Le Kama Soutra | Page 7

Vatsyayana
soleil et de l'amour universel par des transports de
joie, des chants et des danses orgiaques (comme dans le culte de
Krishna, incarnation de Vishnou-Soleil).
Alors avaient lieu les prostitutions sacrées considérées comme des
sacrifices (elles ont de l'analogie avec les Sakty pudja, sacrifices de la
Sackty, que nous verrons plus loin s'établir dans le Sivaïsme).

«Sous de légers berceaux de myrthe et de laurier, sous des tentes
enguirlandées de fleurs, se tenaient les Hériodules, prêtresses de la
déesse, jeunes et belles esclaves grecques ou syriennes; elles étaient
couvertes de bijoux, vêtues de riches étoffes, coiffées d'une mitre
enrichie de pierreries, de laquelle s'échappaient les longues tresses de
leurs noires chevelures entremêlées de guirlandes de fleurs dans
lesquelles se jouait une écharpe écarlate. Sur leurs poitrines aux seins
fermes et arrondis, que protégeait une gaze légère, pendaient des
colliers d'or, d'ambre et de perles ou de verre chatoyant, comme
insignes de leur office religieux; elles tenaient à la main un rameau de
myrthe et la colombe, l'oiseau de Vénus.»
Ainsi parées, elles attendaient souriantes et toujours prêtes à célébrer le
doux sacrifice en l'honneur de la déesse avec tous ceux qui les en
priaient.
Partout où domine le culte du Linga ou de ses équivalents, on est obligé
de voir une émanation du Sivaïsme primitif, divinisation du pouvoir
rénovateur, avec un rôle secondaire pour la déesse de la beauté (dans
l'Inde, Parvati, la femme de Siva).
Dans cette période reculée, Siva est la cause efficiente qui, par son
énergie ou sa sakti comme instrument, produit ou détruit le monde qui
a pour matrice la prakrite ou la matière universelle (voir, pour la
définition de la prakriti, le sankya commenté par M. Barthélemy de
Saint-Hilaire). La sakty d'un dieu forme avec lui un seul être à double
face. Peu à peu, par la prédominance de la sakty, le rôle de l'élément
mâle diminua, puis s'effaça, mais ce fut assez tard. La prédominance de
la sakty de Siva ne s'affirme que dans les derniers Pouranas et dans la
littérature des Tantras qui commence au IVe siècle de notre ère.
Le culte des saktis, tel qu'il est décrit dans les Tantras, forme une
religion à part, celle des Saktas, qui se divise en plusieurs branches et
qui a sa mythologie spéciale. La divinité dominante est Mahadeva
(Siva). Selon le Vayou Pourana, non-seulement Siva avait une double
nature mâle et femelle, mais sa nature femelle se divisa en deux moitiés,
l'une blanche et l'autre noire, cette dernière sans doute imaginée pour la
satisfaction des castes des Soudras (noirs). A la nature blanche, ou

qualité de bonté, on rattacha les Saktys ou déesses bienfaisantes, telles
que Latchoumy, Seravasti, épouses de Vischnou et de Brahma; à la
nature noire Dourga, Candi, Cananda, toutes les saktys ou déesses
redoutées. Mahadévi ou la sakty de Siva, qu'on suppose une
transformation de Maya, le principe féminin des Vedas, se développa
dans une infinité de manifestations ou de personnifications de toutes les
forces physiques, physiologiques, morales et intellectuelles, qui eurent
chacune leurs dévots et leur culte. Comme plusieurs de ces déesses sont
notoirement des divinités aborigènes, il est vraisemblable que
l'ensemble fut constitué par le groupement des divinités femelles des
cultes aborigènes pour former une sorte de polythéisme féminin que les
Brahmes acceptèrent comme une religion populaire en y introduisant au
dernier degré les femmes mortelles, depuis les Brahmines.
Pour creuser une séparation plus profonde entre le Bouddhisme et la
religion populaire, les Brahmes avaient développé jusqu'à la fausser la
Bakti, l'ancienne doctrine du salut par la foi et la dévotion ou la grâce,
opposée à celle du salut par la boddhi (la connaissance), doctrine de
l'ancienne thésophie, du sankia, du bouddhisme et de l'orthodoxie
brahmanique moderne formulée par Cançara, le résurrecteur du
Brahmanisme presque tué par le Bouddhisme. La backti s'adresse, dans
chaque secte, à la manifestation du dieu la plus rapprochée, par
exemple, chez les Vichnouvistes, non à Vishnou, mais à Krishna, le
dieu fait homme; il y répond par sa grâce. La dévotion au dieu de la
secte suppléait à tout, à la morale, aux oeuvres, à l'ascétisme, à la
contemplation. Cette doctrine est pleinement développée dans le chant
du Bien Heureux et systématisée par Sandilya dans ses Sutras de la
Bakti, d'où Nagardjuna les a introduits dans le grand véhicule
bouddhiste. Par elle la religion, jusque-là dérobée aux masses dans son
essence, devient un fait de sentiment que le sensualisme hindou change
bien vite en un fait de passion.
En resserrant la dévotion sectaire sur une divinité très précise, la bakti a
poussé à l'idolâtrie; elle a confondu d'abord le dieu avec son image,
puis distingué entre les sanctuaires d'un même dieu. De là une
subdivision à l'infini des sectes et des cultes.

La Bakti embrasse tout le vichnouvisme et une partie seulement du
sivaïsme.
Les bakta ou sectateurs
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 122
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.