit Julie!.... Oui, elle avait dit que son enfant ��tait �� Limousin..... Oh! cela n'��tait pas possible, par exemple! non, il ne pouvait le croire, il n'en pouvait m��me douter une seconde. C'��tait l�� une de ces odieuses infamies qui germent dans les ames ignobles des servantes! Il r��p��tait: ?Georges..... mon cher Georges.? Le gamin, caress��, s'��tait tu de nouveau.
Parent sentait la chaleur de la petite poitrine p��n��trer dans la sienne �� travers les ��toffes. Elle l'emplissait d'amour, de courage, de joie; cette chaleur douce d'enfant le caressait, le fortifiait, le sauvait.
Alors il ��carta un peu de lui la t��te mignonne et fris��e pour la regarder avec passion. Il la contemplait avidement, ��perdument, se grisant �� la voir, et r��p��tant toujours: ?Oh! mon petit..... mon petit Georges!.....?
Il pensa soudain: ?S'il ressemblait �� Limousin... pourtant!?
Ce fut en lui quelque chose d'��trange, d'atroce, une poignante et violente sensation de froid dans tout son corps, dans tous ses membres, comme si ses os, tout �� coup, fussent devenus de glace. Oh! s'il ressemblait �� Limousin!.....et il continuait a regarder Georges qui riait maintenant. Il le
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 60
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.