Le vicomte de Bragelonne, Tome III. | Page 7

Alexandre Dumas
souffert.
-- Supposons donc cette fable que je l��aime et que je l��aie distingu��. Le roi est si na?f et si orgueilleux �� la fois, qu��il me croira, et alors nous irons raconter cette na?vet�� du roi, et nous rirons.
-- Oh! s����cria La Valli��re, penser cela, penser cela, c��est affreux!
-- Et, poursuivit le roi, ce n��est pas tout: si ce prince orgueilleux vient �� prendre au s��rieux la plaisanterie, s��il a l��imprudence d��en t��moigner publiquement quelque chose comme de la joie, eh bien! devant toute la cour, le roi sera humili��; or, ce sera, un jour, un r��cit charmant �� faire �� mon amant, une part de dot �� apporter �� mon mari, que cette aventure d��un roi jou�� par une malicieuse jeune fille.
-- Sire! s����cria La Valli��re ��gar��e, d��lirante, pas un mot de plus, je vous en supplie; vous ne voyez donc pas que vous me tuez?
-- Oh! raillerie, murmura le roi, qui commen?ait cependant �� s����mouvoir.
La Valli��re tomba �� genoux, et cela si rudement, que ses genoux r��sonn��rent sur le parquet.
Puis, joignant les mains:
-- Sire, dit-elle, je pr��f��re la honte �� la trahison.
-- Que faites-vous? demanda le roi, mais sans faire un mouvement pour relever la jeune fille.
-- Sire, quand je vous aurai sacrifi�� mon honneur et ma raison, vous croirez peut-��tre �� ma loyaut��. Le r��cit qui vous a ��t�� fait chez Madame et par Madame est un mensonge; ce que j��ai dit sous le grand ch��ne...
-- Eh bien?
-- Cela seulement, c����tait la v��rit��.
-- Mademoiselle! s����cria le roi.
-- Sire, s����cria La Valli��re entra?n��e par la violence de ses sensations, Sire, duss��-je mourir de honte �� cette place o�� sont enracin��s mes deux genoux, je vous le r��p��terai jusqu���� ce que la voix me manque: j��ai dit que je vous aimais... eh bien! je vous aime!
-- Vous?
-- Je vous aime, Sire, depuis le jour o�� je vous ai vu, depuis qu���� Blois, o�� je languissais, votre regard royal est tomb�� sur moi, lumineux et vivifiant; je vous aime! Sire. C��est un crime de l��se-majest��, je le sais, qu��une pauvre fille comme moi aime son roi et le lui dise. Punissez-moi de cette audace, m��prisez-moi pour cette imprudence; mais ne dites jamais, mais ne croyez jamais que je vous ai raill��, que je vous ai trahi. Je suis d��un sang fid��le �� la royaut��, Sire; et j��aime... j��aime mon roi!... Oh! je me meurs!
Et tout �� coup, ��puis��e de force, de voix, d��haleine, elle tomba pli��e en deux, pareille �� cette fleur dont parle Virgile et qu��a touch��e la faux du moissonneur.
Le roi, �� ces mots, �� cette v��h��mente supplique, n��avait gard�� ni rancune, ni doute; son coeur tout entier s����tait ouvert au souffle ardent de cet amour qui parlait un si noble et si courageux langage.
Aussi, lorsqu��il entendit l��aveu passionn�� de cet amour, il faiblit, et voila son visage dans ses deux mains.
Mais, lorsqu��il sentit les mains de La Valli��re cramponn��es �� ses mains, lorsque la ti��de pression de l��amoureuse jeune fille eut gagn�� ses art��res, il s��embrasa �� son tour, et, saisissant La Valli��re �� bras-le-corps, il la releva et la serra contre son coeur.
Mais elle, mourante, laissant aller sa t��te vacillante sur ses ��paules, ne vivait plus.
Alors le roi, effray��, appela de Saint-Aignan.
De Saint-Aignan, qui avait pouss�� la discr��tion jusqu���� rester immobile dans son coin en feignant d��essuyer une larme, accourut �� cet appel du roi.
Alors il aida Louis �� faire asseoir la jeune fille sur un fauteuil, lui frappa dans les mains, lui r��pandit de l��eau de la reine de Hongrie en lui r��p��tant:
-- Mademoiselle, allons, mademoiselle, c��est fini, le roi vous croit, le roi vous pardonne. Eh! l��, l��! prenez garde, vous allez ��mouvoir trop violemment le roi, mademoiselle; Sa Majest�� est sensible, Sa Majest�� a un coeur. Ah! diable! mademoiselle, faites- y attention, le roi est fort pale.
En effet, le roi palissait visiblement.
Quant �� La Valli��re, elle ne bougeait pas.
-- Mademoiselle! mademoiselle! en v��rit��, continuait de Saint- Aignan, revenez �� vous, je vous en prie, je vous en supplie, il est temps; songez �� une chose, c��est que si le roi se trouvait mal, je serais oblig�� d��appeler son m��decin. Ah! quelle extr��mit��, mon Dieu! Mademoiselle, ch��re mademoiselle, revenez �� vous, faites un effort, vite, vite!
Il ��tait difficile de d��ployer plus d����loquence persuasive que ne le faisait Saint-Aignan; mais quelque chose de plus ��nergique et de plus actif encore que cette ��loquence r��veilla La Valli��re.
Le roi s����tait agenouill�� devant elle, et lui imprimait dans la paume de la main ces baisers br?lants qui sont aux mains ce que le baiser des l��vres est au visage. Elle revint enfin �� elle, rouvrit languissamment les yeux, et, avec un mourant regard:
-- Oh! Sire, murmura-t-elle, Votre Majest�� m��a donc pardonn��?
Le roi ne r��pondit pas... il ��tait encore trop ��mu.
De Saint-Aignan crut devoir s����loigner de nouveau... Il avait
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 183
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.