cette loy prophane Avoit, vous le s?avez, de l'air de Luciane, Qui s?aura je m'asseure en cette occasion, Imiter son humeur & son affection. Aristide d'ailleurs pour vaincre sa folie, Se dira parmy nous frere de Pamphilie, Et me conjurera par l'esclat de ses yeux, De ne la point trahir, aussi bien que nos Dieux. Voila sur ce sujet tout ce qui vous regarde, Le reste. Mais que veut Aquillin, & ce Garde?
SCENE V.
Aquillin. Genest. Pamphilie. Luciane. Aristide. Anthenor. Un Garde tenant des presens.
AQUILLIN.
Le Ciel vous ayme Amis, la fortune vous rit, Le peuple vous admire, & Cesar vous cherit, Ce que je vous apporte en sont de bonnes marques, Recevez ces presens du plus grand des Monarques, Et croyez toutesfois que ces rares bienfaits Ne sont de ses bontez que les moindres effets.
GENEST.
Ces magnifiques dons d'une illustre personne, Marquent la dignité de la main qui les donne, Et nous n'ignorons pas qu'il est en son pouvoir De porter ses bienfaits plus loing que nostre espoir, Mais de tant de faveurs dont Cesar nous accable, Sa presence nous est la plus considerable, Et le soing de luy plaire en ma profession, Borne tous mes desirs & mon ambition.
PAMPHILIE.
Il n'en est point icy qui ne parle de mesme, Envers sa Majesté nostre zele est extréme, Et tous esgalement nous nous sentons ravir: à l'inclination qu'il a de le servir.
AQUILLIN.
Tant de civilitez veulent que je confesse, Que nostre cour n'a pas toute la politesse, Puis qu'on la void en vous en un point si parfait, Que quiconque vous parle en admire l'effect.
ARISTIDE.
Ha! Seigneur, il suffit de vostre bien-veillance, Sans que vous confondiez avec vostre esloquence, Ceux que tant de faveurs & de bienfaits rece?s, De Cesar & de vous rendent assez confus.
LUCIANE.
Ouy Seigneur...
AQUILLIN.
Brisons là: mes yeux & mes oreilles, Charmez d'ouir & voir tant de rares merveilles, Font qu'insensiblement m'arrestant en ces lieux, Je vous derobe un temps qui vous est precieux. L'Empereur vous attend.
ANTHENOR.
Rien plus ne nous arreste.
GENEST.
Vous pouvez l'asseurer que nostre bande est preste, Et que nous n'attendons que son commandement, Pour luy donner icy du divertissement.
Fin du premier Acte.
ACTE SECOND.
SCENE PREMIERE.
Diocletian. Aquillin. Rutile. & suitte.
DIOCLETIAN.
Rutile, nous verrons si cette haute estime, Où tu mets nos acteurs est juste & legitime, Et si ces grands esprits que tu tiens si parfaits, Produiront sur le mien de semblables effets. Si l'on croit tes discours, ma cour n'a point de grace, Que la leur aisement ne surmonte, & n'efface, Et mesme l'on diroit que les perfections, Naissent de leur parole, & de leurs actions.
AQUILLIN.
Quelque approbation que Rutile leur donne, Son sentiment est juste & n'a rien qui m'estonne: Bien que quelques brutaux ayent leur art à mespris, Il n'admet point pourtant de vulgaires esprits, De corps mal composez, & de qui l'apparence, Ne puisse au moins donner quelque belle esperance. Le Theatre est severe, & veut des qualitez, Qui puissent faire aux grands admirer ses beautez: Le charme de la voix est sa moindre partie, Si de l'intelligence elle n'est assortie, Et le geste pour elle est un foible secours, Si ce rayon divin ne regle ses discours, Outre le jugement, l'adresse, & la memoire, L'asseurance est aussi necessaire à sa gloire, Et la propreté mesme en son habillement, N'est point pour un acteur un petit ornement.
DIOCLETIAN.
Hé bien nous en verrons bien tost l'experience: Faites les commencer, & qu'on preste silence.
SCENE II.
Luciane. Genest.
LUCIANE.
Ha! mon frere, si rien ne vous peut esmouvoir, Considerez des pleurs.
GENEST.
Qui seront sans pouvoir. Ha! c'est trop, levez vous, c'est en vain Luciane Que l'on croit me porter à cette loy prophane, Dont un nouveau Prophete, & trop foible Docteur, Se rendit autresfois le ridicule Autheur, Je ne me repais point de ces vaines chimeres, Dont il s?e?t esblouyr les esprits des nos peres, Je s?ay mieux me servir des droits de ma raison: Et parmy le nectar discerner le poison.
LUCIANE.
Ple?st au Ciel!
GENEST.
Vos souhaits aussi bien que vos larmes, Pour vaincre mon esprit sont d'inutiles armes. Croyez vous pour me voir de parens obsedé: Que par de vains transports je sois persuadé? Non non, mon Jugement plus ferme, & plus solide, Ne s?auroit escouter un conseil si perfide, Pour suivre un inconnu qui fut mis aux liens, Et dans son triste sort abandonné des siens.
LUCIANE.
Mais cet abandonné que vostre esprit abhorre, Est ce Dieu tout puissant que le Ciel mesme adore, Qui comble tout de gloire à son auguste aspect, Et fait trembler là haut les Anges de respect. Il naquit sans grandeur, sans esclat, & sans lustre; Mais dans l'obscurité son berceau fut illustre, Puis qu'à peine il parut qu'on redouta ses loix, Et qu'encor tout enfant il fit trembler des Roys. Si des siecles passez nous croyons les plus sages, Des Princes d'Orient il re?eut les hommages, Et l'astre qui guida ces Mages en ce lieu, Fit
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.