Le Tour du Monde; Californie | Page 9

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��tant parvenu avec beaucoup de peine �� charger intact ce cerf sur mon mulet, je me dirigeai vers Nevada-City, o�� je me proposais de vendre mon gibier.
J'y arrivai vers le midi, juste au moment o�� les mineurs rentraient de leur claim pour d?ner; je m'avan?ai bravement au milieu de l'unique rue du village en criant en anglais: Venison at one dollar a pound. Cette bonne id��e fut couronn��e de succ��s, car �� peine ��tais-je arriv�� au bout de la rue, qui n'avait pas six cents m��tres de long, que j'avais tout vendu �� raison d'un dollar[3] la livre, et me trouvais avoir gagn�� huit cents francs en poudre d'or.
[Note 3: Le dollar est une monnaie des ��tats-Unis dont le cours ordinaire du commerce est fix�� �� la valeur de cinq francs, terme moyen.]
Une autre bonne aubaine se pr��senta: deux fr��res Nantais, MM. Dep..., qui y tenaient une taverne et auxquels j'avais vendu un des gigots de mon cerf, m'invit��rent �� d?ner et me dirent au dessert que si je voulais m'engager �� leur fournir du gibier pendant toute l'ann��e, ils s'engageraient eux-m��mes �� me le prendre tout �� des prix d��battus entre nous; j'acceptai pour tout le temps que je resterais �� Grass-Valley, sans me lier cependant pour un temps d��termin��, et notre parole de Breton rempla?a l'acte sur papier timbr��.
Dans ce village comme dans tous les placers, l'or et l'argent monnay��s n'��taient point employ��s; dans les transactions commerciales, toute denr��e ��tait vendue et pay��e en poudre d'or; aussi voyait-on sur le comptoir de chaque marchand une balance servant �� peser la marchandise et une autre d'un plus petit mod��le pour en peser le prix. Chaque mineur ��tait nanti d'une bourse en cuir en guise de porte-monnaie, o�� ��tait renferm��e la poudre d'or qu'il consacrait �� ses menus achats.
Ce ne fut que quelque temps avant le coucher du soleil que je pus me mettre en route pour Grass-Valley, porteur d'une somme assez ronde.
D��part pour l'int��rieur.
Des semaines, des mois s'��coul��rent ainsi entre les travaux du claim et les plaisirs de la chasse; ceux-ci, chose ��trange, me rapportant en g��n��ral plus de profit que ceux-l��. Puis vint un moment o�� je ne pus plus r��sister au d��sir imp��rieux qui me poussait vers les d��serts de l'Est; en cons��quence, apr��s avoir mis ma cabane sous la surveillance des Canadiens et d��pos�� ma petite fortune entre leurs mains loyales, je fis un beau matin mes derniers pr��paratifs de d��part. Ma peau d'ours et mon hamac furent ploy��s en quatre sur le dos de mon mulet et fix��s au moyen d'une sangle; j'y pla?ai mon bissac qui contenait mes provisions, et, par-dessus le tout, je m'installai moi-m��me; je donnai un dernier regard d'amour �� mon paisible ermitage, �� mes fleurs ch��ries qui allaient peut-��tre dess��cher sur leurs tiges, priv��es de mes soins empress��s, un amical serrement de main �� mes voisins les Canadiens, et le coeur heureux et rempli d'��motions aventureuses, je me mis en route. Je m'��tais confectionn�� une esp��ce de caban avec des peaux de coyottes, car ma pauvre chemise de laine rouge de matelot ��tait bien us��e. Dans cet ��quipage, je ressemblais assez �� Robinson, seulement le parapluie de peau me manquait; je l'avais remplac�� par un capuchon de la m��me ��toffe que mon v��tement, et le trouvais infiniment plus commode pour la marche ou le repos, la veille ou le sommeil.
Le d��but de mon voyage se passa sans incidents dignes d'��tre rapport��s; la journ��e ��tait belle, le soleil resplendissant dorait la cime des arbres de la for��t. Je voyageais sous un d?me de verdure naturelle, o�� des myriades d'oiseaux voltigeaient en chantant et paraissaient peu effray��s de ma pr��sence; je fis environ quarante-cinq �� cinquante milles dans ma journ��e sans rencontrer d'Indiens; le calme des sombres et profondes for��ts de c��dres g��ants, orgueil de la Sierra-Nevada (Taxodium giganteum), faisait p��n��trer en moi un sentiment de repos et de bonheur que je n'ai r��ellement ��prouv�� que l��. Mon ame semblait s'y reposer avec abandon des peines de la vie.
Vers les six heures j'arrivai pr��s d'un joli petit ruisseau ombrag�� de saules et de jeunes ch��nes. La position me sembla charmante pour y ��tablir mon campement; de chaque c?t��, le ruisseau ��tait bord�� d'un beau tapis de gazon ��maill�� de fleurs fra?ches comme l'aurore; apr��s avoir d��charg�� mon vieux camarade d'aventures et l'avoir laiss�� pa?tre sur ces bords charmants, je m'��tendis moi-m��me sur le gazon, humant avec d��lices les senteurs embaum��es de la for��t. Quand je fus un peu repos��, je pris un bain sous un de ses arceaux naturels de branchages et de fleurs, et dans cette baignoire qu'eut envi��e plus d'une jolie na?ade, je r��parai mes forces en rendant �� mes membres la souplesse que leur enl��ve toujours une course de la longueur de celle que j'avais parcourue; car, pour m��nager

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