Lenfer et le paradis de lautre monde | Page 8

Émile Chevalier
mains avec une expression de douleur navrante.
Elle lutta violemment. Mille ��motions la torturaient. Son amour pour ses parents, pour sa religion, et puis...
Qui pourrait expliquer les sensations qui soul��vent son coeur? qui pourrait dire d'o�� lui viennent ces affreuses incertitudes? Personne! A personne donc le pouvoir de la juger.
L'ame est une puissance ��trange. Dieu seul peut lire et bien lire dans ses replis.
A vous, cela est d��fendu.
--Ellen! s'��cria tout �� coup madame Mordaunt sortant en sursaut d'une longue r��verie, o�� est Madeleine?
--Mais je ne sais pas, r��pliqua celle-ci d'un ton �� demi ��veill��; je ne l'ai point vue sortir...
--Seigneur mon Dieu! elle est sortie avec son chapeau[1]! O�� peut-elle ��tre? s'��cria la pauvre m��re, s'��lan?ant vers la porte.
[Note 1: On sait qu'en Am��rique le chapeau est la coiffure ordinaire des femmes, m��me dans les plus basses conditions.]
Tout ��tait calme au dehors. La, lune brillait d'un ��clat mat sur la blanche neige; le vent avait cess�� de souffler, mais il faisait tr��s-froid.
Madeleine ne paraissait point aupr��s de la maison.
Sa m��re appela; mais Madeleine ne r��pondit pas.
Pauvre m��re, elle lut dans cette paleur livide et dans cette tranquillit�� glaciale r��pandues autour d'elle une autre page du livre de ses chagrins!
Rentrant dans la chambre, elle tacha de r��veiller son fils, qui gisait presque sans connaissance sur le plancher.
--Mark, Mark! ta soeur Madeleine est partie; Vite, Mark, mon brave gar?on, cours apr��s ta soeur. Oh! Madeleine, Madeleine, ma pauvre fille!
--Aller o��? balbutia le dormeur se soulevant sur le coude et ��tendant sur sa m��re un regard h��b��t��.
--Oh! le ciel me vienne en aide, car je ne sais o��... Mark, va la chercher, si tu l'aimes, va! Je t'en prie, ram��ne-la, Mark, ram��ne-la!
Le jeune homme passa la main sur son front appesanti par l'ivresse, regarda vaguement ?�� et l��, mais ne parut pas comprendre.
--Madeleine partie! dit-il pourtant en se mettant debout. O�� ?a partie? Comment?--o�� est-elle all��e?
--Mais elle vient de partir... Tu peux la sauver... tu peux la trouver; mais va, cours apr��s elle. ?a me tuerait, vois-tu, Mark, s'il lui arrivait quelque chose!
--Ma m��re, dit Mark, qui parut rena?tre quelque peu au sentiment... elle n'est jamais sortie ainsi; avez-vous jamais su quelque chose?... Le connaissez-vous, ma m��re?... Mais c'est impossible!... Elle ne serait pas partie comme ?a... Donnez-moi mon baton. Je les trouverai; n'ayez pas peur... Allons, ?a donnera encore lieu �� d'autres crimes qu'�� des incendie... Je les trouverai; n'ayez pas peur... pas peur... ma m��re!
En pronon?ant ces mots, il s'��lan?a furieusement sur la voie publique et suivit une petite trace qui semblait avoir ��t�� nouvellement faite sur la neige et allait du c?t�� de la ville.
Le p��re revient du th��atre de l'incendie allum�� par son fils.
Sa femme et sa fille Ellen pleurent �� chaudes larmes; leurs sanglots font saigner son coeur.
--Marguerite, quel nouveau malheur? pourquoi pleures-tu?
--Oh! Edouard, cher Edouard! notre Madeleine, notre pauvre Madeleine est partie... je ne sais o��. Et je n'ose te dire ce que je soup?onne...
Ce qu'elle voulait lui cacher, il le voit dans ses yeux rougis de larmes. Ce coup manquait �� ses douleurs.
--Marguerite, nous la retrouverons, dit-il d'une voix sombre; calme tes craintes jusqu'�� mon retour. Madeleine a toujours ��t�� fid��le �� ses devoirs, et sans doute tous nos enfants ne deviendront pas mauvais sujets dans ce pays. Nous la retrouverons...
Le malheureux p��re n'en dit pas davantage. Il sort de nouveau pour chercher sa fille qui lui est si ch��re, et le voil�� qui court comme un fou �� travers la neige.
Sa t��te est br?lante et son ame est en proie �� mille tourments.

CHAPITRE III
LA MAISON ABANDONN��E
La nuit s'est ��coul��e; la matin��e grise et froide commence �� se montrer, sa lueur terne arrive paresseusement dans la cabane.
Qu'y voyons-nous?
Une m��re et ses enfants, ��tendus sur le m��me grabat, go?tent les bienfaits du sommeil, cet avant-coureur du ciel qui apporte le repos m��me �� l'ame troubl��e.
Regardez-les.
Elle est couch��e dans un coin, l�� o�� la neige s'est introduite et a m��l�� �� la paille ses glaciales constellations. Sur elle, pauvre femme, le froid de la nuit a jet�� une mantille de frimas et souffle la bise p��n��trante. Son nourrisson est cramponn�� �� sa poitrine et l'haleine du pauvre petit se g��le en blanches concr��tions le long de la chevelure de sa m��re, qui pend par m��ches ��parses, ��paisses, roidies sur son front.
Elle tressaille, soul��ve la t��te, et ses yeux inject��s de sang sont tourn��s vers la porte.
Elle ��coute.
Mais tout est encore tranquille au dehors et, avec un profond soupir, elle se laisse retomber et presse l'enfant contre, son coeur.
Elle tressaille encore, soul��ve de nouveau sa t��te et la laisse choir sur le grossier oreiller.
Son haleine est sifflante, ses yeux rouges et obscurcis; mais aussi, durant cette longue et fatigante nuit, le sommeil n'a pas un seul moment vers�� sur elle son baume r��parateur.
Ellen est couch��e �� c?t�� de sa m��re.
Elle
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