Le monsieur au parapluie | Page 2

Jules Moinaux
gaillard sans g��ne et cria:--Je ne suis pas portier et je vous d��fends de me tutoyer.
--Monsieur est le propri��taire?
--Non, monsieur, je suis le concierge, et si vous ne sortez pas....
--Si je ne sors pas, je resterai, naturellement.
Et sans attendre la r��plique du concierge:
--Oh! quels mollets! s'��cria notre loustic en apercevant dans la rue une jeune femme retrouss��e jusqu'aux genoux et marchant hativement sur le bout de ses petites bottines.
Et il se pr��cipita �� la porte pour suivre du regard les deux jolies jambes qui s'��loignaient.
--Qu'est-ce que c'est que cet ostrogot-l��? se demanda le concierge.
C'��tait tout simplement un chercheur de bonnes fortunes �� l'aide d'un parapluie sous lequel il offrait d'abriter les jolies femmes surprises par l'averse. Malheureusement, ce jour-l��, surpris, lui aussi, il lui manquait l'instrument indispensable pour l'exercice de sa sp��cialit�� galante:--Et pas de parapluie! pour en offrir la moiti�� �� cette d��licieuse pi��tonne, dit-il. Revenant alors au concierge:--Vous n'auriez pas un parapluie �� me pr��ter, portier?
--Vous pr��ter un parapluie? Est-ce que je vous connais, moi?... est-ce que je sais qui vous ��tes, ce que vous faites?
--Bengali, chef d'orchestre �� la halle au beurre.
--Ah! vous vous fichez de moi? Eh bien, tachez de filer vite, ou je vous pousse dans la rue �� coups de balai.
--Essaie un peu voir, mon petit portier, et comme je cherche quelque chose �� louer et qu'il y a un ��criteau �� la porte, je vais trouver ton propri��taire et je lui dis....
Le concierge, alors, se mit �� ��num��rer rapidement et d'un ton rageur: grand salon, 3 fen��tres, petit salon, boudoir, grande salle �� manger, 5 chambres �� coucher, avec cabinets de toilette, 4 chambres de domestiques, cuisine, office, cave �� vins, cave �� bois, tout cela au premier sur la rue.
--Les caves aussi?... et ?a vaut?
--4,500 francs.
--C'est un peu plus que je ne voulais mettre.... Je cherche quelque chose dans les 120 francs au sixi��me: c'est pour ��lever des lapins.
--Eh! l��-bas! s'��cria le concierge, �� un gar?on boucher qui s'engageait dans l'escalier, vous ne voyez donc pas le paillasson? Est-ce qu'on l'a mis l�� pour les dromadaires, le paillasson?
Et il courut au fournisseur, pendant que Bengali contemplait son chapeau inond�� par l'averse:--C'est peut-��tre bon pour les petits pois, dit-il, mais pour les chapeaux, non.
Et, secouant son chapeau, il envoya de l'eau au visage d'un nouvel arrivant:--Hein! quoi? fait celui-ci, en bondissant comme un tigre, il ne me manquait plus que ?a!
Le nouveau venu ��tait un gros homme, un nerveux de l'esp��ce la plus d��sagr��able:--Oh! pardon, monsieur, lui dit Bengali, je ne vous voyais pas; je vous fais mille excuses.
--Eh! monsieur, mille excuses, mille excuses....
--Vous trouvez que ?a n'est pas assez? Soit, je vous en fais deux mille.
--On ne secoue pas ainsi un chapeau ruisselant.
--Je me permets de vous faire observer, monsieur, que s'il n'avait pas ��t�� ruisselant, je ne l'aurais pas secou��.
--Eh bien, monsieur, avant de le secouer, il fallait regarder autour de vous.
--Eh bien, monsieur, r��pondit Bengali agac��, j'ai eu tort de ne pas regarder autour de moi, voil�� tout.
--Mais non, monsieur, ne voil�� pas tout.
--Alors, monsieur, si mes explications et mes excuses ne vous suffisent pas, je vais avoir l'honneur de vous remettre ma carte; mais je vous pr��viens qu'on m'a surnomm�� le Dividende de Panama, vu qu'on ne me touche jamais.
--Qu'est-ce que c'est? cria le concierge, des provocations en duel, ici, dans une maison tranquille? Allez vous disputer ailleurs! Puis il pensa:--C'est une mauvaise t��te, ne le provoquons pas.
--Il ne s'agit pas de duel, dit le monsieur nerveux, calm�� par l'attitude de Bengali, c'est involontairement que monsieur m'a envoy�� de l'eau au visage et je me tiens pour satisfait de ses excuses.
--N'en parlons plus, monsieur, r��pondit le jeune homme, en lui tendant la main; vous me paraissez d'une humeur agr��able: enchant�� d'avoir fait votre connaissance.
--Moi, pareillement, monsieur. A qui ai-je l'honneur...?
--Bengali, fabricant de pi��ges �� tortues.
--Ah! s'��cria le concierge, vous m'avez dit que vous ��tiez chef d'orchestre �� la halle au beurre.
--Dans l'hiver, oui; les jours d'averses, chasseur de dames sans parapluie; je lui offre le mien sur la chanson du Br��silien:
Voulez-vous, Voulez-vous, Voulez-vous accepter mon bras?
Puis �� l'homme nerveux:--Et moi-m��me, monsieur, �� qui ai-je eu l'avantage de serrer la main?
--Marocain, commanditaire d'entreprises industrielles et artistiques.
--Vos opinions politiques?
--Ind��pendant, monsieur.
--Moins que moi, monsieur.
--Pardon, j'ai refus�� d'��tre scrutateur aux ��lections municipales, ne voulant pas accepter d'honneurs.
--Moi, monsieur, je ne regarde pas l'heure aux horloges publiques pour ne pas avoir d'obligations au gouvernement.
--Je n'accepte que des devoirs et c'est, fid��le �� ce principe, que je vais, de ce pas, tenir sur les fonts baptismaux le nouveau-n�� d'un vieil ami.
--Je vois que son parrain vient, aussi, d'��tre baptis��.
--A qui le dites-vous, monsieur! Je sors de chez moi par un temps superbe; naturellement, je ne prends pas de parapluie; et crac! voil�� un orage; jugez comme c'est agr��able quand on est, comme moi, en toilette,
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