en supplie, pas m��me �� madame de Maupertuis, qui dort si profond��ment dans ce moment-ci.
--Laisse-la ronfler. ��veill��e ou endormie, c'est toujours la m��me b��te... C'est ��gal, de Kleist, je voudrais conna?tre cette Porporina, et savoir si l'on peut tirer d'elle quelque chose. Je regrette beaucoup de n'avoir pas voulu la recevoir chez moi, lorsque le roi m'a propos�� de me l'amener le matin pour faire de la musique: tu sais que j'avais une pr��vention contre elle...
--Mal fond��e, certainement. Il ��tait bien impossible...
--Ah! qu'il en soit ce que Dieu voudra! le chagrin et l'��pouvante m'ont tellement travaill��e depuis un an, que les soucis secondaires se sont effac��s. J'ai envie de voir cette fille. Qui sait si elle ne pourrait pas obtenir du roi ce que nous implorons vainement? Je me suis figur�� cela depuis quelques jours, et comme je ne pense pas �� autre chose qu'�� ce que tu sais, en voyant Fr��d��ric s'agiter et s'inqui��ter ce soir �� propos d'elle, je me suis affermie dans l'id��e qu'il y avait l�� une porte de salut.
--Que Votre Altesse y prenne bien garde... le danger est grand.
--Tu dis toujours cela; j'ai plus de m��fiance et de prudence que toi. Allons, il faudra y penser. R��veille ma ch��re gouvernante, nous arrivons.?
II.
Pendant que la jeune et belle abbesse[1] se livrait �� ses commentaires, le roi entrait sans frapper dans la loge de la Porporina, au moment o�� elle commen?ait �� reprendre ses esprits.
[Note 1: On sait que Fr��d��ric donnait des abbayes, des canonicats et des ��v��ch��s �� ses favoris, �� ses officiers, et �� ses parents protestants. La princesse Am��lie, ayant refus�� obstin��ment de se marier, avait ��t�� dot��e par lui de l'abbaye de Quedlimburg, pr��bende royale qui rapportait cent mille livres de rente, et dont elle porta le titre �� la mani��re des chanoinesses catholiques.]
?Eh bien, Mademoiselle, lui dit-il d'un ton peu compatissant et m��me peu poli, comment vous trouvez-vous? ��tes-vous donc sujette �� ces accidents-l��? dans votre profession, ce serait un grave inconv��nient. Est-ce une contrari��t�� que vous avez eue? ��tes-vous si malade que vous ne puissiez r��pondre? R��pondez, vous, Monsieur, dit-il au m��decin qui soignait la cantatrice, est-elle gravement malade?
--Oui, Sire, r��pondit le m��decin, le pouls est �� peine sensible. Il y a un d��sordre tr��s-grand dans la circulation, et toutes les fonctions de la vie sont comme suspendues; la peau est glac��e.
--C'est vrai, dit le roi en prenant la main de la jeune fille dans la sienne; l'oeil est fixe, la bouche d��color��e. Faites-lui prendre des gouttes d'Hoffmann, que diable! Je craignais que ce ne f?t une sc��ne de com��die, je me trompais. Cette fille est fort malade. Elle n'est ni m��chante, ni capricieuse, n'est-ce pas, monsieur Porporino? Personne ne lui a fait de chagrin ce soir? Personne n'a jamais eu �� se plaindre d'elle, n'est-ce pas?
--Sire, ce n'est pas une com��dienne, r��pondit Porporino, c'est un ange.
--Rien que cela! En ��tes-vous amoureux?
--Non, Sire, je la respecte infiniment; je la regarde comme ma soeur.
--Grace �� vous deux et �� Dieu, qui ne damne plus les com��diens, mon th��atre va devenir une ��cole de vertu! Allons, la voil�� qui revient un peu. Porporina, est-ce que vous ne me reconnaissez pas?
--Non, Monsieur, r��pondit la Porporina en regardant d'un air effar�� le roi qui lui frappait dans les mains.
--C'est peut-��tre un transport au cerveau, dit le roi; vous n'avez pas remarqu�� qu'elle f?t ��pileptique?
--Oh! Sire, jamais! ce serait affreux, r��pondit le Porporino, bless�� de la mani��re brutale dont le roi s'exprimait sur le compte d'une personne si int��ressante.
--Ah! tenez, ne la saignez pas, dit le roi en repoussant le m��decin qui voulait s'armer de sa lancette; je n'aime pas �� voir froidement couler le sang innocent hors du champ de bataille. Vous n'��tes pas des guerriers, vous ��tes des assassins, vous autres! laissez-la tranquille; donnez-lui de l'air. Porporino, ne la laissez pas saigner; cela peut tuer, voyez-vous! Ces messieurs-l�� ne doutent de rien. Je vous la confie. Ramenez-la dans votre voiture, Poelnitz! Enfin vous m'en r��pondez. C'est la plus grande cantatrice que nous ayons encore eue, et nous n'en retrouverions pas une pareille de si t?t. A propos, qu'est-ce que vous me chanterez demain, monsieur Conciolini??
Le roi descendit l'escalier du th��atre avec le t��nor en parlant d'autre chose, et alla se mettre �� souper avec Voltaire, La Mettrie, d'Argens, Algarotti et le g��n��ral Quintus Icilius.
Fr��d��ric ��tait dur, violent et profond��ment ��go?ste. Avec cela, il ��tait g��n��reux et bon, m��me tendre et affectueux �� ses heures. Ceci n'est point un paradoxe. Tout le monde conna?t le caract��re �� la fois terrible et s��duisant de cet homme �� faces multiples, organisation compliqu��e et remplie de contrastes, comme toutes les natures puissantes, surtout lorsqu'elles sont investies du pouvoir supr��me, et qu'une vie agit��e les d��veloppe dans tous les sens.
Tout en soupant, tout en raillant et devisant avec amertume
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