Lamour au pays bleu | Page 4

Hector France
ciel

d'airain de l'Afrique, de cette Afrique qui est nôtre et que par cela
même, peut-être, nous connaissons si peu, que se passe l'action du livre.
Le héros, un type de Don Juan africain, rusé, patient, brutal, brûlé par
tous les feux de la concupiscence, ne recule devant rien pour assouvir
ses désirs effrénés....
L'homme tragique du festin de pierre n'a rien de plus saisissant et de
plus inattendu. Telle est la donnée du livre. Ajoutez à cela un style
chaud, des descriptions superbes d'une couleur toute locale, car l'auteur
parle de l'Afrique en réalité, en homme qui a vu et non point en
romancier d'imagination, et vous aurez une faible idée de ce livre, reflet
de l'Orient dans ses amours naïves, ses emportements féroces et ses
ardentes voluptés. A.Z.
* * * * *
La vie Moderne (26 février 1881).
Je ne connais ni le Roman du Curé, ni l'Homme qui tue, ni le _Péché de
Soeur Cunégonde_, et je ne puis que le regretter après la lecture de
l'Amour au Pays Bleu. C'est l'oeuvre d'un homme qui a déjà un talent
robuste et qui en aura bien davantage, quand il se sera défait de
quelques brutalités de forme, voulues peut-être, mais inutiles, à mon
sens. M. Hector France est, si j'en crois la préface de son livre, un
ancien spahis qui a longtemps vécu en Algérie. Je n'ai jamais rien lu de
plus coloré que cet ardent poème d'amour qui se déroule au milieu des
riches paysages du Tell, parmi ces paisibles habitants aux moeurs
pastorales, dont, en qualité de sabre civilisateur, il a jadis été troubler la
paix par de sanglantes chevauchées. M. Hector France est un écrivain
de race et un conteur très attachant. J'ai lu l'_Amour au Pays Bleu_ tout
d'une traite, et je gage que vous en ferez autant, cher lecteur.
d'Artois.
_C'est aussi notre avis et nous pensons que ces divers extraits, pris dans
la presse parisienne, dans celle de province et de l'étranger, disent assez
que nous rééditons l'oeuvre d'un maître.

Cette nouvelle édition ne le cède en rien comme exécution
typographique à la première et, grâce au concours de M. Godefroy
Durand, le célèbre dessinateur du Graphic, nous avons pu l'illustrer
d'une magnifique eau-forte.
Nous croyons donc faire à la fois oeuvre utile et agréable, persuadés
que le succès ne nous fera pas défaut._
Londres, le 25 mai 1885.

Préface DE LA PREMIÈRE ÉDITION
A Camille Delthil
_A cheval, au milieu des cavaliers rouges, j'ai jeté les premières
ébauches de ce livre. Et ces feuilles volantes, roussies par le soleil,
maculées par la pluie et les nuits humides, froissées sur la selle,
lacérées, perdues dans les camps, je les avais oubliées.
Mais un soir de décembre, alors que le brouillard de Londres, pesant
sur les poitrines, glissait avec le spleen par les fissures des portes et des
fenêtres mal closes, j'ai voulu aussi oublier et l'exil et l'heure et
l'inexorable temps.
Et ainsi qu'une cavale que l'amour talonne, ma pensée, brisant ses
entraves, s'est échappée dans les espaces, remontant les jours écoulés,
jusqu'aux rives lointaines où le ciel est bleu.
Ah! les joyeuses gambades au fond des vallées, que bordent les coteaux
où poussent drus, oliviers, grenadiers et cactus; les courses dans la
plaine, le long des rubans de lauriers roses, gracieux festons de la
rivière aux bords effrités et crayeux, les longues haltes sous les
tamariniers touffus, près de la source fraîche où, dans une amphore
étrusque, vient puiser la fille aux yeux noirs. Puis, à l'entrée des
solitudes où s'aventurent les caravanes, les furieux galops derrière les
gazelles, tandis qu'au fond des ardents horizons, la blanche silhouette
du minaret du ksour et la tête chevelue des dattiers de l'oasis tremblent

dans l'air diaphane!
J'ai rassemblé les pages éparses, et pendant les longues heures de nuit,
alors que la froide bise heurtait à ma porte, je me bouchais les oreilles,
et, capitonné dans mes rêves, caressé des rayons d'or des souvenirs, j'ai
effacé le présent et j'ai vécu du passé...._
* * * * *
_Que les âmes pudibondes, scandalisées par mes précédents livres, se
rassurent! Elles ne trouveront ici aucun sujet dangereux._
_Ce sont des tableaux de la vie pastorale, et je vous les dédie, cher
poète; j'y parle de la nature, que vous aimez, des grands horizons, des
filles brunes et des moissons blondes, et aussi des primitifs et naïfs
amours, chantés dans vos Poèmes Rustiques, et que votre compatriote
et notre ami Léon Cladel a jetés, comme des fleurs sauvages, sur le
socle de granit de ses rudes Paysans.
Mais ce n'est pas dans les frais sentiers «tout baignés d'aurore», où
Près de vous passe parois, En chantant, un clair minois De brune fillette,
Portant l'amphore de grès, Ignorante du progrès, Et pourtant coquette.
que je veux vous conduire;
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