La San-Felice, Tome VI | Page 4

Alexandre Dumas, père
certaine impatience, nous nous ��levons au vent pour courir des bord��es, et, si Sa Majest�� me fait l'honneur de rester sur la dunette, elle va, dans vingt minutes, nous voir virer de bord et rattraper le temps et le chemin que nous avons perdus.
--Virer de bord? Oui, je comprends, dit le roi: c'est faire ce que vous venez de faire tout �� l'heure. Mais est-ce que vous ne pourriez pas virer de bord un peu moins souvent? Tout �� l'heure, il m'a sembl�� que vous m'arrachiez l'ame.
--Sire, si nous ��tions dans l'Atlantique et que, vent debout, j'allasse des A?ores �� Rio-de-Janeiro, je ferais, pour ��pargner �� Votre Majest�� une indisposition �� laquelle je suis sujet moi-m��me et que, par cons��quent, je connais, des virements de bord de soixante et de quatre-vingts milles; mais nous sommes dans la M��diterran��e, nous allons de Naples �� Palerme, et nous devons faire des virements de bord de trois en trois milles au plus. Au reste, continua Nelson en jetant un regard sur Capri, dont on s'��loignait de plus en plus, Sa Majest�� peut rentrer tranquillement dans son appartement et rassurer la reine. Je r��ponds de tout.
A son tour, le roi respira, quoiqu'il n'e?t point entendu directement les paroles de Nelson; Nelson les avait prononc��es avec une telle conviction, que cette conviction ��tait pass��e dans le coeur d'Emma, et, du coeur d'Emma, dans celui du roi.
Ferdinand descendit donc, annon?ant que tout danger ��tait pass��, et qu'Emma le suivait pour donner �� la reine la m��me assurance.
Emma suivit le roi, en effet; mais, comme elle d��via de la ligne droite en passant par la cabine de Nelson, ce ne fut qu'une demi-heure apr��s que la reine, compl��tement rassur��e, commen?a de s'endormir, la t��te appuy��e sur l'��paule de son amie.
Le grain qui avait failli jeter Nelson sur les c?tes de Capri avait atteint Caracciolo mais d'une fa?on moins sensible. D'abord, une partie de sa violence avait ��t�� bris��e par les hauts sommets de l'?le qui se trouvaient au vent; ensuite, ayant �� manoeuvrer un batiment plus l��ger, l'amiral napolitain lui avait command�� plus facilement que Nelson n'avait pu le faire au lourd Van-Guard, encore tout mutil�� par les boulets d'Aboukir.
Aussi, quand, au point du jour, apr��s avoir pris deux ou trois heures de repos, Nelson remonta sur la dunette de son batiment, vit-il que, lorsque, avec grand'peine, il ��tait parvenu �� doubler Capri, Caracciolo et son batiment ��taient �� la hauteur du cap Licosa, c'est-��-dire avaient de quinze �� vingt milles d'avance sur lui.
Il y avait plus: tandis que Nelson naviguait seulement sous ses trois huniers, sa brigantine et son petit foc, lui avait conserv�� toutes ses voiles, et, �� chaque virement de bord, gagnait dans le vent.
Malheureusement, dans ce moment, le roi monta �� son tour sur la dunette, et vit Nelson, qui, sa lunette �� la main, suivait d'un oeil jaloux la marche de la Minerve.
--Eh bien, demanda-t-il �� Henry, o�� en sommes-nous?
--Vous le voyez, sire, r��pliqua Henry, nous venons de doubler Capri.
--Comment! dit le roi, ce rocher est encore Capri?
--Oui, sire.
--De sorte que, depuis hier trois heures du soir, nous avons fait vingt-six ou vingt-huit milles?
--A peu pr��s.
--Que dit le roi? demanda Nelson.
--Il s'��tonne que nous n'ayons pas fait plus de chemin, milord.
Nelson haussa les ��paules.
Le roi devina la question de l'amiral et la r��ponse du capitaine, et, comme le geste de Nelson lui avait paru peu respectueux, il r��solut de s'en venger en humiliant son orgueil.
--Que regardait donc milord, demanda-t-il, quand je suis mont�� sur la dunette?
--Un batiment qui est sous le vent �� nous.
--Vous voulez dire en avant de nous, capitaine.
--L'un et l'autre.
--Et quel est ce batiment? Je ne pr��sume pas qu'il appartienne �� notre flotte.
--Pourquoi cela, sire?
--Parce que, le Van-Guard ��tant le meilleur batiment et milord Nelson le meilleur marin de la flotte, aucun batiment ni aucun capitaine, il me semble, ne peuvent les d��passer.
--Que dit le roi? demanda Nelson.
Henry traduisit �� l'amiral anglais la r��ponse de Ferdinand.
Nelson se mordit les l��vres.
--Le roi a raison, dit-il, nul ne devrait d��passer le vaisseau amiral, surtout lorsqu'il a l'honneur de porter Leurs Majest��s. Aussi, celui qui a commis cette inconvenance va-t-il en ��tre puni, et �� l'instant m��me. Capitaine Henry, faites signe �� M. le prince Caracciolo de ne plus gagner dans le vent et de nous attendre.
Ferdinand avait devin��, au visage de Nelson, que le coup avait port��, et, ayant compris, �� son intonation br��ve et imp��rative, que l'amiral anglais donnait un ordre, il suivit des yeux le capitaine Henry, pour lui voir accomplir cet ordre.
Henry descendit de la dunette, resta quelques minutes absent et revint avec divers pavillons arrang��s dans un certain ordre, qu'il fit attacher lui-m��me �� la drisse des signaux.
--Avez-vous fait pr��venir la reine, dit Nelson, qu'un coup de canon allait ��tre tir�� et qu'elle ne s'en inqui��tat point?
--Oui,
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