Le lys noir | Page 6

Jules de Gastyne
promettait? Aux f��licit��s surhumaines?
--Certainement, Laurence est jolie.
--Ce n'est pas parce qu'elle est jolie que j'��tais fou, mais parce que je l'aime. Tu ne comprendras jamais cela, Mareuil, car tu ne l'aimes pas, toi, tu n'aimes pas.
--Et je n'y tiens gu��re, si l'amour devait me rendre aussi insens��.
Il se fit un silence.
Jacques de Br��court semblait tout �� son extase. On e?t dit qu'il avait devant lui la vision de l'image radieuse qu'il venait d'��voquer et que son ��tre tout entier adorait.
Jamais amour si sinc��re, si ardent et si pur n'avait peut-��tre encore embras�� une ame humaine.
Malgr�� son indiff��rence et son scepticisme m��me, le gros Mareuil en ��tait frapp��, et loin d'��tre dispos��, comme tout �� l'heure, �� railler son ami, il ��tait bien pr��s de l'envier.
L'amour est donc chose si belle et procure-t-il de telles joies?
Mais tout �� coup, la physionomie de Jacques de Br��court s'assombrit et il dit:
--Voil�� o�� j'en ��tais, dans quelles d��lices supraterrestres je nageais, sachant le mariage prochain, le jour presque fix��, quand ce soir, il y a quelques heures, madame de Fr��milly, comme le soir o�� elle m'avait dit de rester pour m'ouvrir le ciel, me fit encore, au moment o�� Laurence nous quittait, le m��me signe, �� peine perceptible, mais cette fois pour me plonger dans les horreurs et les t��n��bres de l'enfer. Je ne me doutais naturellement pas de ce qu'elle avait �� me dire, et je croyais qu'il s'agissait de quelque dernier d��tail �� r��gler, d'une clause du contrat peut-��tre �� fixer et qu'elle ne voulait pas d��battre devant Laurence, et je revins, apr��s avoir conduit Laurence jusqu'au seuil de la porte, m'asseoir �� la place que j'occupais, sans l'ombre d'une appr��hension, et les yeux encore tout ��blouis de la beaut�� de celle que je venais de quitter.
Un mot de madame de Fr��milly arr��ta sur mes l��vres le sourire heureux qui s'y ��panouissait, ��teignit dans mes yeux la lumi��re qui y brillait.
--Il faut, me dit-elle brusquement, et d��s que nous f?mes seuls, renoncer �� nos projets, monsieur de Br��court.
Je la regardai.
Je ne comprenais pas.... Je n'osais pas comprendre. Et pourtant, un frisson avait parcouru mon corps et glac�� tout mon sang.
Je demandai:
--Quels projets?
--Votre mariage avec Laurence, avec ma petite-fille.
Je jetai un cri.
J'aurais vu la terre s'entr'ouvrir, la foudre tomber �� mes pieds, que je n'aurais pas ��t�� plus saisi.
Je m'��criai:
--Ai-je bien entendu?
--Oui, monsieur de Br��court, vous avez bien entendu.
--Renoncer �� Laurence, moi?
--Il le faut.
--Jamais, madame, jamais!
Je m'��tais lev��. J'allais et venais �� travers le salon, comme un fou. Le sang bourdonnait maintenant �� mes temps. Je ne voyais plus. Je croyais m'agiter au milieu d'un r��ve, dans un monstrueux et horrible cauchemar.
Je voulais parler. La voix s'arr��tait dans mon gosier dess��ch��.
Je pus cependant b��gayer quelques mots �� peine compr��hensibles.
--Mais, madame, vous ne pensez pas....
--Si, monsieur, dit la grand'm��re, inflexible, et qui semblait, froide et ferme comme un roc.... J'ai bien r��fl��chi et ma d��cision est d��sormais irr��vocable.--
J'eus un cri d'angoisse.
--Mais pourquoi?...
--Ne me forcez pas, dit-elle, �� vous faire conna?tre mes raisons.... D'ailleurs, je ne les dirai pas.... Mais elles sont des plus s��rieuses, et il le fallait, croyez-le bien, pour que je me d��cidasse �� vous causer une telle peine et peut-��tre �� Laurence un tel chagrin.
En entendant ces derni��res paroles, un peu d'espoir rentra dans mon ame.
--Laurence ne sait donc pas? interrogeai-je.
--Laurence ne sait rien.
--Ce n'est donc pas, demandai-je encore, parce qu'elle ne m'aime pas, parce qu'elle ne veut plus de moi?
--Je ne lui demanderai pas, dit la douairi��re, son sentiment.... Mais je lui dirai qu'elle ne peut pas vous ��pouser, et elle m'ob��ira....
--C'est donc, fis-je, tout l'��tre criant de douleur, que vous me trouvez indigne?
--Je n'ai rien, d��clara-t-elle, �� dire �� ce sujet, mais....
Elle se leva comme pour me cong��dier.
Alors, je vis tout tourner autour de moi....
Il me semblait que la terre allait s'effondrer....
Je m'��croulai �� genoux....
--Ah! madame, m'��criai-je, avec un accent de d��tresse qui aurait attendri un roc, mais qui la laissa insensible ... ayez piti�� de moi!... Vous savez combien j'aime Laurence, quels r��ves j'ai faits!... C'est attenter �� ma vie que de me l'enlever maintenant, que de m'en s��parer, car s?rement j'en mourrai!... Dites-moi au moins pourquoi vous revenez sur votre parole.... Si c'est par ma faute ... parce que je vous ai d��plu, et que vous avez quelque reproche �� me faire, je tacherai de racheter ma d��faillance par une vie de d��vouement, de sacrifices, de....
Je m'arr��tai.
Je ne savais plus ce que je disais....
Des larmes grosses comme le doigt roulaient dans mes yeux.
Madame de Fr��milly ��tait toujours debout, se dirigeant vers la porte.
Je voyais qu'elle faisait des efforts pour rester insensible. Et avec sa haute taille ... sa paleur ... son grand air de dignit�� hautaine, elle avait l'air d'une imp��rieuse et inflexible statue ... justici��re d'une faute que j'ignorais ... et que j'ignore encore.
Je compris que
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