La fabrique de crimes | Page 8

Paul H. C. Féval
tout leur soleil, pour avoir pendant les mois d'��t��, un coin vert o�� rafra?chir l'inflammation de leurs paupi��res.
Il vient parfois un moineau dans ces indignes feuillages, et alors tout l'atelier de sourire. L'oiseau ��gar�� leur parle vaguement du ciel libre, des grandes prairies et des haies pleines de chansons qui bordaient la route si longue, si longue...
La route qu'elles prirent un jour pour ��changer tout cela contre les puanteurs de Paris.
Nous avons pris la libert�� de semer en passant ces quelques phrases bien senties, pour prouver qu'il y a de la po��sie dans notre coeur et de la philosophie dans notre cerveau. Nous n'y reviendrons plus. D'ailleurs ces ch��res exil��es ont Bullier, le Moulin-Rouge, le Casino de Paris, Gugusse, Alphonse et l'absinthe.
Une lueur venait �� travers les carreaux de la crois��e. L'oeil per?ant de Boulet-Rouge l'aper?ut le premier.
-- Silence! dit-il. La destin��e nous a conduits dans des lieux habit��s. �� cette heure exceptionnelle, je donnerais mes droits politiques pour un verre de cognac.
-- Vains d��sirs, dit Carapace.
-- Nous sommes ici s��par��s du monde entier, ajouta Arbre-��-Couche.
Boulet-Rouge reprit avec fiert��.
-- Si grand que soit le danger, je vous sauverai. Apr��s le trouble ins��parable d'un pareil accident, mes esprits rentrent dans leur assiette. Je vois les ��v��nements d'un oeil froid et calculateur. Nous sommes ici sur le balcon des ?Piqueuses de bottines r��unies?, atelier libre...
-- Quoi, si pr��s de notre point de d��part? s'��cria Arbre-��-Couche avec l'accent de la surprise.
Une id��e sanguinolente traversait d��j�� l'esprit de Carapace. Il murmura:
-- Messa, Sali!
-- Lina! r��pondirent les deux autres.
-- Les p��rip��ties les plus inattendues, reprit Carapace, ne doivent jamais nous faire oublier notre devoir. Nous appartenons �� M. le duc Rudelame-Carthag��ne par les liens combin��s du crime et de l'��conomie. J'ai confus��ment le soup?on que l'atelier des Piqueuses de bottines r��unies appartient �� la client��le du docteur Fandango. Consulte la liste, Arbre-��-Couche.
Nous ferons remarquer ici un d��tail curieux. Quand les trois Pieuvres males de l'impasse Gu��m��n��e causaient, ils se donnaient mutuellement leurs vrais noms, mais quand il s'agissait de travailler, ils revenaient �� ces myst��rieux sobriquets compos��s de Messalina d��doubl��: Messa, Sali, Lina.
L'attaque r��gle la d��fense. Dans le camp oppos��, Mandina de Hachecor, Castor, Pollux, Mustapha et le gendarme avaient aussi des professions apparentes qui cachaient des rejetons de l'ancienne f��odalit��, des banquiers, des artistes et des bacheliers ��s-lettres.
Arbre-��-Couche, l'homme aux papiers scell��s d'un cachet nobiliaire, fouilla aussit?t dans sa poche avec inqui��tude. Il songeait �� la culbute ex��cut��e �� trente-deux m��tres au-dessus des toits. Pendant ce violent travail, ses poches avaient pu se retourner. Il n'en ��tait rien heureusement, aussi s'��cria-t-il:
-- ? providence! je n'ai rien perdu!...
Carapace r��pondit:
-- J'ai bien gard�� ma bouteille de fer-blanc bouch��e avec du papier gris vert.
Et Boulet-Rouge ajouta d'un air pensif en frappant sur son cercueil d'enfant:
-- Tout est ��trange dans la situation o�� nous sommes.
Le cercueil d'enfant rendit un son creux difficile �� d��finir. Boulet-Rouge palit. L'id��e d'un d��ficit lui traversa l'esprit comme un ��clair.
-- Mon cercueil se serait-il ouvert �� mon insu? s'��cria-t-il.
Il l'ouvrit pr��cipitamment et, le voyant vide, il rala d'une voix ��trangl��e par la mauvaise humeur:
-- J'ai perdu mon enfant!
En ce moment, ses yeux brill��rent d'un ��clat sauvage. La prunelle des tigres de la jungle, dans l'Inde, ont[3] de ces lueurs ��tranges dans les nuits tropicales. Une plainte faible, un de ces cris particuliers qui sortent des berceaux et qu'on appelle vagissements, avait frapp�� son oreille subtile �� travers la fen��tre close.
-- Ah! se dit-il en lui-m��me, ce n'est pas la peine de se d��soler. Voil�� de quoi remplir ma botte.
Arbre-��-Couche, qui avait d��pli�� sa liste aux armes de M. le duc, mit un doigt dans sa bouche et imita le cri du coucou avec une incroyable perfection.
Les deux autres n'ignoraient point ce que signifiait ce signal. Ils pr��t��rent aussit?t une oreille attentive.
-- Ce n'��tait pas une coupable erreur, dit Arbre-��-Couche. Les petites ainsi d��nomm��es: Les Piqueuses de bottines r��unies, usent des drogues du docteur Fandango.
Il y eut un silence, comme apr��s tout arr��t prononc��.
Boulet-Rouge prit sous son aisselle un diamant de vitrier qui ne le quittait point. D'une main s?re il scia un carreau, le d��tacha et passant ses doigts par le trou, il tourna l'espagnolette de la crois��e.
-- Les chemins sont ouverts, dit-il.
Sans perdre de temps, ils pass��rent et Boulet-Rouge pronon?a:
-- Attendez-moi un instant, ici, j'aper?ois le berceau... je vais assassiner l'enfant pour utiliser mon cercueil.
On ne pouvait rien objecter �� une pens��e si sage.
Boulet-Rouge ouvrit son coutelas...
Juste �� la m��me minute, de l'autre c?t�� de la rue de S��vign��, une fen��tre s'ouvrit aussi au cinqui��me ��tage, La t��te blanche et v��n��rable de Silvio Pellico se montra aux rayons de l'astre des nuits.
Tancr��de, dit Chauve-Sourire, ��tait toujours prisonnier dans la chambre de Mandina de Hachecor. Il aper?ut le c��l��bre vieillard, saisit son arc, le banda, y adapta une fl��che empoisonn��e, ajusta et tira.
La
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