La San-Felice, Tome VI | Page 8

Alexandre Dumas, père
M. Parkenson surveiller le sondage.
--J'irai moi-m��me, dit Henry. Apportez une lumi��re dans les cha?nes de haubans du grand mat! Il faut que milord, de la dunette, puisse entendre ce que je dirai.
Ce commandement pr��para l'��quipage �� une crise.
Nelson s'approcha de la boussole pour la surveiller lui-m��me: la boussole n'avait point repris sa fixit��.
--Terre en avant! cria l'homme en vigie dans le mat de misaine.
--La barre �� babord! cria Nelson.
Le batiment tourna l��g��rement son cap au sud. La temp��te en profita pour s'engouffrer dans ses voiles. Un craquement se fit entendre, un nuage sembla flotter un instant �� l'avant du Van-Guard. On entendit l'explosion de plusieurs cordages qui se brisaient, et un immense lambeau de toile fut emport�� au-dessous du vent.
--Ce n'est rien, cria Henry; le grand foc a quitt�� ses ralingues.
--Brisants �� tribord! cria l'homme en vigie.
--Il est inutile d'essayer de virer par un pareil temps, murmura Nelson se parlant �� lui-m��me: nous manquerions notre abatt��e. Si rapproch��s que soient les ?lots, il y aura place entre eux pour un batiment. La barre �� tribord!
Ce commandement fit tressaillir tout l'��quipage; on allait au-devant du danger, on s'y jetait �� plein corps, on prenait, comme on dit proverbialement, le taureau par les cornes.
--Sondez! dit la voix ferme et imp��rative de Nelson dominant celle de la temp��te.
--Dix brasses, r��pondit la voix de Henry.
--Attention partout! cria Nelson.
--Brisants �� babord! cria le matelot en vigie.
Nelson s'approcha du bastingage et vit, en effet, la mer qui brisait furieusement �� une demi-encablure.
Le vaisseau ��tait pouss�� avec une telle rapidit��, que les brisants ��taient d��j�� presque d��pass��s.
--Ferme �� la barre! dit Nelson au pilote.
--Brisants �� tribord! cria le matelot en vigie.
--Sondez! dit Nelson.
--Sept brasses, r��pondit Henry. Mais je crois que nous marchons trop vite; si nous avions des brisants �� l'avant, nous ne pourrions pas les ��viter.
--Abaissez le hunier de misaine et celui du grand mat! faites prendre trois ris dans le hunier d'artimon! Sondez!
--Six brasses, r��pondit Henry.
--Nous sommes dans la passe entre Panaria et Stromboli, dit Nelson.
Puis, il ajouta �� voix basse:
--Dans dix minutes, nous serons sauv��s ou au fond de la mer.
Et, en effet, au lieu de cette esp��ce de r��gularit�� que conservent toujours les vagues, m��me au milieu de la temp��te, en courant devant elles, les vagues semblaient se briser les unes contre les autres, et l'on ne voyait, dans tout ce chaos d'��cume, dont les mugissements rappelaient les hurlements des chiens de Scylla, qu'une seule ligne sombre trac��e entre deux murailles de brisants.
C'��tait dans cet ��troit chenal que devait s'engager le Van-Guard.
--Combien de brasses? demanda Nelson.
--Six.
L'amiral fron?a le sourcil: une brasse de moins, le Van-Guard touchait.
--Milord, dit le timonier d'une voix sourde, le batiment ne marche plus.
En effet, le mouvement du Van-Guard ��tait �� peine sensible, et, apr��s avoir couru devant la temp��te avec une vitesse de onze noeuds �� l'heure, si l'on e?t jet�� le loch, on n'e?t point constat�� plus de trois noeuds.
Nelson regarda tout autour de lui. Le vent, bris�� par les ?lots au milieu desquels il naviguait, n'aurait eu de prise que sur les hautes voiles si elles avaient ��t�� ouvertes. D'un autre c?t��, un courant sous-marin semblait s'opposer �� la marche du vaisseau.
--Combien de brasses? demanda Nelson.
--Six, toujours, r��pondit Henry.
--Milord, dit le vieux timonier, qui ��tait Sicilien, du petit village de la Pace, et qui vit ce qui pr��occupait Nelson, milord, sauf votre respect, m'est-il permis de dire un mot?
--Parle.
--C'est le courant qui remonte.
--Quel courant?
--Celui du d��troit. Et, par bonheur, il nous donne un demi-pied et m��me un pied d'eau de plus.
--Tu crois que le courant remonte jusqu'ici?
--Il remonte jusqu'�� Paolo, milord.
--Pare �� hisser les huniers et les perroquets! cria Nelson.
Quoique l'ordre ��tonnat les matelots, il fut ex��cut�� avec cette ob��issance passive et muette qui est la premi��re qualit�� des marins, surtout dans les heures de danger.
On vit donc, aussit?t que l'ordre eut ��t�� r��p��t�� par l'officier de quart, se d��rouler, le long des mats et des matereaux, les hautes voiles, que seules pouvait atteindre le vent.
--Il marche! il marche! s'��cria le timonier avec un accent joyeux qui indiquait la crainte qu'il avait eue un instant qu'au lieu de suivre intelligemment et fid��lement la route qui ��tait trac��e, le Van-Guard ne roulat sur les brisants dont il ��tait entour��.
--Sondez! cria Nelson.
--Sept brasses, r��pondit Henry.
--Des brisants �� l'avant! cria le matelot en vigie dans la hune de misaine.
--Des brisants �� tribord! cria le matelot appuy�� au bossoir d'avant.
--La barre �� tribord! cria Nelson d'une voix tonnante; toute! toute! toute!
Cette triple r��p��tition du commandement de l'amiral indiquait l'imminence du danger. Le vaisseau en effet, n'ob��it qu'au moment o�� l'effort r��uni de deux matelots porta la barre toute �� tribord et quand l'extr��mit�� du boute-hors s'��tendait d��j�� au dessus de l'��cume.
Tout ce qu'il y avait d'hommes sur le pont avaient suivi avec anxi��t�� le mouvement du vaisseau. Dix secondes de r��sistance
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