de M. de Maistre, et croyait �� l'un aussi peu qu'�� l'autre.
Comme par un accord mutuel. Sorel et son fils ��vit��rent de se parler ce jour-l��. Sur la brune, Julien alla prendre sa le?on de th��ologie chez le cur��, mais il ne jugea pas prudent de lui rien dire de l'��trange proposition qu'on avait faite �� son p��re. "Peut-��tre est-ce un pi��ge, se disait-il, il faut taire semblant de l'avoir oubli��."
Le lendemain de bonne heure, M. de R��nal fit appeler le vieux Sorel, qui, apr��s s'��tre fait attendre une heure ou deux, finit par arriver, en faisant d��s la porte cent excuses, entrem��l��es d'autant de r��v��rences. A force de parcourir toutes sortes d'objections, Sorel comprit que son fils mangerait avec le ma?tre et la ma?tresse de maison, et les jours o�� il y aurait du monde, seul dans une chambre �� part avec les enfants. Toujours plus dispos�� �� incidenter �� mesure qu'il distinguait un v��ritable empressement chez M. le maire, et d'ailleurs rempli de d��fiance et d'��tonnement, Sorel demanda �� voir la chambre o�� coucherait son fils. C'��tait une grande pi��ce meubl��e fort proprement, mais dans laquelle on ��tait d��j�� occup�� �� transporter les lits des trois enfants.
Cette circonstance fut un trait de lumi��re pour le vieux paysan; il demanda aussit?t avec assurance �� voir l'habit que l'on donnerait �� son fils. M. de R��nal ouvrit son bureau et prit cent francs.
- Avec cet argent, votre fils ira chez M. Durand, le drapier, et l��vera un habit noir complet.
- Et quand m��me je le retirerais de chez vous, dit le paysan qui avait tout �� coup oubli�� ses formes r��v��rencieuses, cet habit noir lui restera?
- Sans doute.
- Oh! bien, dit Sorel, d'un ton de voix tra?nard, il ne reste donc plus qu'�� nous mettre d'accord sur une seule chose, l'argent que vous lui donnerez.
- Comment! s'��cria M. de R��nal indign��, nous sommes d'accord depuis hier: je donne trois cents francs; je crois que c'est beaucoup, et peut-��tre trop.
- C'��tait votre offre, je ne le nie point, dit le vieux Sorel, parlant encore plus lentement, et, par un effort de g��nie qui n'��tonnera que ceux qui ne connaissent pas les paysans francs-comtois, il ajouta, en regardant fixement M. de R��nal: Nous trouvons mieux ailleurs.
A ces mots, la figure du maire fut boulevers��e. Il revint cependant �� lui, et, apr��s une conversation savante de deux grandes heures, o�� pas un mot ne fut dit au hasard la finesse du paysan l'emporta sur la finesse de l'homme riche, qui n'en a pas besoin pour vivre. Tous les nombreux articles, qui devaient r��gler la nouvelle existence de Julien, se trouv��rent arr��t��s; non seulement ses appointements furent r��gl��s �� quatre cents francs, mais on dut les payer d'avance, le premier de chaque mois.
- Eh bien, je lui remettrai trente-cinq francs, dit M. de R��nal.
- Pour faire la somme ronde, un homme riche et g��n��reux comme monsieur notre maire, dit le paysan d'une voix caline, ira bien jusqu'�� trente-six francs.
- Soit, dit M. de R��nal, mais finissons-en. Pour le coup, la col��re lui donnait le ton de la fermet��. Le paysan vit qu'il fallait cesser de marcher en avant. Alors, �� son tour M. de R��nal fit des progr��s. Jamais il ne voulut remettre le premier mois de trente-six francs au vieux Sorel fort empress�� de le recevoir pour son fils. M. de R��nal vint �� penser qu'il serait oblig�� de raconter �� sa femme le r?le qu'il avait jou�� dans toute cette n��gociation.
- Rendez-moi les cent francs que je vous ai remis, dit-il avec humeur. M. Durand me doit quelque chose. J'irai avec votre fils faire la lev��e du drap noir.
Apr��s cet acte de vigueur, Sorel rentra prudemment dans ses formules respectueuses; elles prirent un bon quart d'heure. A la fin voyant qu'il n'y avait d��cid��ment plus rien �� gagner, il se retira. Sa derni��re r��v��rence finit par ces mots:
- Je vais envoyer mon fils au chateau.
C'��tait ainsi que les administr��s de M. le maire appelaient sa maison quand ils voulaient lui plaire.
De retour �� son usine, ce fut en vain que Sorel chercha son fils. Se m��fiant de ce qui pouvait arriver, Julien ��tait sorti au milieu de la nuit. Il avait voulu mettre en s?ret�� ses livres et sa croix de la L��gion d'honneur. Il avait transport�� le tout chez un jeune marchand de bois, son ami, nomm�� Fouqu��, qui habitait dans la haute montagne qui domine Verri��res.
Quand il reparut:
- Dieu sait, maudit paresseux, lui dit son p��re, si tu auras jamais assez d'honneur pour me payer le prix de ta nourriture, que j'avance depuis tant d'ann��es! Prends tes guenilles, et va-t'en chez M. le maire.
Julien. ��tonn�� de n'��tre pas battu. se hata de partir. Mais �� peine hors de la vue de son terrible p��re il ralentit le pas. Il jugea
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