limites de l'ordre.
SIR TOBIE.--_Confiner_[7]! je ne me tiendrai pas plus finement que je ne fais; ces habits sont assez bons pour boire et ces bottes aussi, ou sinon qu'elles se pendent �� leurs propres tirants.
[Note 7: To confine, jeu de mots sur confine et fine.]
MARIE.--Ces grandes rasades vous tueront: j'entendais madame en parler encore hier, ainsi que de cet imb��cile chevalier que vous avez amen�� un soir ici pour lui faire la cour.
SIR TOBIE.--Quoi? sir Andr�� Ague-cheek?
MARIE.--Oui, lui-m��me.
SIR TOBIE.--C'est un homme des plus braves qu'il y ait en Illyrie.
MARIE.--Et qu'importe �� la chose?
SIR TOBIE.--Comment! il a trois mille ducats de rente.
MARIE.--Oui! mais il ne fera qu'une ann��e de tous ses ducats: c'est un vrai fou, un prodigue.
SIR TOBIE.--Fi! n'avez-vous pas honte de dire cela? Il joue de la viole de Gambo[8], il parle trois ou quatre langues, mot �� mot, sans livre, et il poss��de les meilleurs dons de nature.
[Note 8: Instrument qu'on tenait entre les jambes.]
MARIE.--Oh! oui, certes, il les poss��de au naturel; car, outre que c'est un sot, c'est un grand querelleur; et si ce n'est qu'il a le don d'un lache pour apaiser la fougue qui l'emporte dans une querelle, c'est l'opinion des gens sens��s qu'on lui ferait bient?t le don d'un tombeau.
SIR TOBIE.--Par cette main, ce sont des b��l?tres, des d��tracteurs, que ceux qui tiennent de lui ces propos.--Qui sont-ils?
MARIE.--Ce sont des gens qui ajoutent encore qu'il est ivre toutes les nuits en votre compagnie.
SIR TOBIE.--A force de porter des sant��s �� ma ni��ce: je boirai �� sa sant�� aussi longtemps qu'il y aura un passage dans mon gosier, et du vin en Illyrie. C'est un lache et un poltron[9] que celui qui ne veut pas boire �� ma ni��ce, jusqu'�� ce que la cervelle lui tourne comme un sabot de village. Allons, fille, _castiliano vulgo_[10]: voici sir Andr�� Ague-face.
[Note 9: Coystril, un coq peureux.]
[Note 10: Castiliano vulgo, �� l'espagnole.]
(Entre sir Andr�� Ague-cheek.)
SIR ANDR��.--Ah! sir Tobie Belch! Comment vous va, sir Tobie Belch?
SIR TOBIE.--Ah! mon cher sir Andr��!
SIR ANDR��, _�� Marie_.--Salut, jolie grondeuse.
MARIE.--Salut, monsieur.
SIR TOBIE.--Accoste, sir Andr��, accoste.
SIR ANDR��.--Qu'est-ce que c'est?
SIR TOBIE.--La femme de chambre de ma ni��ce.
SIR ANDR��.--Belle madame Accoste, je d��sire faire connaissance avec vous.
MARIE.--Mon nom est Marie, monsieur.
SIR ANDR��.--Belle madame Marie Accoste....
SIR TOBIE.--Vous vous m��prenez, chevalier. Quand je dis accoste, je veux dire envisagez-la, abordez-la, faites-lui votre cour, attaquez-la.
SIR ANDR��.--Sur ma foi, je ne voudrais pas l'attaquer ainsi en compagnie. Est-ce l�� le sens du mot _accoste_?
MARIE.--Portez-vous bien, messieurs.
SIR TOBIE.--Si tu la laisses partir ainsi, sir Andr��, puisses-tu ne jamais tirer l'��p��e!
SIR ANDR��.--Si vous partez ainsi, mademoiselle, je ne veux jamais tirer l'��p��e. Belle dame, croyez-vous avoir des sots sous la main?
MARIE.--Monsieur, je ne vous ai pas sous la main.
SIR ANDR��.--Par ma foi, vous allez l'avoir tout �� l'heure, car voici ma main.
MARIE.--Maintenant, monsieur, la pens��e est libre. Je vous prie de porter votre main �� la baratte au beurre, et laissez-la boire.
SIR ANDR��.--Pourquoi, mon cher coeur? quelle est votre m��taphore?
MARIE.--Elle est s��che, monsieur[11].
[Note 11: Peut-��tre pour dire: elle est vide; ou bien, d'apr��s la chiromancie, une main s��che signifie ici une constitution froide.]
SIR ANDR��.--Comment donc! je le crois bien; je ne suis pas assez ane pour ne pas tenir ma main s��che. Mais que signifie votre plaisanterie?
MARIE.--C'est une plaisanterie toute s��che, monsieur.
SIR ANDR��.--En avez-vous beaucoup de semblables?
MARIE.--Oui, monsieur, je les ai au bout de mes doigts: allons, je laisse aller votre main, je suis dess��ch��e[12].
(Marie sort.)
[Note 12: _I am barren._]
SIR TOBIE.--Chevalier, tu as besoin d'une coupe de vin des Canaries; je ne t'ai jamais vu si bien terrass��.
SIR ANDR��.--Jamais de votre vie, je pense, �� moins que vous ne me voyez terrass�� par le canarie. Il me semble qu'il y a des jours o�� je n'ai pas plus d'esprit qu'un chr��tien ou qu'un homme ordinaire. Mais je suis un grand mangeur de boeuf, et je crois que cela fait tort �� mon esprit.
SIR TOBIE.--Il n'y a pas de doute.
SIR ANDR��.--Si je le croyais, je m'en abstiendrais.--Je retourne chez moi �� cheval demain, sir Tobie.
SIR TOBIE.--Pourquoi, mon cher chevalier?
SIR ANDR��.--Que signifie pourquoi[13]? Le faire ou ne le pas faire? Je voudrais avoir employ�� �� apprendre les langues le temps que j'ai mis �� l'escrime, �� la danse, �� la chasse �� l'ours.--Oh! si j'avais suivi les beaux-arts!
[Note 13: Pourquoi, en fran?ais dans le texte.]
SIR TOBIE.--Oh! vous auriez eu une superbe chevelure.
SIR ANDR��.--Quoi, cela aurait-il amend�� mes cheveux?
SIR TOBIE.--Sans contredit, car vous voyez qu'ils ne frisent pas naturellement.
SIR ANDR��.--Mais cela me sied assez bien, n'est-il pas vrai?
SIR TOBIE.--A merveille. Ils pendent droit comme le lin sur une quenouille, et j'esp��re un jour voir une m��nag��re vous prendre entre ses jambes et vous filer.
SIR ANDR��.--Ma foi, je retourne chez moi demain, sir Tobie. Votre ni��ce ne veut pas se laisser voir, ou, si elle voit quelqu'un, il y a quatre �� parier contre un qu'elle
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