Les Visages du temps, poésie | Page 5

Huguette Bertrand
à tout jamais

DANS L'ONDULéE DES ONDES
Fascinants les souvenirs?remplis de hauts et de bas?d'éclats de rire de pleurs?de grincements de dents?de grincements de coeur?sur une balan?oire?tant?t vers le haut?tant?t vers le bas?quand toujours la vie en émoi?se laisse vivre sur les ondes?partagées?à même les jours ondulés

PHéNIX
Amoureuse?la mort se venge?dans les cendres du désir?cendres cruelles?cruels désirs?soulèvent les cendres?soulèvent les ailes?l'oiseau debout?issu des cendres?transcende l'amour?la mort au bec?retour aux cendres?un cri d'oiseau

DENSE ET DANSE
Devant le spontané du visage?le temps se fait danse?autour des heures?guide nos pas denses?et dansent les visages désirés?autour du temps?se rapprochent?du hasard étonné?désirs fulgurants?par moment improvisent?et dirigent?les regards?juxtaposés

ESSENTIELLEMENT
à travers mots et dires?les jours se rapprochent?de l'essentiel?s'excitent?sans maudire le sud?quand le corps s'honore?d'une danse?sonore?danse son nord

VIE SAGE DU TEMPS
Quand les visages s'agrippent au temps?le temps se crispe?haletant?me souffle des hiers?au bout d'un cri d'oiseau?m'accouche sur une surface bleu?libère quelques mots gris
à la croisée des larmes?et des rires?un visage éperdu?s'étonne?se moque du temps
il se repose

SOLO
Solitaire?la mémoire du coeur?reprend son souffle?se réserve des rencontres?d'un mot à l'autre?apprivoise les continents?sans broncher

MéNAGE D'AUTOMNE
Sortir l'ame de son présent?la dégraisser au varsol?la passer au savon du pays des songes?la secouer violemment?de toute traces amoureuses?la faire sécher sur les heures?puis?la voir dispara?tre?dans une nuée

DOUX EN NOUS
Songe d'ao?t??a coule de partout?le sang les pleurs?agonisent?sur la lèvre inférieure

REQUIEM POUR UNE DENT DE SAGESSE
Ci-g?t la dent apprivoisée?par un dentiste?de l'avoir soulagée?de quelques dollars?à faire dérailler les mots?abandonnés à leur sort

éLéMENTAL
Vertement dressée?la table d'émeraude?invite l'eau?le feu?le métal et le bois?sous la lumière unique?portée par le vent?la pluie?en nos êtres?démesurés

JUMELAGE
Sur l'étendue captive?de nos différences?des pensées s'égrènent?éperdues de lumière?comme des enfants?s'offrent?d'une rive à l'autre

GOUTTE VAGUE
Mortellement?une goutte d'eau plonge?dans la vague éternelle?du mouvement?s'enroule autour des désirs?caresse les pas?sur les plages amoureuses?balayées par le temps?qu'un simple souvenir?vient éveiller?en nos coeurs doux délirants?doux délires retenus?toujours en émoi

LAPIS LAZULI DE LA PIE LA JOLIE
De ce tableau?l'abondance inonde la galerie?montre la détente?quand la femme déborde d'elle?on la préfère offerte?sur le mur des insolences?on la pense?on la trie propre?on la tripote?on la nomme?chose sacrée?on la projette?dans l'instant male

UN PEU DE NOUS
un peu chaque jour?l'ame?sous la pierre humide?se décha?ne?s'enchaine au corps étrange?tellement lointain?glisse?sur la rivière de ses rêves?tellement tout proche?de la vie des alentours?toujours trop lourd?en silence?verse l'amour?dans ce poème?délivrée

BLEU TENDRESSE
à travers les bruits du corps?une berceuse accuse le fleuve?ses horizons?se parfume à l'eau vive?de la tendresse?répand les frissons
?a berce bleu??a frissonne en noir??a se per?oit comme une présence?parfumée à l'amour?pour l'illusion?la main sur le coeur?devenu silence

LES PASSANTES
Trois petites misères se promènent?sur les toits gris?de la ville?s'arrêtent ?a et là?à l'orée des cheminées?grignotent sur la table?des invités?quelques paroles débiles?sans formalité progressent?vers des sentiments lointains?entrevus?par le bout de la lorgnette?du coeur borgne

L'INNOMMéE
Elle ne se nomme pas. Elle est tout simplement de passage dans un instant qui n'a pas de nom. Elle se prononce dans une parole devenue insaisissable. Elle est insupportable devant tous les cerveaux qui font bombance. Elle se répète toujours dans le multiple en ses différences. Son frère se nomme silence, sa soeur se nomme absence. Cependant, elle ne sait pas se taire. Sans cesse se heurte à des co?ncidences qui, de plus en plus, creuse le vide devenu immense. Elle soulève des blancs, y appose une parole, et ne la reprend jamais. Elle révèle tous ses secrets dans une seule parole répétée. Elle est captive dans l'instant, existe pour la forme, bien évidemment ! Elle sécrète des mots qui prennent sa forme, toujours puisés dans cet instant. Elle ne sait faire autrement. Elle devient mirage dans l'imaginaire de qui la voit. Par le regard, on croit parfois la reconna?tre sans la conna?tre. Elle ne dit rien. Elle sait, sans savoir.

CHAUDEMENT L'ARGILE
Au commencement était l'argile?puis le centre à rechercher?minutie du geste?regard posé sur le mouvement?des formes arrondies?dans le feu erre?sans fin?intouchable en ses bruits?insondable en ses nuits?impénétrable visage?à l'abri des extases?dérive sur le bleu de la matière?matière fluide?sans cesse renouvelée?vibre s'infuse?à même la terre?partagée

FISSURE
Un ciel rouge orange feu?m'éclate en pleine figure?court moment d'envol?vers le figé des gestes?qu'arpente un chaud regard?circulaire
à peine quelques traces sur la neige?imprimées dans l'ame?d'un bleu boréal?moments inviolables?projetés dans la fissure?des mots?tus

CéSURE
Propulsé sur le fondant de l'horizon?un mouvement interdit?plonge dans les braises de l'ame?qu'enserre un doux regard?interrompu?par la violence des flammes?apaisées par le lointain?de la surface chaude?d'un ventre imaginé

LA VIE à VIDE
Un regard?une fuite?un train d'enfer?roulent sur les parois d'un vide?infini?projettent sur d'autres regards?des moments doux?et chauds?toujours éphémères

PARCOURS
à l'horizon?un murmure soulève?une tempête de braises?toujours aper?ue?dans un regard?exilé sur la piste infini?de l'être?dévoré par les mots?toujours en marche?dans le tracé fluide?de l'instant

BLEU DE PRéSENCE
Derrière le voile?une présence s'immisce?dans le feu des mots?sous la peau?sillonne les prés de la mémoire?s'apaise aux commissures des lèvres?qu'un souffle anime?dans la fange des aurores?abreuvées?à la source de l'écume?que les vagues transportent?jusqu'à l'angle des corps?inaltérables?inaltérés
déchirée?l'histoire se faufile?dans le blanc?d'un prénom?absolu
24.09.99

? éditions En Marge et Huguette Bertrand?Dép?t légal / octobre 1999?Bibliothèque nationale du Canada?Bibliothèque nationale du Québec?ISBN 2-921818-16-7?Tous droits réservés - All rights reserved

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