timide, d��pays��! M. Dobouziez le rabrouerait s'il mentionnait des gens si peu distingu��s que Siska...
Lasse de l'appeler, Gina se d��cida �� retourner aupr��s du r��veur. Elle lui secoua le bras: ?Mais tu es sourd... Viens, que je le montre les brugnons. Ce sont les fruits de maman. F��licit�� les compte chaque matin... Il y en a douze... N'y touche pas...? Elle ne remarqua point que Laurent avait jet�� la fleur. Cette indiff��rence de la petite f��e ragaillardit le paysan, et pourtant, au fond, il e?t pr��f��r�� qu'elle s'informat de ce qu'��tait devenu son pr��sent.
Il s'��tourdit, se laissa mener par Gina. Ils jou��rent �� des jeux gar?onniers. Pour lui plaire, il fit des culbutes, jeta des cris sauvages, se roula dans l'herbe et le gravier, souilla ses beaux habits, et la poussi��re marbra de crasse ses joues humides de sueur et de larmes.
-- Oh, la dr?le de t��te! s'exclama la fillette.
Elle trempa un coin de son mouchoir dans le bassin et essaya de d��barbouiller Laurent. Mais elle riait trop et ne parvenait qu'�� le maculer davantage.
Il se laissait faire, heureux de ses soins d��risoires. La perfide lui dessinait des arabesques sur le visage, si bien qu'il avait l'air d'un peau-rouge tatou��.
Pendant cette op��ration, une voix aigre se mit �� glapir:
-- Mademoiselle, Monsieur vous prie de rentrer... Le monde va partir... Et vous, venez, par ici. Il est temps de se coucher. Demain on retourne �� la pension. C'est assez de vacances comme ?a!
Mais �� l'aspect du jeune Paridael, F��licit��, la redoutable F��licit��, la servante de confiance se r��cria comme devant le diable: ?Fi! l'horreur d'enfant!?
Elle ��tait venue le prendre au coll��ge, la veille, et devait l'y reconduire. Acariatre, bougonne, servile, rou��e, flattant l'orgueil de ses ma?tres en s'assimilant leurs d��fauts, elle devinait d'embl��e le pied sur lequel l'enfant serait trait�� dans la maison. La cousine Lydie se d��chargeait sur cette vilaine servante de l'entretien et de la surveillance de l'intrus.
L'imprudent Paridael venait de m��nager �� F��licit�� un magnifique d��but dans son r?le de gouvernante. La harpie n'eut garde de n��gliger cette aubaine. Elle donna libre carri��re �� ses aimables sentiments.
Gina, continuant de pouffer, abandonna son compagnon aux bourrades et aux criailleries de la servante, et rentra en courant dans le salon, press��e de raconter la farce �� ses parents et �� la soci��t��.
Laurent avait fait un mouvement pour rejoindre l'espi��gle, mais F��licit�� ne le lachait pas. Elle le poussa vers l'escalier et lui fit d'ailleurs une telle peinture des dispositions de M. et Mme Dobouziez pour les petits gorets de son esp��ce, qu'il se hata, terrifi��, de gagner la mansarde o�� on le logeait et de se blottir dans ses draps.
F��licit�� l'avait pinc�� et taloch��. Il fut sto?que, ne cria point, s'en tint �� quatre devant la m��g��re.
Le d��nouement orageux de la journ��e fit diversion au deuil de l'orphelin. Les ��motions, la fatigue, le plein air lui procur��rent un lourd sommeil visit�� de r��ves o�� des images contradictoires se mat��rent dans une sarabande fantastique. Arm��e d'une baguette de f��e, la rieuse Gina conduisait la danse, livrait et arrachait tour a tour le patient aux entreprises d'une vieille sorci��re incarn��e en F��licit��. �� l'arri��re-plan, les fant?mes doux et pales de son p��re et de Siska, du mort et de l'absente, lut tendaient les bras. Il s'��lan?ait, mais M. Dobouziez le saisissait au passage avec un ironique: ?Halte-l��, galopin!? Des cloches sonnaient; Paridael jetait la reine-marguerite, pr��sent de Gina, dans le plateau de l'offrande. La fleur tombait avec un bruit de pi��ce d'or accompagn�� du rire guilleret de la petite cousine, et ce bruit mettait en fuite les larves moqueuses, mais aussi les pitoyables visions...
Et telle fut l'initiation de Laurent Paridael �� sa nouvelle vie de famille...
II. LE ?MOULIN DE PIERRE?
�� sa deuxi��me visite, et �� celles qui suivirent, lorsque les vacances le renvoyaient chez ces tuteurs, Laurent ne se trouva pas plus acclimat�� que le premier jour. Il avait toujours l'air de tomber de la lune et de prendre de la place.
On n'attendait pas qu'il e?t d��pos�� sa valise pour s'informer de la dur��e de son cong�� et on se pr��occupait plus de l'��tat de son trousseau que de sa personne. Accueil sans effusion: la cousine Lydie lui tendait machinalement sa joue citronneuse; Gina semblait l'avoir oubli�� depuis la derni��re fois; quant au cousin Guillaume, il n'entendait pas qu'on le d��rangeat de sa besogne pour si peu de chose que l'arriv��e de ce polisson, il le verrait bien assez t?t au prochain repas. ?Ah! te voil��, toi! Deviens-tu sage? ... Apprends-tu mieux?? Toujours les m��mes questions pos��es d'un air de doute, jamais d'encouragement. Si Laurent rapportait des prix, voyez le guignon! c'��taient ceux pr��cis��ment auxquels M. Dobouziez n'attachait aucune importance.
�� table, les yeux ronds de la cousine Lydie, implacablement braqu��s sur lui, semblaient lui reprocher l'app��tit de ses douze ans. Vrai, elle
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