Les Quarante-cinq, vol 1 | Page 5

Alexandre Dumas, père
pour le ramener sur le cavalier.
-- Mais, dit-il, puisqu'on annonce que ce Salc��de appartient �� M. de Guise, ce n'est d��j�� point un si mauvais rago?t.
-- Bah! on dit cela? reprit le Gascon curieux ouvrant de grandes oreilles.
-- Oui, sans doute, on dit cela, on dit cela, r��pondit le cavalier en haussant les ��paules; mais, par le temps qui court, on dit tant de sornettes.
-- Ah! ainsi, hasarda Briquet avec son oeil interrogateur et son sourire narquois, ainsi, vous croyez, monsieur, que Salc��de n'est point �� M. de Guise?
-- Non-seulement je le crois, mais j'en suis s?r, r��pondit le cavalier. Puis comme il vit que Robert Briquet, en se rapprochant de lui, faisait un mouvement qui voulait dire: Ah bah! et sur quoi appuyez-vous cette certitude? il continua:
-- Sans doute, si Salc��de e?t ��t�� au duc, le duc ne l'e?t pas laiss�� prendre, ou tout au moins ne l'e?t pas laiss�� amener ainsi de Bruxelles �� Paris, pieds et poings li��s, sans faire au moins en sa faveur une tentative d'enl��vement.
-- Une tentative d'enl��vement, reprit Briquet, c'��tait bien hasardeux; car enfin, qu'elle r��uss?t ou qu'elle ��chouat, du moment o�� elle venait de la part de M. de Guise, M. de Guise avouait qu'il avait conspir�� contre le duc d'Anjou.
-- M. de Guise, reprit s��chement le cavalier, n'e?t point ��t�� retenu far cette consid��ration, j'en suis s?r, et, du moment o�� il n'a ni r��clam�� ni d��fendu Salc��de, c'est que Salc��de n'est point �� lui.
-- Cependant, excusez si j'insiste, continua Briquet; mais ce n'est pas moi qui invente; il para?t certain que Salc��de a parl��.
-- O�� cela? devant les juges?
-- Non, pas devant les juges, monsieur, �� la torture.
-- N'est-ce donc pas la m��me chose? demanda ma?tre Robert Briquet, d'un air qu'il essayait inutilement de rendre na?f.
-- Non, certes, ce n'est pas la m��me chose, il s'en faut: d'ailleurs on pr��tend qu'il a parl�� soit; mais on ne r��p��te point ce qu'il a dit.
-- Vous m'excuserez encore, monsieur, reprit Robert Briquet: on le r��p��te et tr��s longuement m��me.
-- Et qu'a-t-il dit? voyons! demanda avec impatience le cavalier; parlez, vous qui ��tes si bien instruit.
-- Je ne me vante pas d'��tre bien instruit, monsieur, puisque je cherche au contraire �� m'instruire pr��s de vous, r��pondit Briquet.
-- Voyons! entendons-nous! dit le cavalier avec impatience; vous avez pr��tendu qu'on r��p��tait les paroles de Salc��de; ses paroles, quelles sont- elles? dites.
-- Je ne puis r��pondre, monsieur, que ce soient ses propres paroles, dit Robert Briquet qui paraissait prendre plaisir �� pousser le cavalier.
[Illustration: Le Gascon avait le regard clair et les cheveux jaunes et cr��pus. -- PAGE 10.]
-- Mais enfin, quelles sont celles qu'on lui pr��te?
-- On pr��tend qu'il a avou�� qu'il conspirait pour M. de Guise.
-- Contre le roi de France sans doute? toujours m��me chanson!
-- Non pas contre Sa Majest�� le roi de France, mais bien contre Son Altesse monseigneur le duc d'Anjou.
-- S'il a avou�� cela....
-- Eh bien? demanda Robert Briquet.
-- Eh bien! c'est un mis��rable, dit le cavalier en fron?ant le sourcil.
-- Oui, dit tout bas Robert Briquet; mais s'il a fait ce qu'il a avou��, c'est un brave homme. Ah! monsieur, les brodequins, l'estrapade et le coquemar font dire bien des choses aux honn��tes gens.
-- H��las! vous dites l�� une grande v��rit��, monsieur, dit le cavalier en se radoucissant et en poussant un soupir.
-- Bah! interrompit le Gascon qui, en allongeant la t��te dans la direction de chaque interlocuteur, avait tout entendu, bah! brodequins, estrapade, coquemar, belle mis��re que tout cela! Si ce Salc��de a parl��, c'est un coquin, et son patron un autre.
-- Oh! oh! fit le cavalier ne pouvant r��primer un soubresaut d'impatience, -- vous chantez bien haut, monsieur le Gascon.
-- Moi?
-- Oui, vous.
-- Je chante sur le ton qu'il me pla?t, cap de Bious! tant pis pour ceux �� qui mon chant ne pla?t pas.
Le cavalier fit un mouvement de col��re.
-- Du calme! dit une voix douce en m��me temps qu'imp��rative, dont Robert Briquet chercha vainement �� reconna?tre le propri��taire.
Le cavalier parut faire un effort sur lui-m��me; cependant il n'eut pas la puissance de se contenir tout �� fait.
-- Et connaissez-vous bien ceux dont vous parlez, monsieur? demanda-t-il au Gascon.
-- Si je connais Salc��de?
-- Oui.
-- Pas le moins du monde.
-- Et le duc de Guise?
-- Pas davantage.
-- Et le duc d'Alen?on?
-- Encore moins.
-- Savez-vous que M. de Salc��de est un brave?
-- Tant mieux; il mourra bravement alors.
-- Et que M. de Guise, quand il veut conspirer, conspire lui-m��me?
-- Cap de Bious! que me fait cela?
-- Et que M. le duc d'Anjou, autrefois M. d'Alen?on, a fait tuer ou laiss�� tuer quiconque s'est int��ress�� �� lui, -- La Mole, -- Coconas, -- Bussy et le reste?
-- Je m'en moque.
-- Comment! vous vous en moquez?
-- Mayneville! Mayneville! murmura la m��me voix.
-- Sans doute, je m'en moque. Je ne sais
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