Le vicomte de Bragelonne, Tome IV. | Page 5

Alexandre Dumas
garder jusqu��au bout ce calme et cette s��r��nit�� qui faisaient le c?t�� presque surhumain de son caract��re, il r��pondit:
-- Raoul, je ne crois rien de ce que l��on dit; je ne crois rien de ce que vous craignez, non pas que des personnes dignes de foi ne m��aient pas d��j�� entretenu de cette aventure, mais parce que, dans mon ame et dans ma conscience, je crois impossible que le roi ait outrag�� un gentilhomme. Je garantis donc le roi, et vais vous rapporter la preuve de ce que je dis.
Raoul, flottant comme un homme ivre entre ce qu��il avait vu de ses propres yeux et cette imperturbable foi qu��il avait dans un homme qui n��avait jamais menti, s��inclina et se contenta de r��pondre:
-- Allez donc, monsieur le comte; j��attendrai.
Et il s��assit, la t��te cach��e dans ses deux mains. Athos s��habilla et partit. Chez le roi, il fit ce que nous venons de raconter �� nos lecteurs, qui l��ont vu entrer chez Sa Majest�� et qui l��ont vu en sortir.
Quand il rentra chez lui, Raoul, pale et morne n��avait pas quitt�� sa position d��sesp��r��e. Cependant au bruit des portes qui s��ouvraient, au bruit des pas de son p��re qui s��approchait de lui, le jeune homme releva la t��te.
Athos ��tait pale, d��couvert, grave; il remit son manteau et son chapeau au laquais, le cong��dia du geste et s��assit pr��s de Raoul.
-- Eh bien! monsieur, demanda le jeune homme en hochant tristement la t��te de haut en bas, ��tes-vous bien convaincu, �� pr��sent?
-- Je le suis, Raoul; le roi aime Mlle de La Valli��re.
-- Ainsi, il avoue? s����cria Raoul.
-- Absolument, dit Athos.
-- Et elle?
-- Je ne l��ai pas vue.
-- Non; mais le roi vous en a parl��. Que dit-il d��elle?
-- Il dit qu��elle l��aime.
-- Oh! vous voyez! vous voyez, monsieur!
Et le jeune homme fit un geste de d��sespoir.
-- Raoul, reprit le comte, j��ai dit au roi, croyez-le bien, tout ce que vous eussiez pu lui dire vous-m��me, et je crois le lui avoir dit en termes convenables, mais fermes.
-- Et que lui avez-vous dit, monsieur?
-- J��ai dit, Raoul, que tout ��tait fini entre lui et nous, que vous ne seriez plus rien pour son service; j��ai dit que, moi-m��me, je demeurerais �� l����cart. Il ne me reste plus qu���� savoir une chose.
-- Laquelle, monsieur?
-- Si vous avez pris votre parti.
-- Mon parti? �� quel sujet?
-- Touchant l��amour et...
-- Achevez, monsieur.
-- Et touchant la vengeance; car j��ai peur que vous ne songiez �� vous venger.
-- Oh! monsieur, l��amour... peut-��tre un jour, plus tard, r��ussirai-je �� l��arracher de mon coeur. J��y compte, avec l��aide de Dieu et le secours de vos sages exhortations. La vengeance, je n��y avais song�� que sous l��empire d��une pens��e mauvaise, car ce n����tait point du vrai coupable que je pouvais me venger; j��ai donc d��j�� renonc�� �� la vengeance.
-- Ainsi, vous ne songez plus �� chercher une querelle �� M. de Saint Aignan?
-- Non, monsieur. Un d��fi a ��t�� fait; si M. de Saint-Aignan l��accepte, je le soutiendrai; s��il ne le rel��ve pas, je le laisserai �� terre.
-- Et de La Valli��re?
-- Monsieur le comte n��a pas s��rieusement cru que je songerais �� me venger d��une femme, r��pondit Raoul avec un sourire si triste, qu��il attira une larme aux bords des paupi��res de cet homme qui s����tait tant de fois pench�� sur ses douleurs et sur les douleurs des autres.
Il tendit sa main �� Raoul, Raoul la saisit vivement.
-- Ainsi, monsieur le comte, vous ��tes bien assur�� que le mal est sans rem��de? demanda le jeune homme.
Athos secoua la t��te �� son tour.
-- Pauvre enfant! murmura-t-il.
-- Vous pensez que j��esp��re encore, dit Raoul, et vous me plaignez. Oh! c��est qu��il m��en co?te horriblement, voyez-vous, pour m��priser, comme je le dois, celle que j��ai tant aim��e. Que n��ai-je quelque tort envers elle, je serais heureux et je lui pardonnerais.
Athos regarda tristement son fils. Ces quelques mots que venait de prononcer Raoul semblaient ��tre sortis de son propre coeur. En ce moment, le laquais annon?a M. d��Artagnan. Ce nom retentit, d��une fa?on bien diff��rente, aux oreilles d��Athos et de Raoul.
Le mousquetaire annonc�� fit son entr��e avec un vague sourire sur les l��vres. Raoul s��arr��ta; Athos marcha vers son ami avec une expression de visage qui n����chappa point �� Bragelonne. D��Artagnan r��pondit �� Athos par un simple clignement de l��oeil; puis, s��avan?ant vers Raoul et lui prenant la main:
-- Eh bien! dit-il s��adressant �� la fois au p��re et au fils, nous consolons l��enfant, �� ce qu��il para?t?
-- Et vous, toujours bon, dit Athos, vous venez m��aider �� cette tache difficile.
Et, ce disant, Athos serra entre ses deux mains la main de d��Artagnan. Raoul crut remarquer que cette pression avait un sens particulier �� part celui des paroles.
-- Oui, r��pondit le mousquetaire en se grattant la moustache de la main qu��Athos lui laissait
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