le signalement avec promesse de mille piastres pour qui le livrera; et, pour qui lui donnera asile, la potence.
EUSèBE,--C'est trop peu!...
GENNARINO.--Un porte-clefs, son complice, a été dénoncé par un voiturier avec qui il faisait prix, c'est ainsi qu'on a tout découvert!
MARIO.--Et ce porte-clefs est arrêté?
GENNARINO.--Oui, Excellence.
MARIO, =descendant=.--Il a parlé?
GENNARINO.--Oh! s?rement... On l'a mis à la question.
EUSèBE.--C'est trop peu!...
MARIO, =vivement=.--Ma voiture est là?
=Il désigne la droite.=
GENNARINO.--Oui, Excellence, avec Fabio.
MARIO, =prenant son chapeau.=--Dis à Fabio de faire le tour et d'aller m'attendre sur la place, devant la grande porte... Après quoi tu viendras tout mettre en ordre. Allons, vivement, dépêche-toi!
GENNARINO.--Oui, Excellence!
=Il sort en tournant par la droite. Les cierges s'allument au fond et l'on commence à voir de tous c?tés les fidèles, hommes et femmes.=
EUSèBE, =allant allumer les cierges devant la Madone.=--Alors, Votre Excellence a déjà entendu parler de cette victoire de Marengo?
MARIO, =anxieux, regardant du c?té de la grille.=--Oui!
EUSèBE, =même jeu, lui tournant le dos et riant.= Joseph est rossé... Ah! Ah! Qu'est-ce qui a sur les doigts?... C'est Joseph!...
MARIO, =même jeu.=--Joseph?...
EUSèBE.--Oui... oui... le Bonaparte en carton... Ah! Ah! Celui qui franchit les Alpes avec ses canons!... Farceur, va! C'est à se tordre!...
=Angelotti para?t vaguement, ouvrant l'autre grille et disparaissant dans l'ombre.=
MARIO, =à lui-même.=--Enfin!...
EUSèBE.--Vous dites?...
MARIO.--Rien! =(L'attirant à lui pour détourner son attention.)= Tenez, père Eusèbe, merci et bonsoir!...
=Il s'en va vivement par le fond, à gauche.=
EUSèBE.--Il est vexé tout de même, le jacobin!... Trois Pauli! =(Faisant la grimace.)= C'est trop peu!
=Chants d'église, au fond, très affaiblis, et prières.=
EUSEBE, SCARPIA, SCHIARRONE AGENTS.
Scène VIII
GENNARINO
=Ils entrent par la droite, sur les chants très étouffés qui s'interrompent et reprennent par intervalles pendant la scène.=
SCARPIA, =après être entré, en silence, et avoir jeté un coup d'oeil, à mi-voix.=--Gardez toutes les portes! Visitez l'église et faites votre besogne, sans trop éveiller l'attention. =(Quatre agents remontent lentement et disparaissent par les deux c?tés du fond. Au sacristain qui descend et le reconnaissant salue jusqu'à terre.)= Viens ?a, bonhomme. Tu es le sacristain?
EUSèBE, =tremblant.=--Oui, Excellence.
SCARPIA.--Un criminel, évadé du chateau Saint-Ange, a passé la nuit dans cette église; il peut y être encore.
EUSèBE, =tremblant.=--Ah! mon Dieu! Ici!
SCARPIA.--Où est la chapelle des Angelotti?
EUSèBE.--De ce c?té, Excellence. La voici.
SCARPIA, =à Schiarrone.=--Voyez... =(Schiarrone et un agent entrent dans la chapelle. Murmures de prières au fond. Schiarrone repara?t.)= Eh bien?...
SCHIARRONE.--Personne, Excellence. La chapelle est vide.
SCARPIA.--Trop tard. L'homme s'est enfui au coup de canon. Aucune trace de son passage?
SCHIARRONE, =montrant dans les mains de l'autre agent les objets désignés.=--Pardon, Excellence. Divers objets de toilette. Un miroir, des ciseaux, des rasoirs... et des cheveux à terre.
SCARPIA.--Est-ce tout?
SCHIARRONE.--Oui, Excellence. =(L'autre agent repara?t avec un éventail.)= Oh! non... Un éventail.
SCARPIA.--Donnez. Ceci faisait partie de la toilette. =(Il ouvre l'éventail.)= Une couronne de marquise. C'est bien cela... l'éventail de l'Attavanti qu'il aura oublié dans sa hate, ou jugé superflu... Rien autre de tel?... Aucun ajustement de femme?
SCHIARRONE.--Aucun, Excellence.
SCARPIA.--C'est donc bien sous ce déguisement qu'il s'est enfui. Mais où?... Qui peut lui venir en aide?... =(A Eusèbe.)= Bonhomme! Tu n'as rien remarqué de particulier autour de cette chapelle?
EUSèBE.--Rien, Excellence... Ni avant, ni après l'ouverture des portes.
SCARPIA.--Ah! tu as fermé l'église?
EUSèBE.--Comme à l'ordinaire.
SCARPIA.--A clefs, bien entendu?
EUSèBE.--Sauf cette porte, quelqu'un restant à l'intérieur.
SCARPIA..--Et qui donc?
EUSèBE.--Le peintre qui travaille à ce tableau.
SCARPIA,--Et ce peintre s'appelle?
EUSèBE.--Cavaradossi.
SCARPIA.--Allons donc!... Nous br?lons... Ah! le chevalier Cavaradossi!... Un libéral, comme monsieur son père... =(En ce moment Gennarino, qui, depuis son retour, a tout rangé sur l'échafaudage, traverse avec le panier pour sortir.)= Que porte cet enfant?...
GENNARINO.--Excellence, c'est le panier où je mets tous les jours le go?ter de mon ma?tre.
SCARPIA.--Il est vide.
GENNARINO.--Comme Votre Excellence peut voir.
SCARPIA.--Ton ma?tre fait si grand honneur à tes provisions?
GENNARINO.--Oh! Jamais, Excellence... C'est bien la première fois. Le vin, c'est toujours père Eusèbe qui le boit.
EUSèBE, =protestant.=--Si l'on peut!...
SCARPIA.--Silence. =(Il fait signe au petit de s'éloigner.)= Cela suffit et me para?t fort clair!... =(A Eusèbe.)= Le chevalier était ici à ton retour?
EUSèBE.--Oui, Excellence, il part à l'instant!
SCARPIA.--Tu l'as vu seul?
EUSèBE.--Comme toujours, quand il travaille, sauf visites de certaine dame.
SCARPIA.--La Tosca?
EUSèBE.--Et, sans doute, elle est venue tant?t, si j'en crois ces fleurs qui n'étaient pas là à mon départ.
SCARPIA.--Oui, la Tosca est fidèle à l'Eglise et au roi. Ce n'est pas elle qui trahirait!... Toutefois, nous la surveillerons. =(Les agents reparaissent. Prélude des orgues qui ne cesse plus.)= Eh bien, Calometti?
L'AGENT.--Rien, Excellence.
SCARPIA.--Aucune personne suspecte?
L'AGENT.--Aucune.
SCARPIA.--Nous l'avons manqué de quelques minutes!... C'est assez, pour l'instant!... Messieurs, allons rendre grace au dieu des armées qui nous a donné la victoire!... Et prions la sainte Madone... =(Il se courbe devant elle.)= de bénir nos efforts dans cette autre guerre que nous faisons à l'impiété!...
=Il met un genou à terre. Tous font comme lui. Le chant des orgues éclate avec toutes les voix chantant le Te Deum.=
RIDEAU
ACTE II
Une grande salle au palais Farnèse. Au fond, trois fenêtres sur balcon, dominant la place illuminée. A gauche et à droite, troisième plan,
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