beaucoup plus grand quand les ministres re?oivent ordre de signaler leur adresse; car, en faisant des efforts extraordinaires pour se surpasser eux-m��mes et pour l'emporter sur les autres, ils font presque toujours des chutes dangereuses.
On m'assura qu'un an avant mon arriv��e, Flimnap se serait infailliblement cass�� la t��te en tombant, si un des coussins du roi ne l'e?t pr��serv��.
Il y a un autre divertissement qui n'est que pour l'empereur, l'imp��ratrice et pour le premier ministre. L'empereur met sur une table trois fils de soie tr��s d��li��s, longs de six pouces; l'un est cramoisi, le second jaune, et le troisi��me blanc. Ces fils sont propos��s comme prix �� ceux que l'empereur veut distinguer par une marque singuli��re de sa faveur. La c��r��monie est faite dans la grand'chambre d'audience de Sa Majest��, o�� les concurrents sont oblig��s de donner une preuve de leur habilet��, telle que je n'ai rien vu de semblable dans aucun autre pays de l'ancien ou du nouveau monde.
L'empereur tient un baton, les deux bouts parall��les �� l'horizon, tandis que les concurrents, s'avan?ant successivement, sautent par-dessus le baton. Quelquefois l'empereur tient un bout et son premier ministre tient l'autre; quelquefois le ministre le tient tout seul. Celui qui r��ussit le mieux et montre plus d'agilit�� et de souplesse en sautant est r��compens�� de la soie cramoisie; la jaune est donn��e au second, et la blanche au troisi��me. Ces fils, dont ils font des baudriers, leur servent dans la suite d'ornement et, les distinguant du vulgaire, leur inspirent une noble fiert��.
L'empereur ayant un jour donn�� ordre �� une partie de son arm��e, log��e dans sa capitale et aux environs, de se tenir pr��te, voulut se r��jouir d'une fa?on tr��s singuli��re. Il m'ordonna de me tenir debout comme un autre colosse de Rhodes, mes pieds aussi ��loign��s l'un de l'autre que je les pourrais ��tendre commod��ment; ensuite il commanda �� son g��n��ral, vieux capitaine fort exp��riment��, de ranger les troupes en ordre de bataille et de les faire passer en revue entre mes jambes, l'infanterie par vingt-quatre de front, et la cavalerie par seize, tambours battants, enseignes d��ploy��es et piques hautes. Ce corps ��tait compos�� de trois mille hommes d'infanterie et de mille de cavalerie.
Sa Majest�� prescrivit, sous peine de mort, �� tous les soldats d'observer dans la marche la biens��ance la plus exacte envers ma personne, ce qui n'emp��cha pas quelques-uns des jeunes officiers de lever les yeux en haut pendant qu'ils passaient au-dessous de moi. Et, pour confesser la v��rit��, ma culotte ��tait alors en si mauvais ��tat qu'elle leur donna l'occasion d'��clater de rire.
J'avais pr��sent�� ou envoy�� tant de m��moires ou de requ��tes pour ma libert��, que Sa Majest��, �� la fin, proposa l'affaire, premi��rement au conseil des d��p��ches, et puis au Conseil d'��tat, o�� il n'y eut d'opposition que de la part du ministre Skyresh Bolgolam, qui jugea �� propos, sans aucun sujet, de se d��clarer, contre moi; mais tout le reste du conseil me fut favorable, et l'empereur appuya leur avis. Ce ministre, qui ��tait galbet, c'est-��-dire grand amiral, avait m��rit�� la confiance de son ma?tre par son habilet�� dans les affaires; mais il ��tait d'un esprit aigre et fantasque. Il obtint que les articles touchant les conditions auxquelles je devais ��tre mis en libert�� seraient dress��s par lui-m��me. Ces articles me furent apport��s par Skyresh Bolgolam en personne, accompagn�� de deux sous-secr��taires et de plusieurs gens de distinction. On me dit d'en promettre l'observation par serment, pr��t�� d'abord �� la fa?on de mon pays, et ensuite �� la mani��re ordonn��e par leurs lois, qui fut de tenir l'orteil de mon pied droit dans ma main gauche, de mettre le doigt du milieu de ma main droite sur le haut de ma t��te, et le pouce sur la pointe de mon oreille droite. Mais, comme le lecteur peut ��tre curieux de conna?tre le style de cette cour et de savoir les articles pr��liminaires de ma d��livrance, j'ai fait une traduction de l'acte entier mot pour mot:
?Golbasto momaren eulam�� gurdilo shefin mully ully gu��, tr��s puissant empereur de Lilliput, les d��lices et la terreur de l'univers, dont les ��tats s'��tendent �� cinq mille blustrugs (c'est-��-dire environ six lieues en circuit) aux extr��mit��s du globe, souverain de tous les souverains, plus haut que les fils des hommes, dont les pieds pressent la terre jusqu'au centre, dont la t��te touche le soleil, dont un clin d'oeil fait trembler les genoux des potentats, aimable comme le printemps, agr��able comme l'��t��, abondant comme l'automne, terrible comme l'hiver; �� tous nos sujets aim��s et f��aux, salut. Sa tr��s haute Majest�� propose �� l'homme Montagne les articles suivants, lesquels, pour pr��liminaire, il sera oblig�� de ratifier par un serment solennel:
?I. L'homme Montagne ne sortira point de nos vastes ��tats sans notre permission scell��e du grand sceau.
?II. Il ne prendra point la libert�� d'entrer
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