La maison de la courtisane | Page 8

Oscar Wilde
r��jouiront. Ils accourront baiser ta bouche. Ainsi, mets donc des voiles �� tes flottes, att��le des chevaux �� ton char d'��b��ne, et en route pour le Nil. Ou, si tu t'es lass��e de divinit��s mortes, suis la trace de quelque lion errant �� travers la plaine couleur de cuivre, atteins-le, empoigne-le par la crini��re, invite-le �� te servir d'amant. Couche-toi pr��s de son flanc sur le gazon, et plante tes dents blanches dans sa gorge. Et quand tu entendras le bruit de son agonie, fouette tes longs flancs d'airain poli, et prends pour compagnon un tigre, dont les flancs couleur d'ambre ont des taches noires, et enfourche sa croupe dor��e, et franchis en triomphe la porte de Th��bes, et roule-toi avec lui dans les jeux de l'amour, et quand il se d��tourne, et qu'il gronde et qu'il montre les dents, alors frappe-le mortellement de tes griffes de jaspe, ou brise-le en le serrant contre tes seins d'agate.

Pourquoi tarder? Va-t'en d'ici, je suis las de tes airs de langueur, las de ton regard toujours fixe, de ta somnolente magnificence. Ton haleine horrible, et lourde, fait vaciller la lumi��re de la lampe, et sur mon front je sens la moiteur, et les terribles ros��es de la nuit et de la mort. Tes yeux sont comme des lunes fantastiques qui frissonnent en quelque lac stagnant. Ta langue est comme un serpent ��carlate qui danse �� des airs fantastiques. Ton pouls bat des m��lodies empoisonn��es et ta gueule noire est comme le trou laiss�� par une torche ou par des charbons ardents sur des tapis sarrasins.

Va-t'en. Les ��toiles aux nuances de soufre s'enfuient en hate par la porte de l'occident. Va-t'en, ou peut-��tre il sera trop tard pour monter dans leurs silencieux chars d'argent! Vois, l'aurore frissonne autour des clochers gris qui portent un cadran dor��, et la pluie ruisselle sur chacune des vitres taill��es en diamant, et ses larmes rendent trouble le jour d��j�� terne. Quelle furie aux cheveux de serpents, r��cemment sortie de l'enfer, avec des gestes de laideur et d'impuret��, a pu s'enfuir loin de la reine qu'endorment les pavots, et l'introduire dans la cellule d'un ��tudiant?

Quel criminel fant?me, aussi d��pourvu de chant que de voix, s'est gliss�� �� travers les rideaux de la nuit, en voyant ma bougie br?ler avec ��clat, a frapp��, et vous a invit��e �� entrer? N'en est-il pas d'autres plus maudits, et d'une l��pre plus blanche que la mienne. Abana et Pharphar sont-ils dess��ch��s, que tu sois venue jusqu'ici pour ��tancher ta soif.

Sphinge trompeuse! Sphinge trompeuse, pr��s des roseaux du Styx, le vieux Charon, appuy�� sur sa rame, attend mon obole. Pars la premi��re, et laisse-moi �� mon crucifix, dont le pale Accabl�� de douleur, prom��ne sur le monde son regard las, et pleure sur toute ame qui meurt, et pleure sur toute ame vainement.
=CAMMA=
Ainsi qu'un homme, pench�� sur une urne grecque, ��tudia les belles formes qu'y a trac��es une main attique, Dieu et d��esse svelte, homme vigoureux et jeune fille, ainsi que leur beaut�� lui ?te tout d��sir de se retourner et de regarder en face la clart�� du jour. De m��me ne dois-je pas aspirer vers plus d'une lune myst��rieuse d'indolente volupt��, lorsque dans le plus intime secret du sanctuaire d'Art��mis, je te vois debout, sous tes formes antiques, et dans ta s��v��rit��.
Et pourtant,--il me semble,--j'aimerais mieux te voir, jouer le r?le de ce serpent du vieux Nil, dont l'enchantement donnait l'ivresse �� des Empereurs. Viens, grande ��gypte, ��branle notre sc��ne de tes d��fil��s symboliques! Ah! je suis enfin ��coeur�� de passions sans r��alit��. Fais du monde ton Actium, et de moi ton Antoine.
=IMPRESSION=
LE R��VEILLON
Le ciel est brod�� de rougeur capricieuse; les brouillards tournoient et des ombres fuient. L'aube monte de la mer, comme une blanche dame sort du lit.
Et des fl��ches dentel��es de bronze passent �� travers le duvet de la nuit, et une longue vague de lumi��re jaune s'��tale silencieusement sur les tours, les palais.
Et, s'��largissant avec ampleur sur la dune, ��veille et fait s'envoler un oiseau battant des ailes. Et toutes les cimes des noyers se mettent en mouvement, et toutes les branches se rayent de bandes d'or.
=�� V��RONE=
--Qu'ils sont raides �� gravir, les escaliers des maisons des rois pour les pieds fatigu��s des exil��s comme moi! Et qu'il est sal��, amer, le pain qui tombe de la table de ce chien! Bien mieux m'e?t valu mourir sur les routes ensanglant��es de la guerre, ou que ma t��te f?t suspendue sur la porte de Florence, plut?t que vivre ainsi, dans la familiarit�� de tous les ��tres qui cherchent �� salir l'essence de mon ame.
Maudis Dieu et meurs! Quel espoir est pr��f��rable �� celui-ci? Il l'a oubli�� parmi les plaisirs de sa cit�� d'or et de son jour ��ternel. Ah! Silence! derri��re les barreaux qui obscurcissent ma prison, je poss��de ce que
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