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Les derniers Iroquois
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Title: Les derniers Iroquois
Author: émile Chevalier
Release Date: March 20, 2006 [EBook #18029]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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Produced by Rénald Lévesque
LES DERNIERS IROQUOIS
PAR
éMILE CHEVALIER
PARIS CALMANN LéVY, éDITEUR ANCIENNE MAISON MICHEL LéVY FRèRES RUE AUGER, 3, ET BOULEVARD DES ITALIENS, 15 A LA LIBRAIRIE NOUVELLE
1876
A M. PHILARèTE CHASLES
Témoignage de haute admiration pour ses magnifiques et profondes études sur les hommes et les choses de l'Amérique septentrionale.
H. éMILE CHRVALIER. Chateau de Maulnes, septembre 1882.
CHAPITRE PREMIER
LA VEUVE INDIENNE ET SES MARIS
La nuit est noire, profonde: rares sont les étoiles qui, comme des diamants fixés à un dais de velours bleu foncé, scintillent ?a et là dans l'immensité des cieux. Pas un rayon de lune pour éclairer l'espace.
Cependant des bruits étranges, des chants bizarres s'élèvent du mont Baker, limite septentrionale de la cha?ne des Cascades, dans la Nouvelle-Calédonie.
Cette cha?ne, composée de collines reliées par les pics Baker, Rainier[1] Sainte-Hélène, Hood, Jefferson et Jackson, ourle le littoral du Pacifique, à quelque vingt lieues des c?tes, et se déploie presque parallèlement à elles, comme un arc, dont les monts Saint-Hélène et Jefferson formeraient les sommets, le mont Hood le point d'appui pour ajuster la flèche.
Situées au 122° de longitude, les Cascades s'étendent du 49° latitude N. au 43° S. Le Rio-Columbia les coupe en deux parties à peu près égales. On peut leur assigner comme bornes, en haut, la baie Bellingham, dans le golfe de Géorgie, vis à vis de l'?le Vancouver, et en bas la rivière Smiths, oui se verse dans l'Océan. Ces bornes ne sont toutefois pas définitives, car après avoir semblé se perdre dans les vallées spacieuses, les Cascades reparaissent plus robustes, plus sourcilleuses que jamais et projettent d'un c?té leur tête chenue jusque sous le p?le, tandis que, par le mont Shasté, elles descendent jusqu'en Californie, baigner leurs pieds aux ondes du Sacramento.
Plusieurs des pics qui, de même que des sentinelles géantes, les dominent de distance en distance, sont volcaniques et sujets à des éruptions fréquentes: de ce nombre, le Baker, haut de 10,700 pieds anglais.
[Note 1: C'est l'orthographe exacte du nom que, par erreur, j'ai quelquefois appelé Ramer dans mes précédents ouvrages.]
Tout d'un coup, les sons qui montaient à sa base cessèrent. Il se fit un silence solennel, à peine troublé par le frémissement des feuillages au souffle de la brise.
On e?t dit que la solitude était complète, dans ces régions incultes et lointaines.
Mais, soudain, une flamme claire, pétillante, jaillit à travers les ténèbres: elle embrasse un étroit horizon. Au même instant, les chants recommencent, et, dans le cercle de feu, on voit, comme sur le rideau d'une lanterne magique, s'agiter des personnages aux proportions effrayantes.
Le regard est attiré et repoussé tout à la fois.
Assiste-t-on à une scène de ce monde ou à quelque mystérieuse fantasmagorie telle qu'il ne s'en montre que dans les hallucinations d'un esprit en délire?
Quoi qu'il en soit, le chant hausse. C'est une sorte d'antienne cadencée, soutenue par l'accompagnement monotone de plusieurs tambourins.
Dans cette musique grave et douce, bien qu'inharmonique, au milieu de cette nuit sombre, sans écho, il y a quelque chose d'indicible qui attriste le coeur et le refroidit. Si nous étions en Europe, au Moyen Age, je croirais à une lugubre cérémonie religieuse accomplie par des fanatiques. Mais, au fond de l'Amérique septentrionale!...
Examinons d'ailleurs: simple torche en paraissant, la flamme s'est développée; elle a grandi; elle s'est élargie; elle a gagné en intensité, et la voici qui s'évanouit: on ne distingue plus que des lueurs rouges, enfouies sous des tourbillons de fumée blanchatre; des craquements se font entendre; une pénétrante senteur de résine sature l'air; et, subitement, un éclair sillonne les vapeurs, comme la foudre sillonne les nuées, des torrents de lumière se précipitent de toutes parts.
Le tableau se présente à nous mieux accentué qu'en plein jour.
Au premier plan, vers le fa?te d'une éminence, un b?cher; sur ce b?cher deux corps humains; tout à l'entour une bande d'Indiens, sans armes et sans autres habillements que la kalaquarté, ou jupon court en filaments d'écorce de cèdre; à droite, attaché à un pin, un autre Indien vêtu en trappeur du Nord-Ouest; sur la gauche une petite troupe de chevaux broutant le gazon, et, par derrière, le Baker dont les flancs abrupts se confondent avec l'obscurité, après avoir dessiné un instant, sous les réverbérations du brasier, leurs crêtes rugueuses, hérissées de pins séculaires.
La plupart des sauvages dansaient, en nasillant leur psalmodie, devant le b?cher; quelques-uns gesticulaient et se livraient à des contorsions fantastiques;
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