Le capitaine Pamphile | Page 8

Alexandre Dumas, père
nous nagions dans une atmosph��re �� faire marcher un bateau �� vapeur de la force de cent vingt chevaux.
Autant que cette fum��e pouvait le permettre, on distinguait, outre les invit��s, les commensaux ordinaires de la maison, avec lesquels le lecteur a d��j�� fait connaissance. C'��tait Gazelle, qui, �� dater de ce soir-l��, avait ��t�� prise d'une pr��occupation singuli��re: c'��tait celle de monter le long de la chemin��e de marbre, afin d'aller se chauffer �� la lampe, et qui se livrait avec acharnement �� cet incroyable exercice. C'��tait Tom, dont Alexandre Decamps s'��tait fait un appui, �� peu pr��s comme on fait d'un coussin de divan, et qui, de temps en temps, dressait tristement sa bonne t��te sous le bras de son ma?tre, soufflait bruyamment pour repousser la fum��e qui lui entrait dans les narines, puis se recouchait avec un gros soupir. C'��tait Jacques Ier, assis sur un tabouret �� c?t�� de son vieil ami Fau qui, �� grands coups de cravache, avait men�� son ��ducation au point de perfection o�� elle ��tait parvenue, et pour lequel il avait la reconnaissance la plus grande et surtout l'ob��issance la plus passive. Enfin, c'��tait, au milieu du cercle, et de son bocal, mademoiselle Camargo, dont les exercices gymnastiques et gastronomiques devaient plus particuli��rement faire les d��lices de la soir��e.
Il est important, arriv��s au point o�� nous en sommes, de jeter un coup d'oeil en arri��re, et d'apprendre �� nos lecteurs par quel concours inou? de circonstances mademoiselle Camargo, qui ��tait n��e dans la plaine Saint-Denis, se trouvait r��unie �� Tom, qui ��tait originaire du Canada, �� Jacques, qui avait vu le jour sur les c?tes d'Angola, et �� Gazelle, qui avait ��t�� p��ch��e dans les marais de Hollande.
On sait quelle agitation se manifeste �� Paris, dans les quartiers Saint-Martin et Saint-Denis, lorsque le mois de septembre ram��ne le retour de la chasse; on ne rencontre alors que bourgeois revenant du canal, o�� ils ont ��t�� se faire la main en tirant des hirondelles, tra?nant chiens en laisse, portant fusil sur l'��paule, se promettant d'��tre cette ann��e moins mazettes que la derni��re, et arr��tant toutes leurs connaissances pour leur dire: ?Aimez-vous les cailles, les perdrix?--Oui.--Bon! je vous en enverrai le 3 ou le 4 du mois prochain...--Merci.--�� propos, j'ai tu�� cinq hirondelles sur huit coups.--Tr��s bien.--C'est pas mal tir��, n'est-ce pas?--Parfaitement.--Adieu.--Bonsoir.?
Or, vers la fin du mois d'ao?t 1829, un de ces chasseurs entra sous la grande porte de la maison du faubourg Saint-Denis, n�� 109, demanda au concierge si Decamps ��tait chez lui, et, sur sa r��ponse affirmative, monta, tirant son chien, marche par marche, et cognant le canon de son fusil �� tous les angles du mur, les cinq ��tages qui conduisent �� l'atelier de notre c��l��bre peintre.
Il n'y trouva que son fr��re Alexandre.
Alexandre est un de ces hommes spirituels et originaux qu'on reconna?t pour artiste rien qu'en les regardant passer; qui seraient bon �� tout, s'ils n'��taient trop profond��ment paresseux pour jamais s'occuper s��rieusement d'une chose; ayant en tout l'instinct du beau et du vrai, le reconnaissant partout o�� ils le rencontrent, sans s'inqui��ter si l'oeuvre qui cause leur enthousiasme est avou��e d'une coterie ou sign��e d'un nom; au reste, bon gar?on dans toute l'acception du mot, toujours pr��t �� retourner ses poches pour ses amis, et, comme tous les gens pr��occup��s d'une id��e qui en vaut la peine, facile �� entra?ner non par faiblesse de caract��re, mais par ennui de la discussion et par crainte de la fatigue.
Avec cette disposition d'esprit, Alexandre se laissa facilement persuader par le nouvel arrivant qu'il trouverait grand plaisir �� ouvrir la chasse avec lui dans la plaine Saint-Denis, o�� il y avait, disait-on, cette ann��e, des cailles par bandes, des perdrix par vol��es et des li��vres par troupeaux.
En cons��quence de cette conversation, Alexandre commanda une veste de chasse �� Chevreuil, un fusil �� Lepage et des gu��tres �� Boivin: le tout lui co?ta six cent soixante francs, sans compter le port d'armes, qui lui fut d��livr�� �� la pr��fecture de police, sur la pr��sentation du certificat de bonnes vie et moeurs, que lui octroya sans conteste le commissaire de son quartier.
Le 31 ao?t, Alexandre s'aper?ut qu'il ne lui manquait qu'une chose pour ��tre chasseur achev��: c'��tait un chien. Il courut aussit?t chez l'homme qui, pour le tableau des Chiens savants, avait pos��, avec sa meute, devant son fr��re, et lui demanda s'il n'aurait pas ce qu'il lui fallait.
L'homme lui r��pondit qu'il avait, sous ce rapport, des b��tes d'un instinct merveilleux, et, passant de sa chambre dans le chenil, avec lequel elle communiquait de plain-pied, il ?ta en un tour de main le chapeau �� trois cornes et l'habit qui d��coraient une esp��ce de briquet noir et blanc, rentra imm��diatement avec lui, et le pr��senta �� Alexandre comme un chien de pure race. Celui-ci fit observer
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