générales, un peu dépourvues de nuances, et comme un canevas d'idées élémentaires, sur lequel vos intelligences auront à travailler. Tout cela, d'ailleurs, se nuancera, se précisera, se complétera peu à peu dans la série de nos conférences.
Aujourd'hui, voici mon thème en deux mots:
Nous sommes opprimés par une minorité, et par une minorité malfaisante;
Mais cette minorité a la force. Il faut la lui reprendre. Par quels moyens le pourrons-nous? Et sur quelles idées devrons-nous d'abord nous accorder?
I
On peut dire que, dans tous les pays, c'est toujours un assez petit nombre d'hommes qui s'occupent des affaires publiques et qui les mènent. Le peuple a assez à faire de gagner son pain, et la bourgeoisie songe principalement à ses aises et à sa tranquillité. Que nous soyons conduits par une minorité, ce n'est donc pas là un phénomène extraordinaire.
Mais il y a des périodes où cette minorité agissante et détentrice du pouvoir représente à peu près les sentiments de la majorité inerte ou, du moins, ne les heurte pas de front. Et il y a des moments où elle offense décidément cette majorité pourtant si passive et si peu exigeante, et se trouve enfin en plein désaccord avec elle. Nous sommes à un de ces moments-là.
Je ne vois guère en France que trois groupes vraiment actifs (je ne compte pas le n?tre, qui n'est encore qu'en voie de formation). Les deux premiers, qui ont entre eux beaucoup d'affinités et de continuelles communications, sont les francs-ma?ons radicaux et les socialistes. Je ne sais pas bien quel est leur nombre. Les élections nous renseignent mal là-dessus; nous verrons pourquoi. Mais, en tout cas, ils ne forment, dans le pays entier, qu'une minorité assez petite. A l'autre extrémité, c'est le groupe, encore plus restreint et d'ailleurs vaincu autant qu'on peut l'être, des catholiques militants et des monarchistes irréductibles. Entre ces deux camps inégaux, il y a le pays, simplement; huit ou dix millions d'hommes sans opinion politique ou de républicains modérés, paysans, bourgeois, ouvriers même (ceux des grands centres mis à part); une multitude qui sait quelquefois ce qu'elle pense, mais qui, jusqu'ici, n'a pas fait l'effort de vouloir.
Comparons maintenant les idées de la majorité gouvernée avec les idées de la minorité gouvernante. Oh! que celle-ci est peu à l'image du pays!
* * * * *
Les idées--et les passions--de cette minorité qui nous tient et qui, en ce moment, nous fait si durement sentir son joug, sont, essentiellement, celles de la Société secrète dite franc-ma?onnerie.
Leur première marque est le fanatisme anti-religieux.--Parce qu'ils érigent en dogme l'hypothèse matérialiste, qui est cependant une bien pauvre et bien incomplète explication de la vie du monde, ils croient être des esprits forts et de libres esprits. Quelle lourde erreur! Nous n'avons pas l'esprit libre si nous ne sommes pas tolérants, si nous ne savons pas nous représenter sans haine des ames différentes de la n?tre. Ha?r des gens parce que, soit d'eux-mêmes, soit par acquiescement volontaire à une doctrine, ils expliquent autrement que nous l'énigme que nous propose l'univers, cela est misérable. Et c'est cependant le cas de ces faibles philosophes. Ils ont la manie d'invoquer l'Etat, la force publique, la gendarmerie contre qui ne pense pas comme eux. Même vainqueurs, même tout-puissants, ils continuent à crier sus au cléricalisme. Or, ils sont, eux aussi, des cléricaux. Ils ont une église fermée, occulte, de liturgie grotesque, mais de discipline serrée, et merveilleusement organisée pour la domination et pour le butin. Tel Vénérable, tel Chevalier du serpent d'airain après avoir, dans sa loge tendue de noir et décorée de tibias en croix, dansé, sous l'acacia, le ?pas du ma?tre? en secouant des ferblanteries, s'élève contre l'?obscurantisme?; et, congréganiste lui même, brandit contre les congrégations l'excommunication majeure.
Mais il y a plus d'une sorte d'obscurantisme. Il y a un obscurantisme ma?onnique qui ?obscurcit? en effet les cerveaux, et leur rend impénétrables et inintelligibles de très belles formes de la vie morale, du moment qu'elles s'écartent de l'idéal de Monsieur Homais.
Ils sont, comme ils disent, ?humanitaires?, ce qui ne les engage à rien du tout et peut même les dispenser d'être charitables.---Dans ces derniers temps, ils ont laissé voir la défiance la plus hostile à l'endroit de l'armée,---tout simplement, dans le fond, parce que les vertus essentielles de l'armée sont celles qui leur répugnent le plus.---Mais, d'autre part, ceux mêmes d'entre eux qui ne sont pas socialistes pour leur compte, sont en coquetterie réglée avec le socialisme, j'entends avec cette grossière utopie allemande du ?marxisme?,---que nous repoussons, nous, parce que nous croyons que la solution des questions sociales est dans l'association libre et la mutualité, et parce que nous redoutons, dans le socialisme d'Etat, la panbureaucratie, le panfonctionnarisme, l'uniformité, la médiocrité générale, la mort de l'initiative individuelle et la paresse et la lacheté des citoyens de cette nouvelle Salente.---Et, chose curieuse, ils inclinent à
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