linceul, et les taches de vin pour des gouttes de sang.
--Heureusement que c'��tait un r��ve, dit Gorenflot en regardant de nouveau autour de lui.
Dans cet examen, ses yeux s'arr��t��rent sur Chicot, qui, sentant que le moine le regardait, ronfla de double force.
--Que c'est beau, un ivrogne! dit Gorenflot contemplant Chicot avec admiration.
--Est-il heureux, ajouta-t-il, de dormir ainsi! Ah! c'est qu'il n'est pas dans ma position, lui.
Et il poussa un soupir qui monta �� l'unisson du ronflement de Chicot, de sorte que le soupir e?t probablement r��veill�� le Gascon, si le Gascon e?t dormi v��ritablement.
--Si je le r��veillais pour lui demander avis? il est homme de bon conseil.
Chicot tripla la dose, et le ronflement, qui avait atteint le diapason de l'orgue, passa �� l'imitation du tonnerre.
--Non, reprit Gorenflot, cela lui donnerait trop d'avantages sur moi. Je trouverai bien un bon mensonge sans lui.
Mais, quel que soit ce mensonge, continua le moine, j'aurai bien de la peine �� ��viter le cachot. Ce n'est pas encore pr��cis��ment le cachot, c'est le pain et l'eau qui en sont la cons��quence. Si j'avais du moins quelque argent pour s��duire le fr��re ge?lier!
Ce qu'entendant Chicot, il tira subtilement de sa poche une bourse assez ronde qu'il cacha sous son ventre.
Ce n'��tait pas une pr��caution inutile; plus contrit que jamais, Gorenflot s'approcha de son ami et murmura ces paroles m��lancoliques:
--S'il ��tait ��veill��, il ne me refuserait pas un ��cu; mais son sommeil m'est sacr��... et je vais le prendre.
A ces mots, fr��re Gorenflot, qui, apr��s ��tre demeur�� un certain temps assis, venait de s'agenouiller, se pencha �� son tour vers Chicot et fouilla d��licatement dans la poche du dormeur.
Chicot ne jugea point �� propos, malgr�� l'exemple donn�� par son compagnon, de faire appel �� son d��mon familier, et le laissa fouiller �� son aise dans l'une et l'autre poche de son pourpoint.
--C'est singulier, dit le moine, rien dans les poches. Ah! dans le chapeau peut-��tre.
Tandis que le moine se mettait en qu��te, Chicot vidait sa bourse dans sa main, et la remettait vide et plate dans la poche de son haut-de-chausses.
--Rien dans le chapeau, dit le moine, cela m'��tonne. Mon ami Chicot, qui est un fou plein de raison, ne sort cependant jamais sans argent. Ah! vieux Gaulois, ajouta-t-il avec un sourire qui fendait sa bouche jusqu'aux oreilles, j'oubliais tes braies.
Et, glissant sa main dans les chausses de Chicot, il en retira la bourse vide.
--J��sus! murmura-t-il, et l'��cot, qui le payera?
Cette pens��e produisit sur le moine une profonde impression, car il se mit aussit?t sur ses jambes, et, d'un pas encore un peu avin��, mais cependant rapide, il se dirigea vers la porte, traversa la cuisine sans lier conversation avec l'h?te, malgr�� les avances que celui-ci lui faisait, et s'enfuit.
Alors Chicot remit son argent dans sa bourse, sa bourse dans sa poche, et, s'accoudant contre la fen��tre, que mordait d��j�� un rayon de soleil, il oublia Gorenflot dans une m��ditation profonde.
Cependant le fr��re qu��teur, sa besace sur l'��paule, poursuivait son chemin avec une mine compos��e qui pouvait para?tre aux passants du recueillement, et qui n'��tait que de la pr��occupation, car Gorenflot cherchait un de ces magnifiques mensonges de moine en goguette ou de soldat attard��, mensonge dont le fond est toujours le m��me, tandis que la trame se brode capricieusement selon l'imagination du menteur.
Du plus loin que fr��re Gorenflot aper?ut les portes du couvent, elles lui parurent plus sombres encore que de coutume, et il tira de facheux indices de la pr��sence de plusieurs moines conversant sur le seuil et regardant tour �� tour avec inqui��tude vers les quatre points cardinaux.
Mais, �� peine eut-il d��bouch�� de la rue Saint-Jacques, qu'un grand mouvement op��r�� par les fr��res au moment m��me o�� ils l'aper?urent lui donna une des plus horribles frayeurs qu'il e?t ��prouv��es de sa vie.
--C'est de moi qu'ils parlent, dit-il; ils me d��signent, ils m'attendent; on m'a cherch�� cette nuit; mon absence a fait scandale; je suis perdu!
Et la t��te lui tourna; une folle id��e de fuir lui vint �� l'esprit; mais plusieurs religieux venaient d��j�� �� sa rencontre; on le poursuivrait indubitablement. Fr��re Gorenflot se rendait justice, il n'��tait pas taill�� pour la course; il serait rejoint, garrott��, tra?n�� au couvent; il pr��f��ra la r��signation.
Il s'avan?a donc, l'oreille basse, vers ses compagnons, qui semblaient h��siter �� venir lui parler.
--H��las! dit Gorenflot, ils font semblant de ne plus me conna?tre, je suis une pierre d'achoppement.
Enfin l'un d'eux se hasarda, et, allant �� Gorenflot:
--Pauvre cher fr��re! dit-il.
Gorenflot poussa un soupir et leva les yeux au ciel.
--Vous savez que le prieur vous attend, dit un autre.
--Ah! mon Dieu!
--Oh! mon Dieu, oui, ajouta un troisi��me, il a dit qu'aussit?t rentr�� au couvent on vous conduis?t pr��s de lui.
--Voil�� ce que je craignais, dit Gorenflot. Et, plus mort que vif, il entra dans le couvent, dont la porte se referma sur
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