Louis Riel, Martyr du Nord-Ouest | Page 5

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premier occupant en terre domaniale.

Le gouvernement s'arrogeait le droit de vendre la terre, de la donner à
la compagnie du Pacifique Canadien, de la concéder à des immigrants
ou à des amis politiques; mais, en échange de la terre libre sur laquelle
avaient vécu leurs pères, les Métis réclamaient l'allotissement d'une
quantité de terrains suffisante pour eux et leur famille.
L'acte de 1870 avait réservé 100 arpents à chacun des Métis de
Manitoba.
Les métis de la Saskatchewan, de la rivière Qu'Appelle et de la Rivière
Rouge demandaient à ce que le droit--ou pour mieux dire--à ce que
l'indemnité accordée à titre de compensation, fût la même dans le
territoire du Nord-Ouest que dans le Manitoba.
Ils demandaient, en outre, à ce qu'on ne leur attribuât pas 100 arpents
n'importe où, et à ce qu'on ne les délogeât pas de leurs habitations sur le
bord des fleuves, pour leur offrir une concession hypothétique dans des
régions inaccessibles.
Et ils attendaient une réponse depuis le mois de juin 1878!
Une première fois leur demande avait été soumise à l'enquête.
Une seconde fois on avait consulté Mgr Taché, qui avait insisté sur
l'urgence de donner satisfaction aux Métis. (29 janvier 1879).
Mais le gouvernement n'avait pas tenu compte de la réponse.
Une autre fois, le marquis de Lorne donnait de bonnes paroles au
représentant du district, M. Clarke; et, en même temps, on lui répondait
d'Ottawa: «Votre lettre a été réservée pour la considération spéciale du
ministre.» (14 avril 1882).
Mais le ministre ne considérait rien, et tout restait comme devant.
En 1883, le conseil supérieur du Nord-Ouest renouvelait la même
demande, sans plus de succès; et en 1884, Sir Hector Langevin
déclarait aux Métis, lors de son passage au Nord-Ouest, que leurs

demandes étaient parfaitement raisonnables et qu'il serait bon de les
consigner par écrit!!
Cependant ce n'est pas tout. A défaut de réponse, les Métis voyaient
apparaître, de temps à autre, des arpenteurs qui divisaient
méthodiquement le terrain en carrés selon le système des townships; et
comme les terres des Métis n'étaient point carrées, ni de la dimension
voulue, il arrivait que l'arpenteur figurait une ligne, coupant leur champ
en deux ou coupant leur cabane en biais et leur cheminée par la moitié.
C'était la limite d'une concession à venir.
D'autres fois, il arrivait qu'un étranger débarquant au milieu d'eux, avec
un plan à la main, leur apprenait que leur maison était située sur la
concession qui venait de lui être faite, et les invitait à déloger, sans
tambour ni trompette.
Quant à tenter d'obtenir pour soi-même une concession quelconque,
c'était prendre une peine inutile. Aux pétitions collectives, le
gouvernement ne répondait pas. Aux demandes individuelles, les
bureaux répondaient invariablement: «qu'ils avaient le regret de vous
annoncer qu'il ne pouvait y être donné suite, une application antérieure
ayant été faite à Ottawa pour le même terrain, par une autre personne.»
Un jour, on s'étonna, sur les bords de la Saskatchewan, que tant
d'applications antérieures eussent été faites par des personnes qu'on ne
voyait jamais apparaître; et on imagina, pour en avoir le coeur net, de
demander, en un coin imaginaire, la concession d'un terrain et d'un
pouvoir d'eau qui n'existaient pas!
La réponse tarda quelque temps; puis elle arriva, avec sa déplorable
monotonie «une application antérieure avait été faite par une autre
personne,» sur le terrain qui n'existait pas!
Probablement, le bureaucrate, alléché par la description imaginaire du
demandeur en concession, s'était dit qu'il convenait de réserver une
telle aubaine à un parent ou à un ami; et il avait envoyé sa réponse, en
négligeant de vérifier sur le plan l'existence et la condition du terrain!

Les choses en étaient là, lorsque les Métis, las de pétitionner et ne
songeant point encore à la révolte, mais désireux d'avoir à leur tête un
homme instruit, actif et capable de faire réussir enfin leurs requêtes,
songèrent à réclamer l'assistance de Riel (juin 1884).
Louis Riel vivait fort paisiblement, avec sa famille, dans le Montana,
lorsque les délégués des Métis, parmi lesquels figuraient des Anglais,
firent un voyage de plus de 700 milles pour lui demander de venir se
fixer parmi eux.
Il leur répondit dans les termes suivants:
MESSIEURS.--Vous avez parcouru plus de 700 milles du pays de la
Saskatchewan, traversé la ligne de frontière internationale pour me
faire une visite.
Les communautés au milieu desquelles vous viviez vous ont envoyés
comme délégués pour me demander mon avis sur plusieurs difficultés
qui ont rendu malheureux le Nord-Ouest britannique, sous
l'administration d'Ottawa. De plus, vous m'invitez à vous accompagner
et à établir ma demeure parmi vous, dans l'espérance que ma présence
servira à améliorer votre condition. Votre invitation est pressante et
cordiale; vous voulez que je vous accompagne avec ma femme et mes
enfants; je pourrais m'excuser et dire: «non, merci!» et pourtant vous
m'attendez;
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