Le Mariage Force | Page 2

Molière
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Je revins en cinquante-six.
- G��ronimo -
De cinquante-six �� soixante-huit, il y a douze ans, ce me semble. Cinq en Hollande font dix-sept, sept ans en Angleterre font vingt-quatre, huit dans notre s��jour �� Rome font trente-deux, et vingt que vous aviez lorsque nous nous conn?mes, cela fait justement cinquante-deux. Si bien, seigneur Sganarelle, que, sur votre propre confession, vous ��tes environ �� votre cinquante-deuxi��me ou cinquante-troisi��me ann��e.
- Sganarelle -
Qui, moi ? cela ne se peut pas.
- G��ronimo -
Mon Dieu ! le calcul est juste ; et l��-dessus je vous dirai franchement, et en ami, comme vous m'avez fait promettre de vous parler, que le mariage n'est gu��re votre fait. C'est une chose �� laquelle il faut que les jeunes gens pensent bien m?rement avant que de la faire ; mais les gens de votre age n'y doivent point penser du tout ; et si l'on dit que la plus grande de toutes les folies est celle de se marier, je ne vois rien de plus mal �� propos que de la faire, cette folie, dans la saison o�� nous devons ��tre plus sages. Enfin, je vous dis nettement ma pens��e. Je ne vous conseille point de songer au mariage ; et je vous trouverais le plus ridicule du monde, si, ayant ��t�� libre jusqu'�� cette heure, vous alliez vous charger maintenant de la plus pesante des cha?nes.
- Sganarelle -
Et moi, je vous dis que je suis r��solu de me marier, et que je ne serai point ridicule en ��pousant la fille que je recherche.
- G��ronimo -
Ah ! c'est une autre chose. Vous ne m'aviez pas dit cela.
- Sganarelle -
C'est une fille qui me pla?t, et que j'aime de tout mon coeur.
- G��ronimo -
Vous l'aimez de tout votre coeur ?
- Sganarelle -
Sans doute ; et je l'ai demand��e �� son p��re.
- G��ronimo -
Vous l'avez demand��e ?
- Sganarelle -
Oui. C'est un mariage qui doit se conclure ce soir ; et j'ai donn�� ma parole.
- G��ronimo -
Oh ! mariez-vous donc. Je ne dis plus un mot.
- Sganarelle -
Je quitterais le dessein que j'ai fait ! Vous semble-t-il, seigneur G��ronimo, que je ne sois plus propre �� songer �� une femme ? Ne parlons point de l'age que je puis avoir ; mais regardons seulement les choses. Y a-t-il homme de trente ans qui paraisse plus frais et plus vigoureux que vous me voyez ? N'ai-je pas tous les mouvements de mon corps aussi bons que jamais ; et voit-on que j'ai besoin de carosse ou de chaise pour cheminer ? N'ai-je pas encore toutes mes dents les meilleures du monde ?
(Il montre ses dents.)
Ne fais-je pas vigoureusement mes quatre repas par jour, et peut-on voir un estomac qui ait plus de force que le mien ?
(Il tousse.)
Hem, hem, hem. Eh ! qu'en dites-vous ?
- G��ronimo -
Vous avez raison, je m'��tais tromp��. Vous ferez bien de vous marier.
- Sganarelle -
J'y ai r��pugn�� autrefois ; mais j'ai maintenant de puissantes raisons pour cela. Outre la joie que j'aurai de poss��der une belle femme, qui me fera mille caresses, qui me dorlotera, et me viendra frotter lorsque je serai las ; outre cette joie, dis-je, je consid��re qu'en demeurant comme je suis, je laisse p��rir dans le monde la race des Sganarelles ; et qu'en me mariant, je pourrai me voir revivre en d'autres moi-m��me ; que j'aurai le plaisir de voir des cr��atures qui seront sorties de moi, de petites figures qui me ressembleront comme deux gouttes d'eau, qui se joueront continuellement dans la maison, qui m'appelleront leur papa quand je reviendrai de la ville, et me diront de petites folies les plus agr��ables du monde. Tenez, il me semble d��j�� que j'y suis, et que j'en vois une demi-douzaine autour de moi.
- G��ronimo -
Il n'y a rien de plus agr��able que cela ; et je vous conseille de vous marier le plus vite que vous pourrez.
- Sganarelle -
Tout de bon, vous me le conseillez ?
- G��ronimo -
Assur��ment. Vous ne sauriez mieux faire.
- Sganarelle -
Vraiment, je suis ravi que vous me donniez ce conseil en v��ritable ami.
- G��ronimo -
Eh ! quelle est la personne, s'il vous pla?t, avec qui vous allez vous marier ?
- Sganarelle -
Dorim��ne.
- G��ronimo -
Cette jeune Dorim��ne, si galante et si bien par��e ?
- Sganarelle -
Oui.
- G��ronimo -
Fille du seigneur Alcantor ?
- Sganarelle -
Justement.
- G��ronimo -
Et soeur d'un certain Alcidas, qui se m��le de porter l'��p��e ?
- Sganarelle -
C'est cela.
- G��ronimo -
Vertu de ma vie !
- Sganarelle -
Qu'en dites-vous ?
- G��ronimo -
Bon parti ! Mariez-vous promptement.
- Sganarelle -
N'ai-je pas raison d'avoir fait ce choix ?
- G��ronimo -
Sans doute. Ah ! que vous serez bien mari�� ! D��p��chez-vous de l'��tre.
- Sganarelle -
Vous me comblez de joie de me dire cela. Je vous remercie de votre conseil, et je vous invite ce soir �� mes noces.
- G��ronimo -
Je n'y manquerai pas ; et je
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