les en s��parer, leurs anc��tres restent bien, non pas seulement les Courtilz de Sandras et les Prevost, mais m��me les La Calpren��de et les Scud��ry. Les uns ont ��crit, ou plut?t ils ont cru ��crire, des romans historiques: leurs h��ros ne sont jamais que des personnages illustres; il n'y a qu'une toile de fond �� leurs sc��nes, et c'est toujours l'histoire; la plus ordinaire enfin de leurs pr��tentions est de ne rien avancer qu'ils ne puissent soutenir d'irr��futables t��moignages,--chose apr��s tout fort naturelle, personne n'ayant le ton plus affirmatif que le plus effront�� menteur. Mais, pour ridicule que soit la mascarade, il est remarquable que tous ces ?romanistes?, comme les appelait Bayle, ob��issent d'instinct �� une des lois du roman historique, qui est de ne point prendre ses personnages dans une r��alit�� trop voisine, et donc en g��n��ral assez peu po��tique. Or, reculer leurs sc��nes jusqu'aux temps mal ��clair��s du moyen age, les transporter m��me jusqu'aux ��poques fabuleuses de la l��gende romaine, c'��tait donner �� leurs oeuvres l'esp��ce d'attrait que devaient d��gager plus tard et pour d'autres lecteurs _Notre-Dame de Paris_ ou la Chronique de Charles IX, Quentin Durward ou Ivanhoe.
Avec des ambitions plus modestes, d'autres r��alisent moins mal, quoique sans le savoir, la formule du roman historique moderne, et se rapprochent d'autant plus du but qu'ils semblent moins y tendre. Au lieu d'introduire l'histoire d��s les premi��res pages, avec ostentation et fracas, ils la dissimulent au contraire, la glissent �� l'ombre et comme �� couvert de leurs aventures tragiques ou plaisantes, nous ?tant ainsi, et fort habilement, la tentation et m��me le droit d'��tre exigeants et s��v��res pour des figures rel��gu��es �� l'arri��re-plan. En m��me temps, par le choix des ��poques et des personnages, ils s'astreignent �� plus d'exactitude et de fid��lit��. D��sormais, plus de Pharamond, de Cl��lie ou d'Horatius Cocl��s, personnages fabuleux ou l��gendaires, plus po��tiques que vrais et dont il est impossible de v��rifier le vrai caract��re; mais Louis XIII et Mazarin, la cour des Stuarts ou celle de Saint-Germain, c'est-��-dire l'histoire d'hier ou m��me l'histoire pr��sente, et dont chaque lecteur peut imm��diatement ��prouver le degr�� d'exactitude ou de fausset��. Par l�� s'insinuait dans le roman un certain respect de la v��rit�� historique, et le genre apprenait �� se pr��server des travestissements grotesques qui, en discr��ditant sa fortune, pouvaient le compromettre et le d��shonorer �� tout jamais.
Enfin, �� l'aurore m��me du XIXe si��cle, et quelques ann��es avant que Walter Scott ex��cutat ses romans historiques d'apr��s les r��gles que devaient s'efforcer d'observer chez nous ses premiers imitateurs, Chateaubriand, dans les Natchez, les Martyrs et le Dernier Abencerage, d��couvrait ou appliquait mieux que tout autre un des ��l��ments essentiels du genre: la couleur locale. Le roman historique avait �� peu pr��s tous ses organes. Il ne fallait plus qu'un souffle pour tout animer; il vint, et ce fut d'Angleterre.
Ainsi envisag��e, l'histoire du roman historique avant le romantisme prend un int��r��t v��ritable, et l'on arrive �� oublier l'insignifiance et l'insipidit�� des oeuvres, quand on ne s'attache qu'�� suivre �� travers elles la lente organisation d'un genre nouveau.
CHAPITRE PREMIER
Le courant id��aliste[1].
Le XVIIe si��cle, o�� tant de choses se sont organis��es, les grands genres litt��raires et la monarchie absolue, devait assister aussi aux tentatives d'organisation d'un genre remis en faveur par l'_Astr��e_, vers 1610: le roman. Comme il ne savait pas encore quel devait ��tre son objet, il h��sita longtemps, tatonna, eut des aventures. Il fut pastoral avec l'_Astr��e_ et la _Carith��e_, exotique et fantastique avec Polexandre, satirique et picaresque avec Francion et le _Berger extravagant_; et ainsi ballott�� de tous c?t��s, jouet de tous les vents, c'est-��-dire de toutes les fantaisies des auteurs, avec l'_Ariane_[2] de Desmarets de Saint-Sorlin (1632), il toucha enfin �� l'histoire. Le go?t public aidant[3], ce fut bient?t la forme de roman qui pr��valut. Cassandre est de 1642, _Cl��opatre_ de 1648,_Artam��ne ou le Grand Cyrus_ de 1649,_Cl��lie_ de 1656, et Faramond de 1661. Or, comme chacune de ces oeuvres a un nombre fort respectable de volumes[4] et que, s'il fallait d��j�� du temps pour les lire, il en fallait sans doute bien plus encore pour les composer, on peut dire que pendant plus d'un quart de si��cle la production en fut continue. De cette union du roman et de l'histoire, il ne pouvait malheureusement rien sortir.
[Note 1: Comme il est essentiel de fixer et de pr��ciser le sens d'un terme d'autant qu'il est plus flottant et plus vague, nous appelons (faute d'un mot plus clair et surtout plus simple) _id��alistes_ les ��crivains qui alt��rent syst��matiquement l'histoire, moins soucieux de la d��crire dans sa _r��alit��_ que d'apr��s l'_id��e_ plus ou moins fausse qu'ils ont pu s'en faire.]
[Note 2: Ariane est une contemporaine de N��ron, et non la soeur de Ph��dre: il ne faudrait pas s'y tromper.]
[Note 3: Dans l'��dition pr��c��dente, nous avons dit les principales raisons de cet
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