les fleurs exotiques et rares qui croissaient sur la tombe de fer.
Apr��s avoir travers�� cette, serre, nous entrames dans un jardin d��licieux, ��maill�� de mille fleurs charmantes; ce qui me fit dire en riant que bien des gens voudraient ��tre ermites dans un pareil ermitage.
Mais le vieillard, sans r��pondre �� ma, plaisanterie, me conduisit sous un berceau de cl��matite et de ch��vre feuille, s'assit sur un banc, me montra une place �� c?t�� de lui et dit:
--Vous logerez chez moi.... Pas d'excuses; mon histoire est plus longue que vous ne croyez. Si vous voulez la conna?tre tout enti��re, il faut vous soumettre �� cette n��cessit��. Ce n'est pas une g��ne pour moi; la servante a d��j�� re?u l'ordre de pr��parer votre chambre. Vous n'en dormirez pas plus mal qu'�� l'Aigle, o�� vous aviez l'intention de passer la nuit. C'est donc convenu; vous serez l'h?te de l'ermite. Armez-vous de patience, et pardonnez �� un vieillard, qui ne vit que par ses souvenirs, s'il vous raconte parfois des particularit��s ou des sensations pu��riles qui n'ont d'importance que pour lui seul. En un mot, souffrez que mon r��cit me fasse revivre encore une fois dans le pass��. Apr��s cette pri��re, je commence mon histoire sans autre pr��ambule.
II
�� un quart de lieue d'ici, pr��s d'un clair ruisseau, s'��l��ve une toute petite ferme nomm��e la _Maison d'eau_ et entour��e de bois et de prairies.
Elle ��tait habit��e, il y a cinquante ans, par ma?tre Wolvenaer, un sabotier connu des boutiquiers de la ville pour les jolies chaussures de bois qu'il savait tailler. Son ��tat, lui procurait, �� la sueur de son front, assez de b��n��fices pour subvenir aux besoins d'une nombreuse famille; car il n'avait pas moins de six enfants, encore tous en bas age.
Comme il tenait en fermage un petit lopin de terre, et que sa femme vaquait le plus souvent aux travaux des champs, il y avait dans la maison, du sabotier une sorte de bien-��tre ou du moins d'aisance.
Assur��ment le laborieux artisan e?t ��t�� tout �� fait heureux si une cause incessante de tristesse n'avait assombri son horizon. Parmi ses six enfants, il y en avait un,--un gar?on de onze ans,--qui se faisait remarquer par une beaut�� extraordinaire. Il avait des cheveux noirs boucl��s, des yeux bruns ��tincelants, et des traits d'une remarquable puret��.... Mais le pauvre enfant ne savait point parler. Dans les premiers mois de sa naissance, il ��tait tomb�� de son berceau la t��te en avant. Il avait eu des convulsions affreuses, et lutt�� longtemps contre la mort. On crut que dans cet accident la langue avait ��t�� frapp��e de paralysie; car, quoiqu'il ne p?t articuler aucun son distinct, il entendait cependant fort bien.
Le sabotier ��tait mon p��re; l'enfant muet n'��tait autre que moi qui vous parle en ce moment.
Mon p��re m'aimait et me plaignait de tout son coeur. Souvent, quand je me tenais en silence �� c?t�� de son ��tabli, il interrompait tout �� coup son travail et fixait sur moi un regard profond plein de tristesse et de piti��. Alors je l'embrassais avec reconnaissance, et je tachais de le consoler par gestes de mon malheureux sort. Mais, au lieu d'adoucir son chagrin, le plus souvent mes caresses ne r��ussissaient qu'�� le faire pleurer. En effet, je faisais des efforts surhumains pour parler; mais il n'entendait sortir de ma gorge que des cris rauques et per?ants, des sons inarticul��s et sauvages qui lui d��chiraient l'ame. D'ailleurs, comme tous les muets, j'��tais d'une sensibilit�� extr��me, et mes moindres gestes, mes moindres mouvements pour exprimer ce que je pensais ou ce que j'��prouvais, ��taient violents et exag��r��s comme ceux d'un insens��.
Mes parents se demandaient si l'accident dont j'avais ��t�� victime n'avait pas troubl�� mon cerveau: mes fr��res et soeurs me croyaient innocent, c'est-��-dire �� peu pr��s idiot; les enfants du village avaient peur du petit sauvage de la Maison d'eau et m'appelaient le fou.
Si jeune que je fusse, j'��tais profond��ment bless�� d'��tre ainsi m��connu de tout le monde. Lorsque en menant pa?tre nos vaches, j'��tais assis solitaire, pendant de longues journ��es, au bord de la prairie, il m'arrivait parfois de pleurer am��rement pendant des heures enti��res; parce que je ne pouvais point parler, et que les autres enfants, avec qui j'eusse tant aimer de jouer, se moquaient de moi et m'��vitaient �� cause de mon infirmit��! Je me sentais la force de prouver que je ne m��ritais pas le nom de fou; j'avais soif d'amiti��, et m��me d'estime, et peut-��tre y avait-il en moi une sorte d'orgueil qui m'inspirait un d��sir maladif de me distinguer par l'une ou l'autre qualit��.
Peut-��tre trouverait-on dans cette aspiration confuse de mon esprit la raison du travail singulier dont je m'occupais sans cesse. Jamais je n'allais �� la prairie sans avoir dans ma poche quelques petits morceaux de saule. Je m'appliquais �� y tailler avec mon
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