La fille des indiens rouges | Page 6

Émile Chevalier
qu'il ne devait pas ��tre ��loign�� de plus ?le deux degr��s de la c?te du Gro?nland, o�� les Danois avaient autrefois form�� un ��tablissement. Ce fut vers ce point qu'il essaya de diriger sa course.
Heureusement, il ��tait chaudement couvert; car il faisait un froid des plus vifs. Mais, sans boussole, sans instruments propres �� d��terminer exactement sa position, l'infortun�� ne pouvait compter que sur un hasard bien douteux pour arriver �� un port de salut.
La journ��e fut triste, la nuit plus triste encore. Cependant le courage du capitaine demeurait indomptable, quoique dans la soir��e pr��c��dente, il e?t remarqu�� qu'il n'avait pas une goutte d'eau abord. Pour rem��dier autant que possible �� ce mal, il s'��tait approch�� d'une banquise, y avait assujetti son canot, et, grimpant sur le banc de glace, avait d��tach�� les cong��lations sup��rieures, qui, form��es par les pluies et les neiges fondues, produisent, on le sait, une eau assez potable.[2]
[Note 2: Les exp��riences chimiques ont d��montr�� aujourd'hui que la cong��lation de l'eau a des effets assez analogues �� ceux de son ��bullition. Le r��sultat est presque le m��me. Par exemple, l'eau de mer bouillie se d��pouille presque enti��rement, par ��vaporation, des sels qu'elle tient en combinaison. Si l'on condense la vapeur ainsi ��lev��e, la quantit�� d'eau d��gag��e de sel ��galera environ les deux tiers du tout. Or, ceux qui ont eu l'occasion de s'assurer du fait savent qu'ind��pendamment des parties qui re?oivent les neiges et la pluie du ciel, la substance des icebergs se composa de deux tiers d'eau pure. Cela est si vrai que les baleiniers, destin��s �� la p��che dans le d��troit de Davis ou sur les c?tes du Gro?nland, n'emportent qu'une faible provision d'eau, certains qu'ils sont d'en trouver en abondance dans les icebergs, ou les ?les de glace, comme ils les appellent. Beaucoup de gla?ons, de dimensions relativement m��diocres, sont m��me travers��s par des veines bleues, remplies d'eau de neige congel��e, tr��s-potable.]
Ayant ��tanch�� sa soif et recueilli une certaine quantit�� de ces gla?ons pour les besoins �� venir, il reprit sa p��rilleuse navigation.
Le lendemain et jours suivants n'apport��rent aucun changement �� la terrible situation du capitaine, sinon que le temps s'adoucit et devint peu �� peu supportable. Rappelons-nous, au surplus, qu'on touchait �� la fin de juin. Alors, m��me �� une grande ��l��vation dans la mer polaire, l'atmosph��re arrive souvent �� un degr�� de chaleur extr��me, sans que les glaces qui obstruent l'Oc��an septentrional subissent d'alt��rations sensibles.
Quoique Guillaume m��nageat ses minces provisions, autant qu'il pouvait sans ��puiser ses forces, elles diminu��rent trop vite. Bient?t, il entrevit l'heure o�� elles lui feraient enti��rement d��faut. Parfois, ses yeux avides interrogeaient l'espace, cherchant �� discerner un cap, une voile �� l'horizon. Et rien! rien que des icebergs ou montagnes de glaces bleuatres, une mer ��galement bleue, un ciel gris d'une d��solante monotonie. Parfois aussi un mirage d��cevant lui faisait prendre pour la terre une de ces masses cristallis��es; mais, peu apr��s, la r��alit�� cruelle lui montrait son erreur.
La faim commen?ait �� le tourmenter. Sans succ��s il avait essay�� de p��cher avec une ligne faite des fils de sa chemise et d'un morceau de fer pour hame?on; sans succ��s il avait essay�� d'attraper un de ces go��lands qui voletaient fr��quemment autour de son esquif et par leurs cris per?ants semblaient insulter �� sa d��tresse.
Pour comble de mis��re, l'eau douce allait lui manquer aussi, car l'Oc��an se d��gageait, et les collines flottantes o�� Dubreuil allait la chercher se faisaient plus rares.
Un matin, apr��s un je?ne de vingt-quatre heures, il s'��veilla aux torturantes injonctions de son estomac, qui r��clamait imp��rieusement de la nourriture. Sa langue ��tait s��che, ses l��vres eu feu. Pour apaiser la soif ardente dont il ��tait consum��, Dubreuil se mit �� laper le givre que la fra?cheur de la nuit, jointe �� la chaleur de son corps, avait fait ��clore, en blanches ��toiles, sur ses v��tements.
Pauvre et insuffisante ressource!
A midi, il se sentait ��puis��, lorsqu'une forte brise chassa son canot vers un immense champ de glace qui s'��tendait �� perte de vue �� tribord. On e?t dit la c?te d'une vaste terre. A mesure qu'il en approcha, Guillaume ��prouva une indicible sensation de plaisir. ��tait-ce une ?le? ��tait-ce le rivage qu'il demandait �� Dieu avec tant d'instance?
Pour la premi��re fois, depuis une semaine, le soleil s'��tait lev��. En ��clatant sur la ligne de glace, ses rayons lui imprimaient les couleurs les plus chatoyantes, les formes les plus fantastiques, les plus vari��es. C'��taient des pics sveltes comme des campaniles, des tours aussi majestueuses que celles de nos basiliques, les unes rondes, d'autres carr��es, celles-ci coiff��es d'un chapiteau gothique, celles-l�� munies de cr��neaux et machicoulis. Ailleurs, on remarquait une vo?te, une arche de pont; ailleurs une ville avec ses remparts, ses ��glises, ses monuments publics. Dominant le tout, sur une hauteur, se dressait le royal palais, avec ?ses murailles
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