Linstitution des enfans, ou conseils dun père à son fils | Page 3

Nicolas François de Neufchâteau
de douceur, avec un ton modeste,?C'est le moyen de plaire et d'avoir des amis.?On chérit la candeur; mais l'orgueil, qu'on déteste,?Gate les plus beaux dons qu'en nous le ciel a mis.
Fac tibi sit vultus comis, sermoque modestus:?Sic multos facilè tibi conciliabis amicos.
27.
L'amour de l'or, mon fils, est d'une ame commune;?C'est l'amour des vertus que tu dois embrasser.?Elles peuvent toujours remplacer la fortune;?La fortune, jamais, ne peut les remplacer.
Semper opum studio pr?fer virtutis amorem:?Non opibus virtus, sed opes virtute parantur.
28.
De ce qu'on veut savoir la trace ineffa?able,?Quand on lit avec fruit, reste dans le cerveau:?Si tu lis en courant, tu graves sur le sable,?Ou tu veux, dans un crible, aller puiser de l'eau.
Disce, et qu? discis memori sub pectore conde,?Aut facies tantumdem ac si cribro hauseris undam.
29.
Evite la colere, abhorre la vengeance,?Haineuses passions dont la honte est le prix.?Souvent ce qui nous fache, est digne d'indulgence;?A l'injure il est beau d'opposer le mépris.
Irasci noli temerè: nil foedius ira;?Quam qu?cunque movere solent, ea temnere laus est.
30.
Sur les monts élevés, l'aquilon brise, arrache,?Déracine les pins, les chênes, les ormeaux;?Dans le creux du vallon, l'arbrisseau qui se cache,?Voit fleurir, à l'abri, ses paisibles rameaux.
Venti agitant celsis positas in mentibus ornos,?A quibus in media tuta est arbuscula valle.
31.
L'ambition, de même, exposée aux tempêtes,?A de plus grands périls condamne la grandeur.?Des Pénates obscurs protégent mieux nos têtes,?Et la sécurité vaut mieux que la splendeur.
Sic et opes agitant majora pericula magnas:?Tutior angustos comitatur vita Penates.
32.
Un enfant ne doit pas usurper la parole:?Son lot est d'écouter, de répondre à propos.?On conna?t la sottise à son babil frivole,?Le véritable esprit s'explique en peu de mots.
Pauca loqui puero, sed tempestiva, decorum est:?Hac etenim ingenium res indicat, illa pudorem.
33.
Veux-tu savoir, mon fils, le chemin de la gloire,?De celle qui, du moins, tente un esprit bien fait??Aux hommes, garde-toi d'en vouloir faire accroire;?Ce que tu veux para?tre, il faut l'être en effet.
Scire cupis, qu? sit fam? via certa parand???Talem te pr?sta, qualem te poscis haberi.
34.
A son ma?tre, l'enfant qui tremble de déplaire,?Ne craint pas de souffrir un honteux chatiment.?Mais s'il ose braver une juste colere,?La rigueur, à regret, supplée au sentiment.
Verbera non metuet, metuet qui jussa magistri;?H?c qui contemnet, meritò miser ille timebit.
35.
Heureux le jeune éleve animé d'un beau zele,?En qui la vertu brille et devance les ans!?De tous ses compagnons, c'est le digne modele,?L'honneur de son logis, l'amour de ses parens:
Quàm felix puer est, virtus in quo anteit annos!?Illum omnes meritis certatim laudibus ornant.
36.
On le recherche, on l'aime, à le voir on s'empresse,?Et par les voeux publics, il se voit seconder.?Mais pour le lache enfant qu'encha?ne la paresse,?En lui parlant, hélas! on croit se dégrader.
Et spectant cupidè, et felicia cuncta precantur;?At contrà nemo alloquio dignatur inertes.
37.
Malheureux, par sa faute, on le fuit, on le chasse.?Il est bient?t l'objet d'un mépris éternel;?Et son pere lui-même, (? comble de disgrace!)?Ne le voit presque plus d'un regard paternel.
Spernuntur cunctis, et vulgi fabula fiunt;?Vix oculis pater ipse illos satis aspicit ?quis.
38.
Une ch?te premiere entra?ne une autre ch?te;?Si l'on ne se corrige, on s'habitue au mal.?Mon fils, dès le principe, il faut qu'on s'exécute,?Ou l'on ne peut plus vaincre un penchant trop fatal.
Non tantùm in pr?sens obsunt peccata: sed hoc plus, Ad mala quod proclivem animum adsuetudine reddunt.
39.
Mais ce n'est pas assez que d'être exempt de vice.?Quelques difficultés dont on soit combattu,?Rien ne doit écarter, d'un coeur jeune et novice,?Le desir, le besoin, le go?t de la vertu.
Qu? bona sunt, sectare: etiàm si dura videntur?Principio: longus paulatim ea molliet usus.
40.
Du bien que l'on t'a fait, conserve la mémoire;?En toute occasion, tu dois le relever.?Mais du bien que tu fais ne tire point de gloire;?Laisse à d'autres que toi le soin de l'observer.
Acceptum officium memora atque extolle: sed abs te Collatum extenua, et potiùs sine pr?dicet alter.
41.
S'il faut te décider, quand l'honnête et l'utile,?Paraissant opposés, te tiennent en arrêt,?Ta regle est dans ton coeur, c'est ton premier mobile;?L'honneur, sans balancer, doit vaincre l'intérêt.
Utilitas quoties pugnare videtur honesto,?Ne dubitare quidem fas est, quin vincat honestas.
ENVOI.
EPILOGUS.
42.
Je ne veux pas lasser ton oreille attentive;?Je m'arrête. C'est peu que ces premiers avis;?Mais, mon fils, que ton coeur s'en pénetre et les suive;?Mes yeux, de tes progrès, seront bient?t ravis.
Pauca quidem h?c: sed qu? studio servata perenni?Mirificos fructus progressu temporis edent.
43.
Commence seulement, commence avec courage;?Des obstacles, enfin, tu seras triomphant.?Obtiens que l'Eternel bénisse ton ouvrage;?Offre à Dieu tes efforts, et deviens son enfant.
Adspiret tantum coeptis Deus, omnia cujus?Consilio ?terno et certa ratione reguntur.
44.
Le matin, quand du lit tu sors avec l'aurore,?Le soir, quand le besoin t'invite au doux sommeil,?Dis-lui, du fond du coeur: ?Dieu bon, Dieu que j'adore,??Dirige mon travail, mon repos, mon reveil.?
Quem tu et luce puer prima, cum strata relinquis?Impiger, et dulcem repetis cum vespere somnum,
45.
Ah! si ton coeur est pur, si ton zele est sincere,?Le ciel, n'en doute pas, exaucera tes voeux.?Oui, mon fils; l'Eternel, touché de ta priere,?T'enverra
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