le ministre ��tait nomm�� au suffrage universel des employ��s, il aurait le portefeuille.
Cet homme d��concerta Caldas par ses pr��venances. Il lui roula un fauteuil pr��s de la chemin��e et le pria de se chauffer les pieds sans fa?on. Ensuite il lui tint un petit discours qui peut se r��sumer ainsi: ?Je vous connais, monsieur, je sais que les modestes fonctions qui vous sont assign��es ici sont bien au-dessous de vous; je rougis presque d'avoir �� vous tracer une besogne si mesquine. Des employ��s comme vous, monsieur, rendent bien difficile la position d'un chef; c'est vous qui devriez ��tre �� ma place.?
--Oh! oh! se dit Caldas, tu me fais poser, mon bonhomme.
M. Ganivet ne faisait pas poser Caldas; il lui r��citait son petit programme, voil�� tout.
Le reste de l'entretien fut digne du commencement. Le chef de bureau, du ton de l'int��r��t le plus profond, s'informa de tout ce qui touchait Romain, de son pass��, du pr��sent et de son avenir; il lui demanda des nouvelles de sa famille, et combien son p��re avait eu d'enfants. Il termina en le f��licitant d'avoir ��t�� nomm�� au bureau du Sommier, le bureau le mieux compos�� de tout le minist��re. Il lui tra?a un portrait vraiment flatteur de ses coll��gues, gens spirituels, instruits, aimables et de la meilleure compagnie, tous appel��s au plus bel avenir. Il prit la peine de le conduire lui-m��me jusqu'�� la porte du bureau.
L��, il lui donna une chaude poign��e de main, et finit en lui demandant sa protection.
XII
Seul, au milieu du corridor, Caldas vit avec anxi��t�� s'��loigner M. Ganivet.
L'id��e de se pr��senter �� des coll��gues si remarquables l'inqui��tait s��rieusement; il ��prouvait quelque chose de cette ��motion du jeune po?te qui, son manuscrit �� la main, va frapper �� la porte du Th��atre-Fran?ais et sollicite une lecture de MM. les Soci��taires. Il cherchait un mot aimable, d��gag��, spirituel, �� dire en entrant, un de ces mots qui posent �� tout jamais un homme.
En attendant il restait immobile devant la porte; il ��tudiait la physionomie de ces panneaux derri��re lesquels se trouvait l'inconnu. Il lut, sans y rien comprendre, les ��nigmatiques d��signations que voici:
VINGT ET UNI��ME DIVISION. ~~~~~~~~~
+-------------+ +-----------+ | SECTION 17e | SOMMIER | 9e BUREAU | +-------------+ +-----------+ -----
De la lettre A �� la lettre H
+-------------------------------------------+ | LE PUBLIC N'EST ADMIS QUE DE 2 HEURES 1/4 | | A 3 HEURES 1/2. | +-------------------------------------------+
--Tout ceci ne m'apprend pas grand'chose, murmura Caldas. Bast, entrons!
Il ouvrit la porte... et re?ut une pomme cuite sur l'oeil.
--Sacrrrrebleu! s'��cria-t-il en portant la main au si��ge de la douleur.
--Vous ne savez donc pas lire? lui cria un monsieur arm�� d'un balai et perch�� sur une ��chelle; le public n'est admis que de deux heures un quart �� trois heures et demie.
Deux autres messieurs, dont l'un brandissait des pincettes, tandis que l'autre se faisait un bouclier de son pupitre, lui cri��rent aussi:
--Le public n'est admis...
--Mais sapristi! je ne suis pas le public, riposta Caldas, je suis employ�� dans ce bureau; M. Ganivet...
--Tiens, c'est le nouveau, dit le monsieur aux pincettes.
--Vous arrivez �� propos, dit le monsieur sur l'��chelle, nous sommes accabl��s de besogne.
--Voici votre place, ajouta le monsieur au bouclier, en lui montrant une table non occup��e.
Et, profitant d'un moment d'inattention du monsieur aux pincettes, il lui ass��na sur les reins un coup de r��gle plate �� assommer un boeuf.
La petite guerre recommen?a, sans qu'on fit davantage attention au nouveau, qui s'assit piteusement �� sa place.
La victoire ne tarda pas �� se d��clarer en faveur du monsieur �� l'��chelle et du monsieur aux pincettes. Forc�� dans ses derniers retranchements, l'homme au pupitre lacha pied et courut se r��fugier derri��re Caldas pour ��viter la bagarre. Le nouveau se leva brusquement; sa chaise roula �� trois pas, et, du coup, il fut atteint par les pincettes.
Ma foi, la moutarde lui monta au nez; il saisit un plumeau et se rangea du c?t�� de l'homme au pupitre, qui, grimp�� sur une table, se d��fendait courageusement.
Caldas tapait comme un sourd, et le vacarme redoublait.
Tout �� coup la porte s'ouvrit; un quatri��me monsieur entra.
C'��tait un petit homme sec, jaune, bilieux, �� l'oeil cave. Comme on ��tait au lundi, il ��tait ras�� de frais.
M. Rafflard (tel ��tait son nom) ne se fait raser que tous les dimanches. M. Rafflard s'enrhume facilement; c'est pourquoi il porte des chaussons fourr��s et une calotte; il y a m��me une plaisanterie de tradition �� ce sujet dans le neuvi��me bureau: tous les ans, au 1er janvier, les coll��gues de M. Rafflard lui offrent une calotte de velours; il s'est fach�� la premi��re ann��e, depuis il s'est fait �� ce cadeau, peut-��tre m��me se facherait-il si on n��gligeait cette pr��venance.
Malheureusement on ne lui donne pas de paletot pour remplacer celui qu'il porte �� son bureau depuis l'ann��e du retour des cendres; ce paletot a juste deux ans de
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