es cause.
BRUTUS.
Ah! ne le quittons point dans ses cruels desseins, Et sauvons, s'il se peut, Cesar & les Romains.
Fin du second Acte.
ACTE III.
SCENE I.
CASSIUS, CIMBER, DECIME, CINNA, CASCA, les Conjurés.
CASSIUS.
Enfin donc l'heure approche, où Rome va rena?tre. La Ma?tresse du monde est aujourdhui sans Ma?tre. L'honneur en est à vous, Cimber, Casca, Probus, Décime. Encore une heure, & le Tyran n'est plus. Ce que n'ont p? Caton, & Pompée, & l'Asie, Nous seuls l'exécutons, nous vengeons la patrie; Et je veux qu'en ce jour on dise à l'Univers, Mortels, respectez Rome, elle n'est plus aux fers.
CIMBER.
Tu vois tous nos amis, ils sont prêts à te suivre, A frapper, à mourir, à vivre s'il faut vivre, A servir le Sénat dans l'un ou l'autre sort, En donnant à Cesar, ou recevant la mort.
DECIME.
Mais d'où vient que Brutus ne para?t point encore, Lui, ce fier ennemi du Tyran qu'il abhorre? Lui qui prit nos sermens, qui nous rassembla tous, Lui qui doit sur Cesar porter les premiers coups? Le gendre de Caton tarde bien à para?tre. Serait-il arrêté? Cesar peut-il conna?tre?... Mais le voici. Grands Dieux! qu'il para?t abattu!
SCENE II
CASSIUS, BRUTUS, CIMBER, CASCA, DECIME, les Conjurés.
CASSIUS.
Brutus quelle infortune accable ta vertu? Le Tyran sait-il tout? Rome est-elle trahie?
BRUTUS.
Non, Cesar ne sait point qu'on va trancher sa vie. Il se confie à vous.
DECIME.
Qui peut donc te troubler?
BRUTUS.
Un malheur, un secret, qui vous fera trembler.
CASSIUS.
De nous ou du Tyran c'est la mort qui s'apprête. Nous pouvons tous périr; mais trembler, nous!
BRUTUS.
Arrête; Je vai t'épouvanter par ce secret affreux. Je dois sa mort à Rome, à vous, à nos neveux, Au bonheur des mortels; & j'avais choisi l'heure, Le lieu, le bras, l'instant, où Rome veut qu'il meure: L'honneur du premier coup à mes mains est remis; Tout est prêt. Apprenez que Brutus est son fils.
CIMBER.
Toi, son fils!
CASSIUS.
De Cesar!
DECIME.
O Rome!
BRUTUS.
Servilie Par un hymen secret à Cesar fut unie; Je suis de cet hymen le fruit infortuné.
CIMBER.
Brutus, fils d'un Tyran!
CASSIUS.
Non, tu n'en es pas né; Ton coeur est trop Romain.
BRUTUS.
Ma honte est véritable. Vous, amis, qui voyez le destin qui m'accable, Soyez par mes sermens les ma?tres de mon sort. Est-il quelqu'un de vous d'un esprit assez fort, Assez Sto?que, assez au dessus du vulgaire, Pour oser décider ce que Brutus doit faire? Je m'en remets à vous. Quoi! vous baissez les yeux! Toi, Cassius, aussi, tu te tais avec eux! Aucun ne me soutient au bord de cet ab?me! Aucun ne m'encourage, ou ne m'arrache au crime! Tu frémis, Cassius! & prompt à t'étonner...
CASSIUS.
Je frémis du conseil que je vais te donner.
BRUTUS.
Parle.
CASSIUS.
Si tu n'étais qu'un Citoyen vulgaire, Je te dirais, Va, sers, sois Tyran sous ton père; Ecrase cet Etat que tu dois soutenir; Rome aura désormais deux tra?tres à punir: Mais je parle à Brutus, à ce puissant génie, A ce Héros armé contre la tyrannie, Dont le coeur inflexible, au bien déterminé, Epura tout le sang que Cesar t'a donné. Ecoute, tu connais avec quelle furie Jadis Catilina mena?a sa patrie?
BRUTUS.
Oui.
CASSIUS.
Si le même jour, que ce grand criminel Dut à la liberté porter le coup mortel; Si lorsque le Sénat eut condamné ce tra?tre, Catilina pour fils t'e?t voulu reconna?tre, Entre ce monstre & nous forcé de décider, Parle, qu'aurais-tu fait?
BRUTUS.
Peux-tu le demander? Penses-tu qu'un instant ma vertu démentie, E?t mis dans la balance un homme & la patrie?
CASSIUS.
Brutus, par ce seul mot ton devoir est dicté. C'est l'arrêt du Sénat, Rome est en s?reté. Mais di, sens tu ce trouble, & ce secret murmure, Qu'un préjugé vulgaire impute à la Nature; Un seul mot de Cesar a-t-il éteint dans toi L'amour de ton pays, ton devoir & ta foi? En disant ce secret, ou faux ou véritable, Et t'avouant pour fils, en est-il moins coupable? En es-tu moins Brutus? En es-tu moins Romain? Nous dois-tu moins ta vie, & ton coeur, & ta main? Toi, son fils! Rome enfin n'est elle plus ta mère? Chacun des Conjurés n'est-il donc plus ton frere? Né dans nos murs sacrés, nourri par Scipion, Elève de Pompée, adopté par Caton, Ami de Cassius, que veux-tu davantage? Ces titres sont sacrés, tout autre les outrage. Qu'importe qu'un Tyran, vil esclave d'amour, Ait séduit Servilie, & t'ait donné le jour? Laisse-là les erreurs, & l'hymen de ta mère; Caton forma tes moeurs, Caton seul est ton père: Tu lui dois ta vertu, ton ame est toute à lui: Brise l'indigne noeud que l'on t'offre aujourd'hui: Qu'à nos sermens communs ta fermeté réponde, Et tu n'as de parens que les vengeurs du monde.
BRUTUS.
Et vous, braves amis, parlez, que pensez-vous?
CIMBER.
Jugez de nous par lui, jugez de lui par nous. D'un autre sentiment si nous étions capables, Rome n'auroit point eu des enfans plus coupables. Mais à d'autres qu'à toi pourquoi t'en rapporter? C'est ton coeur, c'est Brutus, qu'il te faut
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