Le cycle patibulaire
The Project Gutenberg EBook of Le cycle patibulaire, by Georges Eekhoud This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org
Title: Le cycle patibulaire
Author: Georges Eekhoud
Release Date: March 29, 2006 [EBook #18074]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK LE CYCLE PATIBULAIRE ***
Produced by Carlo Traverso, Chuck Greif and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr)
GEORGES EEKHOUD
Le Cycle patibulaire
Deuxième édition
PARIS
SOCIéTé DV MERCVRE DE FRANCE
XV, RVE DE L'éCHAVDé-SAINT-GERMAIN, XV
M DCCC XCVI
DU MêME AUTEUR
Kees Doorik. Kermesses. Les Milices de Saint-Fran?ois. Nouvelles Kermesses. La Nouvelle Carthage. Les Fusillés de Malines. Au Siècle de Shakespeare. Mes Communions. Philaster (tragédie de Beaumont et Fletcher). La Duchesse de Malfi (tragédie de John Webster).
IL A éTé TIRé DE CET OUVRAGE:
_Trois exemplaires sur Japon impérial, numérotés de 1 à 3, et douze exemplaires sur Hollande, numérotés de 4 à 15._
LE CYCLE PATIBULAIRE
LE JARDIN
A Arnold Gaffin.
Allons, Monsieur Jules.... Un petit tour de jardin.... Il est dans son beau à présent.... Fille, ouvre donc la porte à monsieur... car il a l'air de ne pas savoir le chemin....
Ah! oui, le jardin!
Il s'enfon?ait, oblong et assez vaste, derrière la maison sans étage. On poussait une petite claire-voie peinte en vert qui le séparait de la cour et empêchait les poules d'y pénétrer. Par-dessus la haie vive émergeaient le clocher du village et la plus haute croix du cimetière. Une gloriette tressée de liserons, de capucines, d'aristoloches et de pois de senteur, occupait un des angles du fond.
C'est pourtant dans cet enclos rustique, trop régulier, à la fois courtil, jardin et potager, tracé au cordeau, propret et symétrique jusqu'à la manie, semé de plantes prolifiques et voyantes, arborant de gros fruits rubiconds et peu délicats, fleuri de roses perpétuelles, de dahlias, de tournesols, de pivoines; des carrés de choux alternant avec des buissons de groseilliers; c'est dans ce jardin vulgaire que vaguent obstinément mes souvenirs, à chaque printemps, quand il fait très doux et que cet air tiède vous serre tendrement la gorge et vous donne envie de pleurer....
Avec ses légumes violets, ses poiriers taillés en pyramides, à la fois luisant et haut en couleur, il me faisait l'effet d'un pataud endimanché, faraud et guindé, cachant sous des étoffes trop caties et peu co?teuses son grand corps charnu et taillé à grands coups.
En f?mes-nous souvent le tour, dans tous les sens; l'avons-nous parcouru de toutes fa?ons; me suis-je extasié, pour flatter ton brave homme de père, devant les puériles arabesques de buis et d'oeillets nains, devant ces petits chemins en spirale et cette statuette en platre portant sur la tête un vase de clématites,--dis, ma bien-aimée d'alors, ma plantureuse idole d'autrefois, ma taure bénigne aux fortes hanches, aux yeux confiants, aux joues framboisées!...
Si ce jardin d'un mauvais go?t si recherché et si barbare avait quelque chose de toi, mon fruste animal rose, à la fois vulgaire et appétissant!
Les grandes fleurs rondes s'y épanouissaient glorieusement; roses et giroflées embaumaient à outrance; cerises et groseilles y foisonnaient et les abeilles gloutonnes le pillaient sans vergogne.
Jardin radieux et candide! Comme toi, chère enfant, il éclatait d'un rire sonore, que d'aucuns eussent trouvé canaille. Et dans ton corsage de cotonnade, étreignant ta taille opulente, tu me semblais ces gros boutons de pivoines au moment de s'ouvrir à l'humidité de la rosée fra?che. Qui me définira ta beauté copieuse et tes charmes si bien ordonnés, jardin élu des sèves? Du jour où tu connus le jeu d'amour, mon aimée, tu le jouas avec la conscience que tu apportais à un beau travail profitable, aux fonctions saines et rémunératrices de la vie rurale.
Autant que toi ce jardin faisait l'orgueil de ton père le cabaretier:
--Allons, Monsieur Jules, un petit tour du jardin!...
Et tu m'y pilotais et m'en montrais les métamorphoses progressives, ? ma Chair non pareille!
Je m'intéressais, avec toi, aux végétations les plus discréditées. Charme du temps, atrocement cru, mais point banal, où fleurissent les pommes de terre! Temps humide, temps de gésine, temps gros, où la glèbe transpire et sent la luxure. Oh! je n'oublie pas l'odeur fétide et pourtant irritante de ces fleurs, ce parfum de racines qui tètent.... C'est par un jour de pluie chaude de juin que tu te ployais pour me cueillir des fraises et en te relevant ta croupe craquait et ondulait, comme chez une pouliche qui se trémousse, et je me penchai, et ton visage fr?la le mien, si à propos, que, bouche à bouche, nous confond?mes longtemps nos souffles, éperdus....
Baiser sain, savoureux, abondant.... Mais si tes lèvres avaient le go?t ambrosiaque de la fraise,
Continue reading on your phone by scaning this QR Code
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the
Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.