vers la route de Narbonne.
Les défenseurs, après avoir perdu les faubourgs, manquant d'eau, furent obligés de capituler. Le siège entrepris par l'armée des croisés ne dura que du 1er au 15 ao?t, jour de la reddition de la place. On ne peut admettre que pendant ce court espace de temps les assiégeants aient pu exécuter les travaux de mine ou de sape qui ruinèrent une partie des murailles et tours des Visigoths; d'autant qu'il existe des reprises faites pendant le XIIe siècle pour consolider et surélever les tours visigothes qui avaient été fort compromises par la sape et la mine.
Il faut donc admettre que les travaux de siège et les brèches dont on signale la trace, notamment sur le c?té nord, sont dus aux Maures d'Espagne, lorsqu'ils conquirent ce dernier boulevard des rois visigoths. Bernard Aton ne peut être, non plus, l'auteur de ces travaux de mine, car le traité qui lui rendit la cité occupée par ses sujets révoltés n'indique pas qu'il ait eu à faire un long siège et que les défenseurs fussent réduits aux dernières extrémités.
Le vicomte Raymond Roger, au mépris des traités et de la capitulation qui rendait la cité de Carcassonne aux croisés, était mort en prison dans une des tours en novembre 1209. Depuis lors, Raymond de Trincavel, son fils, avait été dépouillé, en 1226, par Louis VIII de tous ses biens reconquis sur les croisés. Carcassonne alors fit partie du domaine royal, et un sénéchal y commandait pour le roi de France.
En 1240, ce jeune vicomte Raymond de Trincavel, dernier des vicomtes de Béziers, et qui avait été remis en 1209 aux mains du comte de Foix (il était alors agé de deux ans), se présente tout à coup dans les diocèses de Narbonne et de Carcassonne avec un corps de troupes de Catalogne et d'Aragon. Il s'empare, sans se heurter à une sérieuse résistance, des chateaux de Montréal, des villes de Montolieu, de Saissac, de Limoux, d'Azillan, de Laurens et se présente devant Carcassonne.
Il existe deux récits du siège de Carcassonne entrepris par le jeune vicomte Raymond en 1240, écrits par des témoins oculaires: celui de Guillaume de Puy-Laurens, inquisiteur pour la Foi dans le pays de Toulouse et celui du sénéchal Guillaume des Ormes, qui tenait la ville pour le roi de France. Ce dernier récit est un rapport, sous forme de journal, adressé à la reine Blanche, mère de Louis IX.
Cette pièce importante nous explique toutes les dispositions de l'attaque et de la défense[3]. à l'époque de ce siège, les remparts de Carcassonne n'avaient ni l'étendue ni la force qui leur furent données depuis par Louis IX et Philippe le Hardi. Les restes encore très-apparents de l'enceinte des Visigoths, réparée au XIIe siècle, et les fouilles entreprises en ces derniers temps, permettent de tracer exactement les défenses existant au moment où le vicomte Raymond de Trincavel prétendit les forcer.
[Note 3: Le rapport du sénéchal Guillaume des Ormes, et le récit de Guillaume de Puy-Laurens ont été publiés et annotés par M. Dou?t d'Arcq, dans la Biblioth. de l'école des Chartes, 2e série, tome II, p. 363.]
Nous donnons ci-après, figure 2, le plan de ces défenses, avec les faubourgs y attenant, les barbacanes et le cours de l'Aude.
L'armée de Trincavel investit la place le 17 septembre 1240, et s'empare du faubourg de Graveillant, qui est aussit?t repris par les assiégés. Ce faubourg, dit le Rapport, est ante portam Tolos?. Or la porte de Toulouse n'est autre que la porte dite de l'Aude aujourd'hui, laquelle est une construction romane percée dans un mur visigoth, et le faubourg de Graveillant ne peut être, par conséquent, que le faubourg dit de la Barbacane. La suite du récit fait voir que cette première donnée est exacte.
Les assiégeants venaient de Limoux, c'est-à-dire du midi, ils n'avaient pas besoin de passer l'Aude devant Carcassonne pour investir la place. Un pont de pierre existait sur l'Aude. Ce pont est encore entier aujourd'hui: c'est le vieux pont dont la construction date, en partie, du XIIe siècle. Il ne fut que réparé et muni d'une tête de pont, sous saint Louis et sous Philippe le Hardi. Il est indiqué en P sur notre figure 2.
Raymond de Trincavel n'ignorait pas que les assiégés attendaient des secours qui ne pouvaient se jeter dans la cité qu'en traversant l'Aude, puisqu'ils devaient se présenter par le nord-ouest. Aussi le vicomte s'empara du pont, et, poursuivant son attaque le long de la rive droite du fleuve vers l'amont, il essaya de couper toute communication de l'assiégé avec la rive gauche.
Ne pouvant tout d'abord se maintenir dans le faubourg de Graveillant, en G (voir la fig. 2), il s'empare d'un moulin fortifié, M, sur un bras de l'Aude, fait filer ses troupes de ce c?té, les loge dans les parties basses du faubourg, et dispose son
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