f��te et l'amour du public.
Je crois bien que M. Sainte-Beuve eut quelque souci du livre nouveau; mais il s'en repentit, comme a fait plus tard George Sand, effa?ant de ses pages le titre du livre et le nom de l'auteur. Cependant l'Ane mort a fait son chemin; on l'a mis en tableau, en gravure, en mauvais drame, et l'illustration de ce petit conte fut le dernier travail de Tony Johannot. D'autres livres sont venus plus tard qui ne devaient pas le laisser vivre. On ne va pas �� l'Ane mort quand on peut lire Eug��nie Grandet et Notre-Dame de Paris. Mais quoi! peu de lecteurs suffisent �� l'homme sens��: Contentus paucis lectoribus, disait Horace, et l'auteur de l'Ane mort, apr��s quelques tentatives pour arriver �� son premier succ��s, finit par traduire Horace et ne trouva pas de concurrents. Il a fait plus tard un livre assez consid��rable: la Fin d'un Monde et du Neveu de Rameau, dont la premi��re ��dition--? surprise!--est ��puis��e au bout de cinq ans, sans que l'auteur ait pu se plaindre de la critique ni de la curiosit�� de ses contemporains.
C'est donc en souvenir de l'Ane mort et la Femme guillotin��e que M. Ars��ne Houssaye lui d��dia: Le Chien perdu et la Femme fusill��e. Or, cette fois, vous pourrez juger �� quel point de r��alisme, et, disons mieux, de v��rit��, l'illustre ��crivain a pouss�� les qualit��s par lesquelles il est parvenu �� composer les Grandes Dames, les Parisiennes et les Courtisanes du monde. Il a choisi pour son texte: les Epouvantements et les Ab?mes, c'est-��-dire les derniers jours de l'infame Commune. Il la conna?t par coeur, il la conna?t aussi bien qu'il conna?t le grand monde et le demi-monde; et quand vous aurez lu ces deux tomes des ab?mes et des ��pouvantements, ne vous ��tonnez pas que vous sachiez toute cette histoire. Ah! voil�� bien cette autre fin d'un monde au milieu des flammes et des ��gorgements!
Il y avait, en ce temps-l��, un franc-tireur qui sauvait un chien d'une mort certaine; il s'appelait Ducharme; il ��tait amoureux d'une certaine Virginie Duportail, qui lui rendait amour pour amour, mais aussi trahison pour trahison. Elle riait quand elle avait bien tromp�� un amoureux de sa beaut��; elle ��tait m��l��e �� ces histoires de Belleville et de l'H?tel de ville. S'il y avait une barricade, elle abordait la barricade avec du vin de Champagne. Enfin, s'il ��tait terrible, elle ��tait violente. Elle vivait avec ce qu'il y avait de pire �� Paris, et l'auteur ne se g��ne pas pour les hommes, disant: ?Celui-ci est un Spartiate et celui-l�� est un Ath��nien de barri��re!? Entre tous ces jeunes gens il y avait ce beau chien nomm�� Thermidor, tr��s-bien venu des bataillons de Montmartre, de Montrouge et de M��nilmontant.
Thermidor est une b��te plus int��ressante, et plus aimable que l'Ane mort. Il gambade autour de ces terroristes, Raoul Rigault et Gustave Flourens! Pauvre Flourens! je l'ai connu beaucoup, moi qui vous parle; il ��tait simple et bon. Il serait rest�� tout un jour assis dans le m��me fauteuil et r��vant, Dieu sait �� quoi! Nous avons aussi, �� cot�� du chien Thermidor, le citoyen Carnaval, qui nous fait rire, et puis Mlle de Volnay, qui se tue �� la grande fa?on romaine, �� la fa?on de Lucr��ce, et qui n'en meurt pas! Bref, d��s les premi��res pages, tout se m��le et se confond dans ce r��cit, qui est d��j�� le r��cit d'un autre monde.
Avant l'heure o�� les soldats de Versailles s'emparent de Paris et viennent �� bout de la Commune, le peintre excelle �� nous montrer les communards dans leur d��sordre et dans leur d��sastre. Ici Jules Vall��s apostrophant Courbet; plus loin Dacosta tendant son verre �� Th��ophile Ferr��. On ne boit plus dans tout Paris que du vin de Champagne, hormis du vin bleu; on n'entend plus que les ��chos de la Marseillaise, et nous avons vu le moment o�� l'on allait repr��senter l'oeuvre nouvelle de M. Pyat. Mais sa prudence a pressenti l'orage; il avait peur d'��tre siffl��--et fusill��! Et tout ce monde en m��me temps piaule et rugit, et chante, et crie. Il y en a qui s'enivrent, d'autres qui se cachent, plusieurs font l'amour, plusieurs s'en vont �� Versailles �� une partie o�� les com��diennes d��clament des vers de Th��ophile Gautier. Les demoiselles perdent des discr��tions, les dames perdent leur mouchoir, les vivandi��res gagnent des f��d��r��s, les honn��tes femmes se cachent et font de la charpie. Le colonel Rossel, le g��n��ral Dombrowski, M. de Rochefort, r��gnent et gouvernent. Le gamin de Paris s'en va de l'un �� l'autre, et la belle Angeline Duportail fait la garde �� l'H?tel de ville.
Aventures monstrueuses! On s'empare �� la fin d'Angeline Duportail, et, dans un h?tel du parc Monceaux, on la fusille; elle tombe �� la porte de Violette, une h��ro?ne des Grandes
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